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Chèque sans provision à l'Education Nationale

 

Nous ne partageons pas toujours les idées de Jean-Paul Brighelli, en particulier sur son engagement pour un laïcisme dangereux ou sur son admiration pour Voltaire.

Mais comme nous le faisons régulièrement, nous n'hésitons pas à reproduire toute note intéressante. L'article qu'il a donné le 7 juin dans LE POINT en fait partie.

 

 

Faute de convaincre les enseignants avec des réformes absconses, François Hollande a choisi de les acheter. Pas cher. Et en fermant les yeux sur l'essentiel.

Judas a trahi le Christ pour quarante deniers, selon la tradition. C'est peu pour un fils de dieu, mais cela restait important au Ier siècle. Hollande veut acheter le vote des enseignants pour 27 euros de plus par mois – c'est ce qui restera de toutes les belles promesses de Mme Vallaud-Belkacem une fois que l'on aura tenu compte de l'augmentation parallèle du prélèvement pour pension civile et de la conversion de l'indemnitaire en indiciaire. Un milliard promis, des clopinettes à l’arrivée.

Cadeaux à crédit

27 euros ! Une belle somme pour tenter une conscience enseignante ! Ah, j'oubliais les milliers de postes créés par le gouvernement « socialiste » – sur le papier, parce que, dans les faits, les jurys de concours peinent à affecter à des étudiants à peu près compétents les places qui leur sont octroyées pour remplacer, déjà, les départs à la retraite de plus en plus nombreux. Et encore, une fois les concours passés, reste le filtre indispensable de la validation par les inspecteurs, qui n'envoient pas forcément au feu des gens qui ne sont pas capables de le soutenir. Ou qui affichent des convictions peu conformes aux contraintes laïques de la République. J'oubliais aussi les promesses (« Words ! Words ! Words ! ») de sur-revalorisation concernant… les enseignants les plus dociles, comme l'a souligné le Snalc. J'ai travaillé douze ans en ZEP, mais je ne crois pas que cela suffise à me mettre dans les petits papiers d'un ministre qui me présume d'extrême droite puisque je dis la vérité. La prime spécial lèche-bottes ! Il fallait y penser.

François Bayrou a eu beau jeu de dénoncer des promesses « clientélistes » : « Je pense que les enseignants français sont mal payés, plus mal payés que les autres, mais je voudrais bien que le gouvernement nous dise d'où il tire cet argent. » C'était le 2 mai dernier au micro de BFM. Et de préciser : « Depuis des semaines a commencé la grande opération clientéliste, qui consiste à essayer de récupérer, catégorie par catégorie, les voix des uns et des autres, en signant des chèques dont on n'a pas évidemment le premier euro sur son compte. »

Parce que c'est l'une des singularités plaisantes des brèves de comptoir distillées par le gouvernement. C'est aux futurs gouvernements de 2017-2020 qu'incombera la tâche de ramener les salaires enseignants… au niveau de 2010. Imaginez que le Père Noël vous fasse des cadeaux payables à crédit.

Revaloriser pour de bon

Pour être tout à fait sérieux deux minutes, il faut dire que la profession d'enseignant est moins rémunératrice en France que partout ailleurs en Europe. Et, contrairement à ce que d'aucuns s'imaginent, pour un temps de travail devant les élèves nettement supérieur à la moyenne de l'OCDE. Les curieux trouveront tous les chiffres ici : un enseignant français, dont le salaire n'a cessé de baisser, selon les propres données du ministère, trois fois plus vite que pour les autres fonctionnaires depuis 2012 (et 15 fois plus vite si l'on prend en compte les années antérieures), gagne en moyenne 2 000 euros par mois (brut). « Alors que le salaire moyen annuel du professeur des écoles est de 24 724 euros, on est à 42 891 en Allemagne, 25 123 en Angleterre, 27 754 en Espagne, 30 335 en Belgique, 32 225 aux Pays-Bas, 48 360 en Norvège, 31 699 en Finlande, selon Eurostat. Il atteint même 70 450 euros au Luxembourg. » Futurs collègues, fuyez au Grand-Duché ou chez Mme Merkel !

Et fuyez vite, parce que d'ici quelques années vous n'en aurez plus les moyens, vu que l'allemand (entre autres) disparaît des classes de collège.

L'argent coule, mais pas pour les enseignants ni les élèves

Pourtant, l'argent coule à flots au ministère. Il coule pour les cadres administratifs. Il coule pour l'informatisation à tout prix – un prix élevé, si possible, cela fera plaisir aux copains de Microsoft, comme je le racontais ici même il y a quelques mois. Il coule pour des activités périscolaires forcément indispensables. Il coule pour l'enseignement des langues et cultures d'origine – il va même couler de plus en plus. Il coule enfin pour le « service civique », qui a lui aussi des finalités éducatives.
Il ne coule pas pour les enseignants, il ne coule pas pour les élèves en difficulté, à qui il faudrait donner infiniment plus que les rogatons du « socle de compétences », il ne coule pas pour ceux qui se battent au quotidien pour transmettre des savoirs – le mot inqualifiable !

Alors, revaloriser sérieusement les salaires enseignants ? Figurez-vous que des études concordantes ont montré que plus les enseignants sont bien payés, plus les élèves progressent – sans doute parce qu'une profession attractive attire les meilleurs.

François Hollande attirera peut-être quelques enseignants avec la pellicule de miel dont il enrobe son éponge de vinaigre. Il n'attirera pas la majorité de celles et ceux qui se battent aujourd'hui au quotidien pour leurs élèves, et contre des réformes qui sont autant de mauvais coups portés aux enfants de France. Voter Hollande en 2017, c'est vouloir explicitement le retour des mêmes, et des mêmes recettes, qui achèveraient de crucifier le système éducatif français. C'est voter pour Judas.

Commentaires

  • Jésus a été livré par Judas pour 30 pièces d'argent (Mathieu 26, 14-15).

    Cordialement.

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