Madame LOISEAU, ministre des affaires européennes était à Montpellier le 19 juillet dernier. Elle a donné un déjeuner à la préfecture. Jusque-là rien de plus normal. Pas pour tout le monde cependant, tout au moins pour ceux que nous appelons désormais les grands « Démocrates-Républicains-Donneurs de leçons »
Kleber Mesquida, président du Conseil départemental, s’est fendu d’un courrier adressé au Président de la République, pas moins, pour se plaindre de « la présence en nombre au côté de la ministre de militants du parti La République en Marche [ce qui] a pour le moins choqué certains participants, dont mon vice-président Renaud Calvat qui s’en est ouvert à la ministre ». Déjà empêtré dans l’affaire Benalla, voilà le pauvre Emmanuel Macron rattrapé par un dossier autrement plus grave, la dépression de MM. Mesquida-Calvat !
À première lecture on aurait pu penser qu’il s’agissait d’une plaisanterie, une « lettre cachée », comme il y a des « caméras cachées », que notre naïveté ou notre crédulité ne nous aurait pas permis de déceler. Ou d’un trait d’humour du Président qui, emporté par la détente des vacances, avait imaginé cette farce comme celle d’un premier avril. Mais, réflexion faite et sachant par expérience que l’humour n’est pas son fort, ni celui des socialistes, on se dit qu’il n’aurait pas pu aller jusque-là et que réellement, le malheureux Renaud Calvat s’est senti isolé au milieu d’un nombre trop important de représentants d’un parti qui n’est pas le sien. Il avait peut-être oublié que notre système politique ne se nourrit que de luttes partisanes !
Réalisant donc qu’il ne s’agissait pas d’une plaisanterie, qui ne nous aurait d’ailleurs pas fait beaucoup rire, nous n’avons pas pu nous retenir d’un grand éclat de rire.
Nos lecteurs connaissent bien maintenant le sort qui nous est réservé au département, les refus, mises à l’écart, absences d’informations et autres amabilités que nous subissons depuis plus de trois ans.
Nous ne nous plaignons pas des discriminations que nous supportons régulièrement à l’occasion d’une réception ou d'une manifestation où nous nous retrouvons quelque fois seuls, à peine salués, quelque fois pas du tout, et mis à l’écart. Nous mettons ces médiocres attitudes sur le compte d’une piètre éducation ou sur l’amertume ressentie à la pensée que nous ayons pu être élus par une belle majorité de nos concitoyens, et ainsi mettre fin à un monopole de direction départementale, source de dangereuses opacités. Mais il ne nous est jamais venu à l’idée d’écrire au président de la République !
Ce dont nous nous plaignons et le répétons sans cesse, c’est d'être écartés systématiquement de toute décision, de toute participation au fonctionnement des instances départementales et de toute présence dans les différents organismes de nos cantons. Ceci est autrement plus grave que le vague à l’âme ou la mélancolie de Messieurs Meskida et Calvat dans un déjeuner préfectoral... C’est d’une toute autre nature que la présence, jugée excessive, de sympathisants d’un parti différent. Sont-ils d’ailleurs si différents ? Ce n’est rien d’autre qu'un intolérable mépris à l’égard d'une grande partie de nos concitoyens et de nos cantons. C’est la mise en œuvre d’une gouvernance autocratique destinée ni plus ni moins qu’à bâillonner toute voix discordante. Tout cela, systématiquement enrobé de "valeurs de la République", "liberté d'expression", "vivre ensemble" et autres poncifs.
C’est la raison pour laquelle la (fausse) grosse colère du président n’a pas manqué de nous amuser.
Mais au-delà, cet exercice ridicule démontre, soit l’aveuglement du président quant à ses méthodes de direction, l'habitude du césarisme se prend vite, soit un magistral cynisme assumé et mis en œuvre de longue date, par habitude également. Je me suis laissé dire que ceux qui le connaissent bien opteraient pour la deuxième hypothèse...
Henri Bec