Une convention signée entre François Jonquères et le secrétaire perpétuel de l’Académie française devait aboutir à une dotation. Cette dernière visait à la création du grand prix littéraire Michel Déon, tel que défini dans l’accord passé ce 1er octobre 2019.
Un décret diffusé au Journal officiel ce 12 mai, indique que l’Académie française est désormais « autorisée à accepter, aux clauses et conditions décrites dans la convention », les fonds donnés par François Jonquères.
En août dernier, Michel Déon avait reçu le prix littéraire des Hussards pour Une amitié vagabonde (Ed. de la Thébaïde). A cette occasion, François Jonquères avait signé un texte exprimant toute son admiration pour l’œuvre que l’écrivain avait laissée.
Michel Déon (4 août 1919 - 28 décembre 2016), avait assuré être « intéressé par les ultimes survivants d’un mode de vie condamné par la marche des siècles ». Et François Jonquères d’y voir là « bien un héros de nos tristes temps ». Et présentait Michel Déon comme « très grand hussard parmi les hussards. »
Membre de l’Académie Française, son siège — le fauteuil F8 — avait été mis au vote à plusieurs reprises, avant que l’écrivain Daniel Rondeau ne finisse pas l’emporter, le 6 juin 2019.
Michel Déon, décédé en Irlande, avait largement mobilisé les intellectuels qui signèrent en février 2018 une pétition pour que l’on octroie une sépulture à l’auteur. Son corps avait été rapatrié pour être incinéré, mais la famille tentait depuis d’obtenir une place au cimetière du Montparnasse.
À l’époque, Anne Hidalgo s’était abritée derrière le règlement, indiquant : « Nous avons cherché sans les trouver les moyens de rendre possible une dérogation qui au vu des textes et du petit nombre de places disponibles ne l’était pas. » Finalement, les règles avaient pu être contournées, devant la mobilisation du milieu littéraire — on comptait parmi la centaine de signataires Erik Orsenna, Amélie Nothomb, Delphine de Vigan, Yasmina Reza, Didier Decoin, Guillaume Musso, Michel Houellebecq, Eric-Emmanuel Schmitt ou encore Sempé, mais également Antoine Gallimard, Emmanuel Carrère ou Irène Frain.
Un prix pour prosateur, libre d'esprit
« Ce prix Michel Déon présente une originalité notable puisqu’il est transfrontalier, décerné une année en Irlande, par l’Académie royale irlandaise, et l’autre année, en France, par l’Académie française. L’originalité ne s’arrête pas là, car l’Irlande récompense un essai ou une œuvre non romanesque alors que la France a choisi d’honorer un roman », nous indique François Jonquères.
Une dotation de 10.000 € est assurée par le gouvernement d’Irlande, tandis qu’en France, c’est lui qui fait don de la somme pour le lauréat – récompensé tous les deux ans, donc.
La création du prix a été validée par sa fille, Alice Déon, et mise en oeuvre par plusieurs amis et fidèles. Il aura pour vocation « d’encourager et récompenser les stylistes, les esprits libres et décomplexés, amoureux de belle littérature, qui ne sont pas effrayés par leur ombre », nous précise François Jonquères.
L'écrivain Frédéric Vitoux avait proposé comme définition, validée par l’Académie française : « Destiné à un prosateur de langue française ayant déjà publié plusieurs livres, pour saluer en particulier son style et sa liberté d’esprit. » Ce qui exclurait la poésie, sans limiter les autres genres, à condition que le texte soit en prose. De son côté, l’écrivain Pierre Joannon aura contribué à porter sur les fonts baptismaux le Prix Michel Déon de la Royal Irish Academy financé par le Ministère des Affaires Etrangères irlandais.
En 2019, le prix a été décerné pour la première fois en France, à l’occasion du centenaire de la naissance de Michel Déon, à Stéphane Hoffmann (pour Les belles ambitieuses, Albin Michel), lequel venait de recevoir le prix des Hussards, créé par Christian Millau, Marina Cousté et François Jonquères, en 2013.