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Réforme de la Police Judiciaire - L'avis d'un commandant honoraire de la PJ

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Gérald Darmanin voudrait-il déshabiller Pierre

pour habiller Paul ?

 

Par Jacques Nain

Nain.jpgEn 1907, dans le but de lutter contre la multiplication des crimes et délits dans les campagnes, le président du Conseil et ministre de l'Intérieur Georges Clemenceau, décide de la création des Brigades régionales de police mobile, communément dénommées « Brigades du Tigre ».  La Police Judiciaire était née ! On connaît la suite…

 Aujourd’hui le ministre de l’Intérieur a prévu  la suppression de  la Police Judiciaire dont les effectifs devraient intégrer les filières d’investigations unifiées de chacun de nos départements en fusionnant avec les personnels des unités de sécurité publique, ceux au quotidien, en charge de la délinquance de masse.

 Les policiers de PJ grognent.

 Face à ce projet gouvernemental, apolitique et sans étiquette syndicale, l’Association Nationale de Police Judiciaire - ANPJ - a même été créée pour défendre l’indépendance de la PJ : une première dans l’Institution. Fortement soutenus par de nombreux magistrats du siège comme du parquet, les policiers PJ entendent protéger leur outil professionnel contre la criminalité.

 En réaction à la colère des policiers, début septembre, la place Beauvau  a organisé une première réunion de concertation ; celle-ci devrait être renouvelée très prochainement. Le ministre de l’Intérieur Gérard DARMANIN serait paraît-il à l’écoute des personnels afin de maintenir les missions historiques de la Police Judiciaire.

 Il voudrait mieux !

 En effet, au-delà de toutes considérations partisantes et en totale objectivité, la réforme envisagée serait à mon sens un véritable fiasco, une désorganisation d’un savoir-faire et un sabotage de la spécificité dans la lutte contre les auteurs de meurtres, d’assassinats, de vols qualifiés, de vols à main armée, d’associations de malfaiteurs, de rackets, de tortures, d’agressions violentes, de trafics de stupéfiants, d’armes et de fausse monnaie, de proxénétisme aggravé, de blanchiments d’argent, de cyber criminalité, de terrorisme, etc.

 En 1907, face à des criminels itinérants, Georges Clemenceau avait créé une police mobile aussi, aujourd’hui,  force est de constater qu’avec la nomadisation généralisée de la société, la démocratisation et la vitesse des transports, le phénomène s’est sérieusement amplifié : la voyoucratie n’est pas exclue de ce mode de vie.  Ainsi, sur l’ensemble du territoire, Hexagone comme DROM – Départements et régions d’outre-mer -, la mission de police criminelle est omniprésente. Depuis toujours, l’efficacité de la Police Judiciaire a été sa mobilité, son dynamisme et son adaptabilité aux affaires criminelles où qu’elles se commettent. Depuis 1907, les exemples sont nombreux.  En 1991, le ministre de l’Intérieur Philippe MARCHAND répondait en ce sens à la question écrite d’un Sénateur (JO Sénat du 12/09/1991, page 1966).

 Ainsi, le maintien de la Police Judiciaire c’est l’assurance de la continuité d’un service public opérationnel de qualité  sur l’ensemble du territoire national avec, si les nécessités d’une enquête judiciaire l’exigent, la possibilité de renforts venant des DRPJ ou de la DCPJ – les Directions Régionales ou la Direction Centrale -.

 Là est le cœur du problème !

 En effet, les limites territoriales du ressort d’un département imposées à tous les officiers de police par l’article 18 du Code de Procédure Pénale sont des contraintes dont sont exempts ceux de la DCPJ et des DRPJ. Les premiers ont une compétence judiciaire sur l’ensemble du territoire national ; les seconds ont un ressort judiciaire étendu soit sur une ou plusieurs zones de défense. Ces OPJ ont donc plus de facultés,  d’initiatives, de discrétion et de rapidité pour mener à bien leurs enquêtes. Une intégration au niveau départemental supprimerait leur efficacité d’investigations.

 Et puis, stricto sensu, face à des crimes commis sur plusieurs départements et régions, quel serait le service départemental centralisant l’ensemble des éléments d’enquêtes pour coordonner avec pertinence la direction des recherches et des investigations ?

 De même, avec cette réforme que deviendraient la gestion et la mise en œuvre des interceptions de sécurité prévues dans la loi du 10 juillet 1991et autres moyens techniques d’aide aux enquêtes de Police Judiciaire ?

 Par ailleurs, le suivi des relations internationales en liaison avec les personnels du quai d’Orsay pour la mise en œuvre des réseaux Interpol, Schengen et Europol sera vraisemblablement négligé pénalisant la collaboration internationale nécessaire à la lutte contre la criminalité organisée.

 À l’évidence, cette réforme voulue par le ministre de l’Intérieur Gérard DARMANIN  n’a pas été suffisamment réfléchie et ses conséquences analysées vis-à-vis d’un fonctionnement qui a prouvé depuis plus de 110 ans son efficacité. Un ajustement est sûrement possible mais sûrement pas une réforme aussi abyssale ?

 En réalité, en souhaitant intégrer les effectifs de Police Judiciaire à ceux des départements, Gérald DARMANIN déshabille Pierre pour habiller Paul ? Une façon comme une autre de tenter de dissimuler le manque de policiers dans les commissariats de sécurité publique. En effet, son modus operandi sur les villes de Montpellier, Béziers et Perpignan où des renforts ponctuels CRS ont été récemment déployés pour les trois mois à venir démontre, si besoin était, le manque patent d’effectifs dans les commissariats de ces trois villes.

 Tout cela est d’autant plus dommageable que si la réforme de la Police Judicaire devait aboutir, elle ne compenserait en rien au niveau national cette carence d’effectifs des policiers, professionnels de la sécurité publique de nos villes,  tout en laissant le champ libre à la grande délinquance et à la criminalité organisée !

 CQFD !

 Jacques NAIN

Commandant de Police Honoraire

- Dix ans Inspecteur à l’Office Central pour la Répression du Banditisme à la DCPJ, au Ministère de l’Intérieur.

- Dix ans chargé des Affaires Réservées auprès du Directeur Central de la Police Judiciaire de l’État-Major au Ministère de l’Intérieur.

Jacques Nain a participé à la traque de l'ennemi public n° 1, Jacques Mesrine. Il le raconte dans un livre passionnant :

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