G-BDQD17ZWM0

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Politique extérieure

  • L’année 2023 en Afrique : bilan et perspectives pour 2024

    L'Afrique réelle.jpg

     

    Par Bernard Lugan

    Lugan1.jpgEn 2023 un nouveau paradigme s’est imposé en Afrique, celui du rejet des universalismes occidentaux, à commencer par la démocratie.

     Retour en arrière. Au mois de juin 1990, lors de la Conférence franco-africaine de La Baule, François Mitterrand conditionna l’aide de la France à l’introduction du multipartisme.

     Obéissant à cette injonction de nature néo-coloniale, contrainte et forcée, l’Afrique francophone accepta ce diktat socialiste. Résultat, elle connut une cascade de crises et de guerres, le multipartisme y exacerbant l’ethnisme et le tribalisme jusque-là canalisés dans le parti unique. Ce fut alors le triomphe de l’ethno-mathématique électorale, les ethnies les plus nombreuses l’emportant dans les urnes sur les moins nombreuses. D’où une déstabilisation générale.

     Trois décennies après le « discours de La Baule », la démocratie postulée être le remède aux maux du continent n’y ayant apporté ni développement économique, ni stabilité politique et encore moins sécurité, l’Afrique se tourne donc peu-à-peu vers des pouvoirs autoritaires, tout en cherchant des modèles et des soutiens ailleurs que parmi les démocraties occidentales.

     En 2023 la migration de masse déferlant sur l’Europe a encore augmenté, conséquence d'une démographie africaine devenue folle, interdisant tout développement, exacerbant les conflits et poussant les habitants au départ.

     Or, cette explosion démographique s'explique parce que, hier, au nom de leur « amour de l’autre », les missionnaires, les religieuses soignantes, les médecins et les infirmiers coloniaux ont délivré les Africains de la lèpre, de la rougeole, de la trypanosomiase, du choléra, de la variole, de la fièvre typhoïde, de la fièvre jaune etc., cependant que les militaires les libéraient de leurs frères esclavagistes.

     Résultat, avec la colonisation, en un siècle, la population du continent a été multipliée par 10. De 100 millions d'habitants en 1900, elle était passée à environ 275 millions dans les années 1950-1960, puis à 640 millions en 1990, à un milliard en 2014 et à 1,4 milliard en 2022. Selon l’ONU, dans les années 2050 les Africains seront plus de 2 milliards (dont 90% au sud du Sahara), puis plus de 4 milliards en 2100 et ils représenteront alors 1/3 de la population mondiale. En 2050, 40% des naissances mondiales seront africaines (Unicef. Afrique/Génération).

     Dans ces conditions, l’aide au développement revient à labourer l’océan, tout progrès étant immédiatement avalé par la démographie qui créé automatiquement de nouveaux besoins… et qui provoque les migrations massives qui se déversent sur l’Europe.

  • L’arc républicain ou le désastre annoncé

    Darmanin.jpg

    Comme en vendémiaire an IV, comme en fructidor an V, comme en 1879-1880, comme en 1958, comme à chaque crise de régime, tout sera fait pour garder la République aux républicains, en dépit de la volonté populaire.

    Par Hilaire de Crémiers

    Hilaire-1.jpgLe dimanche 27 août se tenait à Tourcoing la réunion de rentrée politique de Gérald Darmanin. Dans le fief électoral qu’il a réussi par ruse et détournement d’héritage à capter à son profit, le petit Gérald qui fut un sémillant jeune homme de bonne et vraie droite catholique et nationale, et qui, aujourd’hui, se complaît, comme tant de ses confrères et collègues, à rappeler, à chaque bout de phrase, du haut de ses rapides élévations, ses origines dites modestes et immigrées – en fait tout à fait honorables –, est devenu l’un des principaux barons de la République et, croit-il, l’homme fort de l’État républicain, le ministre de l’Intérieur qui n’a besoin et ne rêve que de devenir encore plus fort, comme naguère son chef et son modèle Sarkozy, pour le plus grand bien de la République, bien sûr, dont il a vocation à devenir le sauveur face à l’hydre redoutable du nationalisme sans cesse renaissant, nationalisme français qui fut tout de même, du moins pour les idées, comme pour beaucoup d’autres de son espèce, sa première et apparemment sincère conviction intellectuelle.

    Cette ascension, sans être fulgurante dans une république aussi platement nulle que la chiraco-sarkozie et la hollando-macronie et aussi mal, sinon de plus en plus mal gouvernée, s’est accomplie, somme toute, en très peu de temps, non tant par des coups de génie à la Bonaparte, mais plus vulgairement par le développement délibéré d’un appétit violent de pouvoir qui ne se dissimule jamais, avec la hardiesse un peu folle et téméraire d’un jeune loup, sûr de lui-même, et dans cette quête insatiable de tous les instruments de domination comme autant de hochets de satisfaction à procurer à sa gloire personnelle, quitte à publiquement se renier et à renier sans scrupule ce qu’il crut et ce qu’il fut, en particulier dans l’ordre familial. L’arrivisme ne se maîtrise plus, une fois que ce démon s’est emparé de sa proie.

    Il paraît, à l’évidence, qu’il lui plaît pareillement de signaler urbi et orbi ce qu’il pense être une réussite exceptionnelle, avec cette morgue aristocratique qui est la caractéristique de tous les grands féodaux, surtout quand, issus d’origine sans illustration notable, ils sont parvenus au sommet des honneurs étatiques et de la renommée mondaine. C’est alors, dit le proverbe, qu’il convient de tout particulièrement se méfier, la roche tarpéienne étant toute proche du Capitole.

    C’est ça, la politique

    Darmanin n’en a cure. Sa ville en cette fin août s’illuminait d’une célébrité qui la hissait au rang de capitale politique, ce dont il n’était pas peu fier, puisque l’éclat en rejaillissant encore sur sa personne qui se cherchait, presque gênée, une humilité de façade dans la modestie d’attitude et de propos, ce qui ne pouvait que susciter le sourire !

    Réunion donc autour des sacro-saintes « saucisses-frites » pour attirer le chaland et dégager cette sympathique atmosphère populaire aux odeurs vraies dont il veut faire sa marque de fabrique et son signe de ralliement. Ah ! Le brave homme, vraiment bien ancré dans son terreau fécondant ! Et digne des plus hautes destinées !

    Réunion, aussi et surtout, – mais l’avait-il vraiment voulu à ce point ? – du gratin ministériel, ceux qui pensent à l’avenir sans se croire nécessairement des chefs –, et avec la Première ministre en morceau de choix, ce qui n’était pas prévu initialement. Sans doute un changement de tactique de la part du chef – ou de la cheffesse – du gouvernement, et qui fut vite perceptible dans les comportements de tout un chacun.

    Élisabeth Borne a rempli son rôle à la perfection. Elle a d’abord fait le lien avec la haute pensée du président de la République, ce qui est la norme suprême à ne jamais oublier, comme elle l’a rappelé, et en dehors de laquelle il est interdit de penser ou même d’envisager de penser, un peu comme en Chine, en Russie, en Corée du Nord et comme dans tant d’autres pays qui se flattent, comme la France, d’être des républiques et des démocraties populaires. Elle n’a pas manqué de rappeler également le lien juridique et politique essentiel avec l’action gouvernementale dont il était superflu de signaler qu’elle en était la principale instigatrice et dont Darmanin faisait, certes, partie, mais pas seulement lui, d’autres aussi, ce qui fut suggéré avec autant de finesse que de gentillesse. Ce qui autorisait la dame qui met un talent singulier – bien meilleur que celui de Macron et de Darmanin – à faire résonner presque euphoniquement le fameux « celles-z-et ceux » si significatif de l’obligatoire, laïque et gratuite sottise qui illustre l’inculture et la vilenie démocratiques modernes, à prendre un petit ton supérieur, voire presque maternel, en tous cas protecteur, encourageant, volontiers professoral – car elle fait toujours la leçon comme Macron –, usant du compliment avec adresse, de la louange même, mais toujours mâtinée de bienveillance condescendante qui ressemblait par moments à une sorte d’indulgence, pour un jeune homme – il fallait l’entendre susurrer « cher Gérald » –, certes méritant, mais dont l’ambition devait être modérée, tempérée, apaisée, par une sagesse d’expérience et de culture qui lui faisait si évidemment défaut – à lui ! –, sagesse dont elle – elle bien sûr ! –, fille de la République par excellence, comme elle s’est proclamée, incarne par sa vie même tous les principes et, en conséquence, le destin supérieur, passé, présent et, donc, sans qu’il soit besoin de le préciser, à venir. Cette sagesse, elle la respire comme son air politique, avec l’aisance de la connaturalité, peut-être même de la consubstantialité, sagesse qui ne peut s’acquérir comme elle l’a souligné, que par une compétence technique d’une perfection incontestable et reconnue comme telle, doublée d’une longue pratique des cabinets ministériels et des plus hauts postes de direction, tels ceux qu’elle a fréquentés. Il n’y avait plus qu’à écouter et apprendre ! La réunion de Darmanin échappait à Darmanin et sa déconvenue presque visible était risible.

    Ainsi nous fut donné comme sur un théâtre le spectacle où se représente et se résume tout un régime. La République, au fond, ce n’est que ça : des mots qui sonnent, des ambitions qui se croisent et se heurtent, sans autre souci de la France que verbal, pour séduire un peuple trompé.

    La République en tous ses états

    Ainsi en va-t-il de toute cette vie politique qui s’agite à nouveau en cette rentrée à l’occasion des manifestations qui s’appellent pompeusement des universités d’été et qui ne sont que des moyens pour des chefs de parti de se rappeler au bon souvenir de leurs militants et de leurs électeurs, en se faisant valoir par des vaticinations aussi péremptoires que ridicules. LFI, EELV, présence de Médine acceptée ou non, vraiment quel haut degré de conscience politique ! Et Ségolène Royal qui revient dans la boucle ! Mais de même LR avec un Eric Ciotti qui essaie d’exister et où le seul à tenir des propos raisonnables est François-Xavier Bellamy le philosophe catholique et français qui sait de quoi il parle ; franchement, que va-t-il faire dans cette galère ?

    Les jeux sont faits, archifaits : LFI avec la Nupes est, malgré l’apparence, l’allié le plus utile de la macronie ; Mélenchon avec ses cris horribles et ses bras agités, sert de rabatteur de tous les perdreaux apeurés vers la ligne de tir de la macronie. Ça marche toujours et encore. Et le Rassemblement national a beau se républicaniser avec l’honnête conscience du bon élève qui se nettoie correctement les mains et s’efforce de tenir le langage convenu, il reste et demeure le repoussoir indispensable à la prochaine échéance présidentielle, la seule élection qui compte, sénatoriales et européennes, ne changeant jamais fondamentalement la donne politique. Darmanin n’a pas manqué de commencer par déclarer que Marine Le Pen pouvait gagner en 2027, pour montrer l’indispensable nécessité de sa candidature. D’autres envisagent la même posture avantageuse. C’est ce à quoi se ramène toute la vie politique française !

    Et, dans ces circonstances, Marine y arriverait-elle – ou un autre, peu importe – croit-on, vu l’état du pays et son délitement, que Bercy obéirait, que Grenelle suivrait, que Beauvau marcherait, que tout se mettrait au pas ? La France est arrivée à ce point de maladie républicaine qu’aucun traitement ne la tirera d’affaire, surtout pas dans le cadre des principes dits républicains.

    Reste l’événement imprévisible, ou peut-être trop prévisible, la catastrophe inéluctable, sociale, migratoire, économique, financière, politique, militaire, morale, culturelle et même aujourd’hui religieuse. Il est à craindre que ça vienne ! Et malheureusement assez vite. Trop vite ! Les Jeux olympiques n’y changeront rien, quel que soit leur déroulement.

    Autosatisfaction et déni des réalités

    « L’arc républicain » de Macron, dirigé uniquement contre tout esprit national français authentique, tout en invoquant la nation et même le « faire-nation » – c’est du Macron pur jus ! – se voudrait la solution, annoncée dès le début de l’été dans l’attente de la rentrée, comme « l’initiative politique d’ampleur », afin de recomposer le corps politique autour du président de la République et donner un sens à son deuxième mandat.

    Ainsi a-t-il convoqué les chefs de parti à la Légion d’Honneur à Saint-Denis – tout un symbole – pour s’entretenir avec eux des problèmes français, du malaise social, des émeutes, de la politique intérieure et de la politique internationale, en présentant des propositions et même des suggestions référendaires à plusieurs niveaux, manière de récupérer la chose à son profit ! Il est facile de prévoir que rien ne sortira de pareilles rencontres. Il suffit de lire le long entretien que Macron a accordé au Point fin août pour comprendre que l’homme ne sortira jamais de sa ligne d’autosatisfaction et de complet déni des réalités où il se complaît et que, de plus, il camoufle derrière de fausses concessions.

    Il est totalement incorrigible. Il faudra aller jusqu’au bout de cette politique insensée qui se refuse à toute remise en cause. Darmanin le pressent sans l’avouer, en s’avançant hardiment et le premier pour se situer au plus vite dans l’axe du compas sur le point fixe qui va définir l’arc républicain et autour duquel devront se placer les partenaires du jeu politique. Les autres concurrents ont parfaitement compris la manœuvre et tâcheront de briguer la même place. Ainsi finissent les institutions de la Ve République comme elles ont commencé. Car la République en France se définit essentiellement comme l’absence de roi et, donc, comme une lutte perpétuelle pour récupérer le pouvoir. Quitte à créer une République consulaire voire impériale, ou même une monarchie républicaine, en substituant au roi ce qui n’est jamais qu’un faux roi.

    État de la France

    Et pendant ces beaux discours les gosses tombent percés de balles dans les villes de France. Les règlements de comptes font l’actualité quotidienne. Darmanin, accompagné de ses CRS, court les scènes de meurtres, débitant les mêmes rodomontades. Le trafic de drogue domine la France. Le palais de justice d’Aurillac est pris d’assaut par la jeunesse formée dans l’école de la République. La vie sociale devient impossible sur la moitié du territoire. Les lois de la République achèvent de détruire la famille. Comment peut-on parler encore d’ordre et d’autorité ? L’inflation galope malgré les objurgations de Le Maire, toujours content de lui. La réindustrialisation est, en fait, un rêve, un jeu de dupes et un effet d’annonce, trompeur comme tous les chiffres affichés. L’industrie française – la nucléaire singulièrement – a été saccagée par de véritables actes de trahison qui ne seront jamais sanctionnés. Notre agriculture est livrée à une concurrence déloyale. Les intérêts français ne sont plus protégés. L’Europe, l’Allemagne singulièrement, œuvre maintenant ouvertement contre les intérêts français. La France devra payer son endettement, y compris européen, et de plus en plus cher. Les impôts augmenteront nécessairement, ne serait-ce que le produit de la TVA. Tout est de la frime et de la communication. Le pays a perdu son moral et cette morosité se ressent dans toutes ses activités. Sauf exception notable, les Français n’y croient plus. À quoi sert d’enseigner ? D’assurer la sécurité et l’ordre public ? Même de juger ? De soigner ? D’administrer ? De travailler ? Tout est systématiquement démoli. Gabriel Attal s’imagine qu’il va réussir à redresser le lourd navire de l’Éducation nationale qui est en train de sombrer, par ses ordres itératifs. Il n’arrivera à rien.

    Une partie des communautés qui fragmentent la France n’ont aucune intention de « faire nation ». Elles le feront savoir de nouveau et sans doute dans peu de temps. La partie est perdue d’avance, selon la logique républicaine qui ne sait jamais que céder et qui préférera, selon sa vieille habitude, livrer les populations fidèles à la France – et il y en a ! – aux voyous et aux assassins avec lesquels elle cherchera des accords – même électoraux – jusqu’au déshonneur, pour garder le pouvoir ! Macron, dans la suite de ses prédécesseurs, n’est-il pas allé en Algérie accuser lui-même la France de crime contre l’humanité devant ceux qui s’instituent pour exister comme ses accusateurs et ses juges, tout ça pour gagner des voix et quelques autres avantages évidemment non dits.

    L’Afrique est perdue

    S’ajoute à cette décrépitude intérieure une politique extérieure aussi défectueuse que grotesque. Macron faisant son cours de géostratégie aux ambassadeurs est aux limites de la prétention et du ridicule. Son Europe n’existe pas ; son rêve aboutit au néant. C’est pourtant sur ce faux tremplin qu’il prétend rebondir, en pensant vraisemblablement à la fin de son mandat. Les USA mènent leur politique. L’Allemagne a fait le choix de l’Allemagne, comme la Pologne celui de la Pologne. Rien de bon ne sortira pour la France de la guerre russo-ukrainienne, sauf des risques de plus en plus fréquents de cobelligérance.

    L’Afrique est définitivement perdue, aboutissement de cinquante ans d’incohérences et d’abus d’influences. Qui ose se souvenir que la Françafrique gaulliste ne fut qu’un trompe-l’œil pour permettre aux partis politiques d’exploiter les financements africains, avec retours de mallettes de billets ? Même trafic au Liban, en Syrie, en Irak et en Libye. Mais oui ! L’héritage des Lyautey, des Foucauld, des Gallieni, a été perdu dans toutes ses composantes, même spirituelles. La République ne développe plus que des principes absurdes censés justifier moralement des conduites parfaitement immorales. Même les interventions nombreuses et, d’ailleurs, remarquables qui sont à l’honneur de nos armées n’aboutissent à rien, faute de vraie politique. Ce qui fut sa zone d’influence échappe maintenant à la France, et totalement. Elle risque aujourd’hui un clash violent au Niger. Les pays de la francophonie passent les uns après les autres soit au Commonwealth, soit aux influences anglo-saxonne, russe ou chinoise. Cependant que les horreurs se poursuivent en Afrique sahélienne et en Afrique centrale, avec tueries, razzias, rapts, dans le silence de toutes les bonnes consciences de chez nous, car ces horreurs ne font pas partie des luttes intersectionnelles ! Jamais l’hypocrisie n’est allée aussi loin.

    Que faire ?

    Darmanin veut prendre la succession de Macron, on lui souhaite bien du plaisir. Aux autres pareillement. La politique républicaine s’achève dans le crime quotidien, l’abrutissement généralisé, le désastre d’un anéantissement sans nom et sans fin. Y aura-t-il des Français pour enfin comprendre ? Il est réconfortant de connaître des jeunes gens qui en prennent conscience.  

  • Gérontocratie et climat de guerre civile dans l’Empire américain

    Par Antoine de Lacoste

    Lacoste.jpg

    Trump est pris dans un filet judiciaire, Biden est encombré de son fils scélérat, mais les deux séniors s’accrochent au pouvoir, image même d’États-Unis incapables de renoncer à leur leadership, quoi qu’il en coûte au monde.

    Gérontocratie et climat de guerre civile dans l’Empire américain

    L’inculpation de Trump a augmenté sa popularité

    Les prochaines élections américaines (novembre 2024) promettent d’aimables réjouissances. Les deux camps sont plus divisés que jamais, la haine y est implacable et le gouffre entre deux modèles de société, vertigineux. De plus chaque protagoniste a ses soucis judiciaires qui atteignent un niveau inédit.

    Donald Trump est, comme prévu, l’objet de multiples attaques de la part des juges. Quatre inculpations lui ont été notifiées : « l’assaut » du Capitole, la tentative de « fraude électorale » en Géorgie, le recel de documents classifiés et des paiements secrets à une actrice porno en échange de son silence. Cela peut sembler impressionnant mais comme plus personne ne croit à l’impartialité de la justice dans nos démocraties occidentales, cela peut aussi s’interpréter comme une tentative de coup d’État judiciaire.

    La France a connu cette intrusion des juges avec l’élimination de François Fillon sur laquelle nos médias mettent bien peu d’énergie à se demander si ce qui s’est passé fut normal. Le Parquet National Financier a mis un zèle inaccoutumé à déclencher, en pleine campagne électorale, une offensive majeure pour, au fond, des peccadilles. Certes, si Fillon avait moins aimé les beaux costumes et les pourboires nés de fiches de lecture fantômes, rien ne serait arrivé. Mais tout de même, tout ça pour ça, cela devrait interpeller, comme on dit dans le monde moderne…

    Les délices du vote par correspondance

    Pour Trump, les affaires peuvent sembler plus sérieuses. Mais si l’on y regarde de près, tout tourne (mis à part le vaudeville) autour du résultat de l’élection et surtout de l’organisation de son dépouillement. Il faudrait tout de même s’interroger sur l’invraisemblable archaïsme du mode de scrutin américain. La « plus grande démocratie du monde » (il est permis de sourire) repose sur un système totalement anarchique où chaque État (voire les comtés) a une organisation différente : le vote par correspondance peut se faire avant comme après le scrutin, avec des durées extraordinairement variables, parfois sans contrôle d’identité et avec l’intervention de militants autorisés à relancer les électeurs chez eux pour leur faire perforer un bulletin (quelle modernité !) remis ensuite au bureau de vote, mais tout de même transporté au préalable par la police municipale dans de grands sacs postaux. On croit rêver mais c’est ainsi que cela se passe dans l’Empire. Il veut imposer son modèle au monde entier, a bombardé beaucoup de récalcitrants qui avaient du mal à assimiler le concept d’« hégémonie bienveillante », mais n’est pas capable de dépouiller correctement un scrutin. Le feuilleton du duel de 2000 entre George Bush jr et Al Gore est encore dans toutes les mémoires : le dépouillement en Floride, clé de l’élection, s’est étiré en longueur. On vit des images surréalistes de scrutateurs examinant, indécis, des bulletins de vote longs comme le bras en se demandant s’ils étaient perforés ou non et au bon endroit. Aucun progrès n’a été fait depuis.

    Avant la prise en compte des bulletins par correspondance, Trump avait la partie gagnée. Ensuite, un interminable comptage se mit en branle et, au terme d’heures puis de jours d’attente, les résultats s’inversèrent. Dans certains bureaux, ce sont 90 % des votes par correspondance qui se portèrent sur Biden. Normal nous expliquaient nos spécialistes des États-Unis sur les plateaux : les Démocrates votent bien plus par correspondance que les Républicains. On ne sait pas pourquoi mais c’est ainsi, mon bon monsieur.

    La Géorgie fut le cas le plus emblématique de dépouillement opaque avec inversion des résultats à la clé. Trump, persuadé de la triche, exigea un retour au premier résultat, ne l’obtint évidemment pas et lança l’offensive médiatique qui aboutit à “l’assaut” du Capitole. Assaut bien relatif, aux zones d’ombre multiples : des enquêtes indépendantes du très démocrate FBI seront les bienvenues. Que donneront les résultats judiciaires de ces quatre inculpations ? Nul ne le sait mais ce qui est sûr c’est que leur calendrier se bousculera avec celui des élections.

    L’ordinateur d’Hunter Biden

    Joe Biden a ses propres ennuis mais par le biais de son fils, le sympathique Hunter : drogué, alcoolique, corrompu, érotomane, c’est ce qu’on appelle un cumulard. Hunter a renoncé à tout cela, jure-t-il et Joe est « fier » de son fils. Le plus intéressant dans les frasques d’Hunter concerne ses liens avec l’Ukraine. Coïncidence intéressante avec la grande guerre de Joe contre la Russie, par Ukrainiens interposés. De 2014 à 2019, Hunter siégea au conseil d’administration de Burisma holding, une des plus grandes sociétés privées ukrainiennes de production de gaz naturel. Il n’avait aucune expérience dans ce domaine, faut-il le souligner. Sa nomination est intervenue après une visite de son papa, alors vice-président, en Ukraine.

    En 2016, Joe va intervenir auprès du président Petro Porochenko pour faire limoger le procureur général Viktor Shokin. Le prétexte est tout trouvé : ce procureur ne met aucune énergie à lutter contre la corruption. C’est Biden lui-même qui a révélé cet épisode. Oui mais Shokin déclarera haut et fort qu’il a été renvoyé parce qu’il s’apprêtait à enquêter sur Hunter. Nous ne saurons sans doute jamais ce qui s’est vraiment passé.

    Mais le plus cocasse était à venir. Son ordinateur ayant connu un léger dégât des eaux, Hunter le déposa chez un réparateur et ne vint jamais le récupérer. Le FBI finit par mettre la main dessus et analysa le disque dur. Son contenu fuita dans le New York Post quelques jours avant l’élection présidentielle de 2020. Il révéla entre autres des échanges de courriels entre Hunter et des Ukrainiens, son salaire (50 000 dollars par mois), les liens de la famille Biden avec un fonds d’investissement chinois ou Hunter brandissant une arme à feu en fumant du crack.

    Les contre-feux ne tardèrent pas. Twitter (c’était avant Musk) et Facebook bloquèrent tout relais de ce disque dur pour ne pas diffuser « de fausses nouvelles ». Plusieurs responsables du renseignement américain publièrent une lettre ouverte où ils affirmaient que les courriels étaient des faux et que derrière tout cela il y a « un complot russe ». Poutine est tout de même très fort ! Une omerta quasi-complète recouvrit le dossier jusqu’à l’élection. Les médias conservateurs qui en parlèrent étaient bien sûr complotistes et complices des Russes.

    Le danger étant passé et le bon Joe élu, la justice commença à s’intéresser à Hunter et l’inculpa de fraude fiscale et de détention d’arme illégale (les drogués n’ont pas le droit de posséder une arme, même aux États-Unis). Hunter s’engagea dans une procédure de plaider-coupable qui devait lui épargner un procès. Le procureur en charge du dossier donna son accord mais la juge du Delaware (l’État de la famille Biden) a refusé de le valider. Car d’autres affaires, révélées par les journaux, pointent leur nez, notamment des liens d’Hunter avec une société énergétique au Kazakhstan ou avec un conglomérat chinois. Les Chinois ont de bons côtés finalement. Un procès devient donc probable et risque de perturber l’agenda électoral de Biden.

    Le duel des vieillards géants

    Il devrait logiquement opposer Joe Biden, qui aura 82 ans, à Donald Trump, qui en aura 78. Ce parfum de gérontocratie ne semble pas troubler le Parti républicain. Trump caracole dans les sondages et les primaires s’annoncent, pour l’instant, très favorables. Celui qui était présenté comme son rival le plus dangereux, le gouverneur de Floride Ron DeSantis, est à la peine. Sa célébrité issue de son bras de fer avec les wokistes de Disney ne lui a pas permis de transformer l’essai : emprunté, raide, parfois maladroit, les commentaires des observateurs américains sont sévères et l’écart se creuse avec le redoutable Donald, bête de scène et des médias.

    À l’heure actuelle, personne ne semble en mesure de lui contester la victoire aux primaires, même si certains au Parti républicain s’inquiètent du rejet dont il fait l’objet dans l’électorat gauchiste, cela va sans dire, mais aussi modéré.

    Chez les Démocrates, l’ambiance est plus fébrile encore. Les problèmes cognitifs (soyons polis) que connaît parfois le président ont fait le tour des réseaux sociaux. Mais Biden a d’ores et déjà annoncé sa candidature, coupant tout débat sur son âge et son état de santé. La vice-présidente, Kamela Harris, a démontré son incompétence et n’est plus considérée comme un recours crédible. Un nouveau venu, Robert Kennedy jr, est en lice. Il a défrayé la chronique avec des positions assez distrayantes sur le covid et la guerre en Ukraine mais n’a, semble-t-il, que peu de chances.

    Cette élection qui verra peut-être s’affronter deux des plus vieux candidats de l’histoire, résonne comme un symbole. Le symbole du déclin d’un pays qui veut toujours dominer le monde mais n’a pas encore compris que celui-ci avait changé et ne voulait plus se soumettre à la prétendue « destinée manifeste ».

    Article paru dans Politique magazine

    Cliquez sur l'image

    PM227-une.jpeg

  • La guerre secrète menée par l’Allemagne contre le nucléaire Français

    Nucléaire.jpg

    Les fondations allemandes financées par l’État jouent un rôle majeur dans le sabotage méthodique du nucléaire français, ce qui met en danger la compétitivité économique de la France et l’indépendance énergétique de l’Europe. Le constat que vous lirez ci-dessous est sans ambiguïté. 

    La conclusion est toujours la même : empêtré dans une idéologie européiste et mondialiste, Macron ne souhaite pas intervenir. C'est en cela que son attitude n'est rien d'autre que criminelle depuis six ans.

    Bien plus, la remise en cause tous les cinq ans - sept ans c'est pareil - du sommet de l'État ne permet aucune politique nécessitant indépendance et durée. Une fois de plus le même constat s'impose : nos adversaires savent profiter de ces faiblesses mortifères. La République est le règne de l'inconstance et de l'étranger.

     

    L’Allemagne veut affaiblir la France

    L’Allemagne veut affaiblir l’industrie française qui lui fait concurrence, notamment grâce à la production d’électricité nucléaire bon marché d’EDF.

    Le gaz fossile représente toujours 27 % de la consommation d’énergie allemande en 2021, dont la moitié (55 %) de l’approvisionnement provenait de Russie. Et l’Allemagne continue à investir massivement dans les centrales électriques au gaz, et à développer ses capacités d’importation de méthane.

    Elle exploite la transition énergétique comme un outil politique, industriel et commercial. Elle souhaite toujours devenir le hub gazier indispensable de l’Europe, et renforcer ainsi son rôle de poumon économique de l’Union européenne.

    Lors de l’extraordinaire et édifiante audition de l’ancien PDG d’EDF Henri Proglio le 13 décembre 2022 à la Commission parlementaire sur la souveraineté énergétique (à écouter ou à réécouter pendant deux heures…), celui-ci a même déclaré (3 h 24 après le début d’autres auditions) :

    « Comment voulez-vous que l’Allemagne qui a bâti sa richesse, son efficacité, sa crédibilité sur son industrie, accepte que la France dispose d’un outil aussi compétitif qu’EDF à sa porte ? Depuis 30 ans, l’obsession allemande est la désintégration d’EDF ».

    C’est ce que dévoile magistralement l’École de Guerre Économique (EGE) qui a publié en juin 2023 un rapport, « Ingérence des fondations politiques allemandes et sabotage de la filière nucléaire française », pour alerter les autorités françaises sur la manière dont l’Allemagne sabote consciencieusement le nucléaire en France avec l’aide d’agents français et allemands.

    L’Allemagne procède via des fondations financées à coups de centaines de millions d’euros par l’État allemand, dont 73 millions uniquement pour la fondation Heinrich-Böll affiliée aux partis écologistes et chargée, parmi d’autres activités, de diffuser en France des rapports antinucléaires.

    Ce nouveau rapport, qui fait suite à celui de mai 2021, « J’Attaque ! Comment l’Allemagne tente d’affaiblir durablement la France sur la question de l’énergie », souligne les conséquences néfastes de ces fondations politiques gérées par des écologistes et des militants d’extrême gauche sur la filière française du nucléaire.

    Ce rapport de l’EGE s’appuie également sur le rapport d’investigation « Comment l’Allemagne finance l’affaiblissement du secteur nucléaire français ? » publié en avril 2023 par le Comité d’Intelligence Stratégique pour la Souveraineté (CI2S).

     Des agents de sabotage

    L’Union européenne est naturellement le théâtre de nombreux antagonismes.

    Toutefois, celui sur l’énergie entre la France et l’Allemagne atteint des sommets, car l’Allemagne interfère de manière insidieuse dans les affaires politiques et économiques de ses partenaires étrangers, notamment de la France, par l’intermédiaire « d’agents d’influences » inféodés à Berlin au sein de « fondations ».

    Ces dernières, directement affiliées aux partis politiques allemands, propagent une idéologie antinucléaire et façonnent des élites socio-politiques pour la défense… des intérêts économiques allemands !

    Par le biais de diffusions de contenus orientés et par l’organisation de rencontres, le but de ces fondations soutenues par l’Allemagne est d’infléchir la politique énergétique européenne en faveur des intérêts… de l’Allemagne, empêtrée dans le désastre de son « energiewende » et de ses énergies renouvelables.

    L’intérêt de l’Allemagne n’est pas de lutter contre le réchauffement climatique, mais de défendre le gaz fossile comme « énergie de transition » (une transition sans doute durable…), et de refuser le qualificatif « vert » à l’hydrogène produit à partir d’électricité nucléaire.

    Dans cette optique, l’Allemagne manœuvre pour affaiblir l’industrie nucléaire en France (et donc l’économie française en général) par le verrouillage des institutions européennes afin d’assurer son hégémonie au niveau européen.

    Ce manège détestable dure depuis plus de 20 ans, mais il n’y a pas pire sourd et aveugle que celui qui ne veut pas voir ni entendre !

    L’Allemagne verrouille également les postes clés de l’Union européenne : la présidence de la Commission européenne (depuis 2004), la présidence du Parlement européen (depuis 2007). Elle mène également une intense activité de lobbying au Conseil européen.

     Heinrich Böll et Rosa Luxemburg

    Au moyen d’opérations d’influence antinucléaire sur le territoire français, les fondations politiques Heinrich Böll et Rosa Luxemburg œuvrent directement au ralentissement du développement de l’atome en France.

    La plupart de leurs financements proviennent directement du gouvernement allemand qui soutient leurs objectifs. Il est même aussi le commanditaire de certaines actions. Ces fondations, composées pour partie d’activistes antinucléaires, constituent de redoutables instruments et de précieux leviers au service de la politique étrangère allemande : accès à certaines catégories de populations pour alimenter leurs craintes, défense de leurs intérêts économiques, et renseignement.

    Ces fondations travestissent leurs manœuvres nuisibles à la France en les habillant de valeurs d’humanisme pour les légitimer. En réalité, elles s’inscrivent dans une politique d’accroissement de puissance de l’Allemagne.

    Conformément à l’aversion dogmatique allemande pour le nucléaire, les ayatollahs du vent et du soleil d’outre-Rhin mènent une lutte messianique contre l’électricité nucléaire bon marché pour miner la compétitivité économique française.

    Malgré les récentes rebuffades au sein de l’Union européenne de la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher, la France semble encore bien passive et naïve devant ces attaques.

     MIVILUDEFOPOL

    Face à ce constat, l’EGE propose la mise en place d’une Mission Interministérielle de VIgilance et de Lutte contre les Dérives des Fondations PoLitiques (MIVILUDEFOPOL), sur le modèle de la MIVILUDES relative au sectarisme.

    En plus de coordonner l’action préventive et répressive des pouvoirs publics à l’encontre des dérives des fondations politiques, elle aurait également vocation à sensibiliser le grand public et à limiter l’impact des actions conduites par ces entités.

     Depuis au moins 20 ans que durent ces actions délétères pour la France et l’Europe, il serait temps que les responsables français ouvrent enfin les yeux sur le fantasme romantique du « couple » franco-allemand dont l’expression n’existe pas en Allemagne. Les Allemands disent le « tandem » : la France pédale derrière tandis que l’Allemagne tient le guidon et tente de lui enlever la selle

  • Quand l’idéologie transforme le marché de l’électricité en usine à gaz

    Electricité.jpg

    L’idéologie libérale exigeant la disparition des monopoles d’État, EDF a été dépecée. Mais le citoyen-consommateur y a-t-il gagné quoi que ce soit ? Non. Les énergies alternatives sont financées par des taxes et le prix de l’électricité, devenu purement spéculatif, varie au gré des financiers. Le Marché triomphe,
    le citoyen-client finance.

     

    Depuis l’effondrement du monde soviétique et, en France, la conversion des gouvernements socialistes au développement des marchés financiers, on nous répète que le monde occidental est entièrement dominé par le libéralisme le plus absolu. La Commission européenne, qui croit en la concurrence universelle, expliquant qu’elle est la condition sine qua non du progrès pour tous, participe fortement à l’entretien de cette illusion. En fait cette idéologie de la libre concurrence se heurte chaque jour aux réalités et a pour effet de tuer le fonctionnement d’un marché véritable. Les prix censés permettre une rencontre équilibrée entre l’offre et la demande, et traduire ainsi la valeur de l’utilité d’un produit, ne répondent plus à cet objectif. Le « pouvoir de marché » des entreprises intermédiaires – dont le souci principal est de se créer une rente de situation et de la conserver – et le comportement grégaire des gouvernements des pays riches – qui leur sont soumis par le truchement du financement des campagnes électorales – ont tout perverti. L’exemple du marché de l’électricité suffit à montrer les aberrations qui en résultent et portent atteinte à la liberté des consommateurs.

    Le démantèlement de tout monopole étatique

    L’idéologie « ultra-libérale » véhiculée par les économistes de l’école de Chicago impose, en particulier, la disparition de tous les monopoles d’État et la séparation patrimoniale des biens qui y concourent par une activité intégrée, comme la production, la circulation et la distribution de l’électricité. De plus, lorsque l’une de ces activités concerne la gestion d’un réseau, elle doit être isolée et organisée de façon à offrir un traitement « équitable » à tous ses fournisseurs et usagers qui doivent pouvoir y avoir accès de façon indiscriminée. C’est en vertu de cette analyse idéologique que la Commission européenne a exigé qu’en France le monopole d’EDF soit démantelé entre un producteur (EDF), un réseau de transport (RTE) et un distributeur (ENEDIS). C’est une directive du 19 décembre 1996 qui a imposé l’éclatement du monopole en ses diverses branches et l’ouverture à la concurrence de chacune d’entre elles.

    La mise en place de ce nouveau marché européen de l’électricité s’est alors heurtée à une difficulté majeure : le fait que la concurrence ne peut pas s’appliquer de façon uniforme aux producteurs, dont les investissements et le savoir-faire sont très importants, et aux distributeurs, qui ne sont que de simples intermédiaires dont la valeur ajoutée n’est pas de même nature. Ces intermédiaires se contentent d’acheter l’électricité à un fournisseur, de la faire circuler sur un réseau et de la vendre à leurs clients. Ils n’ont pas besoin d’investissement spécifiques ; il leur suffit d’avoir librement accès à tous les fournisseurs possibles sans qu’aucun d’eux ne puisse jouir d’un avantage concurrentiel particulier, de pouvoir faire librement circuler l’électricité achetée sur un réseau intégré au niveau européen et de la revendre à leurs clients en leur proposant une offre personnalisée en fonction de leur politique commerciale propre. Ce système considère pour rien le fait que sur le réseau tous les électrons circulent de façon indifférenciée et qu’ils y sont donc mélangés, quels qu’en soient leur provenance et leur mode de fabrication. En fait, un distributeur achète une certaine quantité d’électricité à un fournisseur et revend la même quantité à ses clients. Plus encore que la monnaie, l’électricité est fongible.

    Un monopole de production d’origine nucléaire

    dans un marché libre

    En France, EDF jouissait aussi du monopole de la fabrication. Et si l’entreprise nationale a été autorisée, à contrecœur, à conserver son monopole de mise en œuvre des centrales nucléaires, elle a dû céder ses barrages hydrauliques à des concurrents potentiels. Seulement le coût de fabrication de l’électricité n’est pas le même selon le mode de production utilisé. L’électricité d’origine nucléaire est bien moins onéreuse que celle d’origine thermique (centrales à gaz1 ou à charbon). Dès lors EDF se trouvait dès le départ avantagée et jouissait d’une position dominante dont la Commission européenne avait peur qu’elle abuse. Elle a donc pris deux séries de mesures. La première a consisté à imposer à EDF de vendre à ses concurrents dans l’activité de distribution, un tiers de sa production d’électricité d’origine nucléaire à un prix réglementé de 42 euros le mégawatt/heure et de ne plus disposer pour ses propres clients que des deux tiers de sa production. La seconde a été de susciter le développement de la production privée d’électricité produite par des énergies dites renouvelables (éoliennes, panneaux photovoltaïques). Mais ces électricités sont beaucoup plus chères à produire ; d’abord parce qu’elles nécessitent des investissements lourds (et qu’aucun des matériels nécessaires n’est fabriqué en France), ensuite parce que leur production n’est pas stable dans le temps et doit donc être complétée en tant que de besoin par des centrales thermiques, ce qui permet de penser que, pendant de nombreuses années encore le charbon restera la principale source d’électricité dans le monde. Or comme le coût de revient de cette électricité propre ne pouvait pas être compétitif, la Commission européenne a inventé une nouvelle façon de la subventionner, sans que ces subventions ne puissent donner lieu à une répartition discriminatoire entre les fournisseurs. Le prix d’acquisition de cette électricité est garanti à hauteur de 220 euros le mégawatt/heure ; la différence entre ce prix garanti et celui pratiqué sur le « marché européen de l’électricité » est financé par une nouvelle taxe payée par le consommateur et qui frappe aussi bien celle d’origine nucléaire que celle d’origine thermique, solaire, éolienne, hydraulique…

    La Bourse européenne de l’électricité

    Pour assurer la sécurité de l’approvisionnement on a donc organisé une « Bourse européenne libre » de l’électricité confiée à la gestion d’une société privée, Powernext. Sur cette Bourse, les producteurs excédentaires à un moment donné peuvent vendre leur électricité aux fournisseurs qui en ont besoin pour leurs clients. Pour que la concurrence puisse jouer librement, la directive européenne du 5 juin 2019 a poussé à la « tarification dynamique » de l’électricité au client final. En vertu de ce texte, finis les tarifs réglementés garantis ; le prix facturé au client doit refléter, heure par heure, le cours de l’électricité pratiqué sur la Bourse européenne de l’électricité, ce qui a été rendu possible en France grâce au développement du compteur Linky2. Désormais le prix de l’électricité facturé aux clients ne se réfère plus au coût moyen de production et de distribution mais ne reflète plus que l’intensité de la spéculation sur les marchés internationaux. Si l’on en croit l’association de consommateurs CLCV, citée par Capital le 14 juin 2023, certains fournisseurs alternatifs déclareraient des besoins supérieurs à ceux nécessités par les besoins réels de leurs clients afin d’acheter à EDF plus d’électricité au tarif réglementé par l’ARENH afin de la revendre au prix fort sur Powernext.

    Comme nous l’avons vu, les électrons sont fongibles. Dès lors nul fournisseur ne peut dire que l’électricité qu’il vend a telle ou telle origine. Et pourtant, il est intéressant dans le monde actuel de dire que cette énergie est « propre » ; c’est un bon argument de vente. On a donc créé un nouveau marché : un producteur d’électricité « verte » peut vendre à n’importe quel intermédiaire qui est prêt à en payer le prix, un « certificat » spécial qui permet à ce distributeur de lier virtuellement l’électricité qu’il distribue à une source particulière d’énergie et de prétendre ainsi qu’il atteint la « neutralité carbone »3.

    Le client est roi !

    Compte tenu des aléas politiques rencontrés depuis deux ans, le gouvernement français a imaginé de mettre en place le « bouclier tarifaire » qui consiste à déporter sur le contribuable une partie du coût de l’électricité consommée. Comme les finances publiques sont déficitaires, ce surcoût électrique dû à la spéculation est renvoyé, augmenté des intérêts des emprunts contractés pour financer le mécanisme, sur les générations futures. C’est probablement ce que l’on appelle la « vérité des prix ».

    Si le client est roi, comme le veut la doxa actuelle, il est le Roi des C… ! Grâce à cette usine à gaz, nul ne peut plus aujourd’hui calculer à combien devrait revenir le coût de l’électricité qu’il consomme, ni combien il devra payer demain. Quant au contrôle de la régularité de ces divers mécanismes, c’est une véritable gageure. Mais l’idéologie est sauve : la concurrence existe et le marché européen de l’électricité est bien unique et totalement intégré.    

    1. 1. Les centrales à gaz émettent 60 % moins de CO2 que les centrales à charbon.
    2. 2. On comprend pourquoi le gouvernement a décidé d’instaurer une taxe spéciale, dite de relevé de consommation, pour les clients qui ont refusé chez eux l’installation d’un compteur Linky.
    3. 3.  Le 14 septembre 2022, le Parlement européen a demandé l’inclusion dans la catégorie des « énergies renouvelables » de l’hydrogène produit à partir de l’électricité, même si celle-ci provient des centrales à charbon.
  • Bernard Lugan : les délires de l'afrocentrisme

    Athéna.jpg

    Quand de la « blonde Athéna aux yeux bleu clair », les afrocentristes prétendent faire une « négresse », le moins averti s’aperçoit qu’on se paie sa tête. Et pourtant, c’est ce que soutient dans son livre Black Athéna, l’Américain Martin Bernal, le pendant blanc de l’afrocentriste Cheick Anta Diop dont nous avons analysé les écrits dans le précédent numéro de l’Afrique Réelle.

    Il est affligeant de devoir réfuter de telles stupidités, mais, la marche pour le moment inexorable de l’afrocentrisme, du décolonialisme et du wokisme, oblige à le faire afin de ne pas laisser le terrain à ceux dont le but est la déconstruction systématique de notre civilisation. Afin de mieux nous asservir.

    Nous savons pourtant fort bien à quoi ressemblaient les anciens Grecs. Nous le savons par la statuaire, par une foule de documents figurés, de témoignages littéraires, et notamment les traités de physiognomonie. À supposer que les Proto-grecs du IIe millénaire aient été colonisés par des Égyptiens postulés être des « Nègres », il n’en est donc rien résulté du point de vue physique… Qu’ils aient le fin visage de Platon ou celui, plus grossier, de Socrate, les Grecs ne ressemblaient pas plus à des Égyptiens que leurs temples à des pyramides, ou leurs cités à leur monarchie théocratique.
    Acculés devant le vide de son néant historique par les spécialistes de toutes les disciplines concernées, Bernal a eu recours à un procédé bien peu scientifique mais constamment utilisé par les afrocentristes : il a accusé de racisme les spécialistes de la Grèce classique lesquels auraient écarté toutes les preuves africaines qui, lors de leurs découvertes seraient venues en contradiction du schéma des origines indo-européennes de la Grèce.

    En dépit de ses immenses richesses en hydrocarbures, le Nigeria, quadrilatère artificiellement découpé par la colonisation britannique, n’en finit pas de mourir.
    En plus du nord-est du pays où sévissent Boko Haram et l’État islamique (EIAO), une autre guerre sanglante se déroule au Nigeria, dans la région du Middle-Belt, avec pour épicentre la ville de Jos.

    Historiquement, la région constitue un front historique entre sultanats nordistes esclavagistes et populations sédentaires qui, aux XVIIIe et XIXe siècles, subirent les raids des premiers. Et qui voient dans les actuelles migrations des Peul-Fulani un retour aux temps anciens, d’avant la colonisation libératrice. La région forme également une ligne de faille religieuse entre un islam septentrional en pleine expansion et des christianismes sur la défensive.
    Les affrontements sanglants qui s’y déroulent sont clairement le prolongement de ceux de l’époque précoloniale. Ils sont inscrits dans la longue durée ethnique régionale.
    En réalité, ici comme partout ailleurs au Sahel, nous assistons à la reprise d’un mouvement historique en direction du monde soudanien, mouvement qui fut provisoirement bloqué par la colonisation. On, lira à ce sujet mon livre « Histoire du Sahel ».

    Pour accéder à la lettre de Bernard Lugan, cliquez sur l'image ci-dessous.

    Lugan Bernard.jpg

  • Anniversaire de l'accession au trône du roi du Maroc Mohammed VI

    Discours du trône.jpg

    Le roi Mohammed VI a adressé, le samedi 29 juillet 2023, un discours à la Nation à l’occasion du 24ème anniversaire de son accession au Trône de ses glorieux ancêtres. Nous reprenons ci-dessous l'intégralité de ce discours :

    *****

     

    «Louange à Dieu, Prière et salut sur le Prophète, Sa famille et Ses compagnons.

    Cher peuple, Par la grâce de Dieu, notre pays vit au rythme de la symbiose qui unit indéfectiblement le Trône et le peuple, engagés naturellement dans une mutuelle et constante écoute.

    Fort de ces atouts, le Maroc fut jadis en capacité de mettre en place les structures d’un État-Nation, aujourd’hui dépositaire d’une histoire multiséculaire.

    Aussi, Nous louons le Seigneur de nous avoir apporté secours et assistance: dans notre fructueuse entreprise, nous avons alors surmonté bien des difficultés, bien des défis et nous comptons désormais bon nombre d’acquis à notre actif.

    En personnes sincères à l’optimisme franc, les Marocains, se revendiquant fièrement de leurs traditions millénaires et de leur identité nationale unifiée, ont acquis à juste titre une réputation de tolérance et d’ouverture.

    Leur renom repose plus spécifiquement sur leur sérieux et leur sens du dévouement.

    À présent que la dynamique nationale de développement a atteint un stade de maturité avancée, il nous appartient de faire preuve de ce sérieux reconnu pour franchir de nouveaux seuils sur la voie du progrès et pour échafauder des réformes, des projets de plus grande envergure, dignes des Marocains.

    Cher peuple,

    Le sérieux que Nous exaltons n’est pas un terme vide de sens, de portée purement formelle. C’est, au contraire, un concept intégré qui recouvre un ensemble d’idéaux et de principes opératoires.

    Aussi longtemps que le sérieux est le moteur de nos actions, nous réussirons à renverser les difficultés et à relever les défis. De fait, chaque fois que la jeunesse marocaine a eu les moyens de donner la pleine mesure de son sérieux et de son patriotisme, elle a fasciné le monde par des performances d’un calibre inédit, à l’instar de l’exploit accompli par la Sélection nationale à la dernière Coupe du monde de football.

    DDe l’aveu de tous, en interne comme à l’international, nos enfants ont offert les plus belles images de ferveur patriotique, d’unité et de cohésion familiale et populaire et ils Nous ont rendu particulièrement fier, ainsi que l’ensemble du peuple marocain.

    C’est dans cet esprit que Nous avons pris la décision de présenter avec nos amis d’Espagne et du Portugal une candidature commune pour l’organisation des phases finales de la Coupe du monde de football 2030.

    Ainsi, Nous aspirons et, corrélativement, Nous œuvrons à ce que, sous tous rapports, cette édition inscrive sa marque dans l’Histoire. Sans précédent dans les Annales, cette candidature tend une passerelle entre deux continents et deux civilisations: l’Afrique et l’Europe, et rassemble les deux rives de la Méditerranée.

    Elle incarne de fort belle manière l’ambition qui anime les peuples de la région d’avancer ensemble vers plus de collaboration, d’entente et de communion.

    Le sérieux de la jeunesse marocaine s’exprime aussi dans les domaines nécessitant un génie créateur et un esprit novateur: deux atouts qu’elle possède en puissance dans diverses matières.

    Je salue plus particulièrement la réalisation de la première voiture de fabrication locale, grâce à des compétences nationales et à un financement marocain.

    Il en va de même pour la présentation du premier prototype de voiture à hydrogène, développé par un jeune Marocain.

    Ces projets portent témoignage du génie marocain et attestent la confiance placée dans les capacités intrinsèques de nos jeunes, ainsi encouragés à redoubler d’inventivité et de créativité.

    Ils concourent aussi à la promotion du label «Made in Morocco» et confortent le positionnement du Maroc en tant que destination majeure pour les investissements productifs.

    Le sérieux est également de mise dès lors qu’il est question de notre intégrité territoriale. Effectivement, c’est ce sérieux qui, sur fond de légitimité, a déclenché des reconnaissances en cascade de la souveraineté du Maroc sur ses Provinces du Sud, celle de l’État d’Israël étant la dernière en date.

    Outre l’ouverture de consulats à Dakhla et à Laâyoune, il a également permis de mobiliser un soutien accru en faveur de l’Initiative marocaine d’autonomie.

    Avec le même sérieux et une égale intransigeance, Nous réitérons la position inébranlable du Maroc en faveur de la Cause palestinienne juste et des droits légitimes du peuple palestinien frère, afférent à l’établissement d’un État indépendant ayant Al-Qods orientale comme capitale et apportant in fine sécurité et stabilité aux peuples de la région.

    Le sérieux doit constamment définir notre ligne de conduite, dans la vie de tous les jours comme au travail.

    Par conséquent, il doit être de rigueur dans tous les secteurs d’activité:

    - Dans le domaine politique, administratif et judiciaire, il importe que prévale le dévouement au service du citoyen, par l’identification de profils qualifiés, par la primauté accordée aux intérêts supérieurs de la Nation et des citoyens, loin des surenchères et des calculs étroits.

    - Dans le domaine social, il doit s’imposer notamment dans les secteurs de la santé, de l’éducation, de l’emploi, du logement.

    De plus, le sérieux que Nous préconisons doit avoir cours parmi les opérateurs économiques, dans les domaines de l’investissement et de la production et au sein du monde des affaires.

    En définitive, le sérieux est la clé de voûte d’une approche intégrée qui subordonne l’exercice de la responsabilité à l’exigence de reddition des comptes et fait prévaloir les règles de bonne gouvernance, la valeur travail, le mérite et l’égalité des chances.

    Cher peuple,

    Les répercussions de la crise mondiale, conjuguées à des années de sécheresse successives au niveau national, ont contribué au renchérissement du coût de la vie et au ralentissement de la croissance économique.

    Aussi, Nous avons orienté le gouvernement pour qu’il adopte les mesures nécessaires afin d’atténuer leur impact négatif sur les franges de la population et les secteurs les plus touchés, et d’assurer l’approvisionnement des marchés en produits de base.

    Aujourd’hui, alors que des signes d’un recul progressif des tensions inflationnistes commencent à se préciser à l’international, il est urgent pour nous de faire preuve de sérieux pour instaurer un climat de confiance et saisir les nouvelles opportunités. Le but est de renforcer la relance et la résilience de l’économie nationale.

    À cet égard, Nous avons lancé le Programme d’Investissement Vert du Groupe OCP et Nous avons donné un coup d’accélérateur au plan de déploiement des énergies renouvelables. Faisant suite à la réunion que Nous avons présidée à cette fin, le gouvernement a élaboré le projet «Offre Maroc» pour l’hydrogène vert. À cet égard, Nous engageons le gouvernement à entreprendre la mise en œuvre rapide et qualitative de ce projet, de manière à valoriser les atouts dont dispose Notre pays en la matière et à répondre au mieux aux projets portés par les investisseurs mondiaux dans cette filière prometteuse.

    Afin de parachever le chantier de la protection sociale, Nous attendons que les prestations sociales commencent, comme prévu, à être servies aux ménages ciblés, à la fin de l’année en cours. Notre souhait est que ce revenu direct contribue à l’amélioration des conditions de vie de millions de familles et d’enfants dont Nous ressentons la détresse. Ce dispositif constituera un pilier essentiel de notre modèle de développement et de société, qui a pour finalité de préserver, dans toutes ses dimensions, la dignité des citoyens.

    S’agissant de la gestion des ressources hydriques qui requiert davantage de rigueur et de vigilance, Nous avons veillé à l’élaboration du Programme national pour l’approvisionnement en eau potable et d’irrigation 2020-2027.

    À cet égard, Nous appelons au suivi minutieux de toutes les étapes de mise en œuvre de ce programme. D’ailleurs, Nous ne tolérerons aucune forme de mauvaise gouvernance, de mauvaise gestion ou d’exploitation anarchique et irresponsable de l’eau.

    Cher peuple,

    Dans un monde secoué par l’ébranlement des valeurs et des référentiels et confronté à l’imbrication de nombreuses crises, nous avons plus que jamais besoin de faire preuve du sérieux tel que tous les Marocains le conçoivent:

    - D’abord, par un attachement sans faille aux valeurs religieuses et patriotiques et à notre devise éternelle : Dieu - la Patrie - le Roi;

    - En deuxième lieu, par l’attachement indéfectible à l’unité nationale de notre pays et à son intégrité territoriale;

    - Ensuite, par la sauvegarde des liens sociaux et familiaux d’où émergera, in fine, une société plus solidaire et plus soudée;

    - Enfin, par la poursuite résolue de la quête du développement qui permettra d’atteindre le progrès économique souhaité et de renforcer la justice sociale et spatiale.

    Cher peuple,

    L’action que Nous menons au service de Notre peuple ne consiste pas uniquement à gérer les questions internes. Elle réside aussi dans Notre détermination à fonder des relations solides avec les États frères et amis, et plus particulièrement avec les pays voisins.

    Depuis quelques mois, beaucoup demandent à savoir où en sont les relations entre le Maroc et l’Algérie. Ces relations sont stables, Nous aspirons néanmoins à ce qu’elles soient meilleures.

    À ce propos, Nous rassurons nos frères en Algérie, leur direction et leur peuple qu’ils n’auront jamais à craindre de la malveillance de la part du Maroc. Nous leur confirmons aussi tout le prix que Nous attachons aux liens d’affection et d’amitié, aux échanges et aux interactions entre nos deux peuples. Nous prions le Très-Haut pour un retour à la normale et une réouverture des frontières entre nos deux pays voisins et nos deux peuples frères.

    Cher peuple,

    Nous saisissons cette occasion pour rendre un vibrant hommage aux Forces Armées Royales, à la Sûreté nationale, à la Gendarmerie Royale, aux Forces Auxiliaires et à la Protection civile, toutes composantes confondues, pour leur mobilisation constante, sous Notre commandement, afin de défendre l’unité nationale et de préserver la sécurité et la stabilité du pays.

    Nous prions également le Très-Haut pour qu’Il couvre de Son infinie miséricorde les vaillants martyrs du Maroc, au premier rang desquels Notre Auguste Grand-Père, feu Sa Majesté le Roi Mohammed V et Notre Illustre Père, feu Sa Majesté le Roi Hassan II, que Dieu ait Leurs âmes.

    Pour conclure, il n’y a rien de mieux qu’un verset du Saint-Coran où Dieu décrète : «Ceux qui croient et font de bonnes œuvres… vraiment Nous ne laissons pas perdre la récompense de celui qui fait le bien». Véridique est la parole de Dieu.

    Wassalamou alaikoum wa rahmatoullah wa barakatouh».

  • L'avertissement était pourtant clair !

    Sachons reconnaître la puissance des institutions de certaines nations. Le discours du roi Mohammed VI, repris dans la chronique précédente, est empreint d'une grande sagesse et d'un amour de son peuple que l'on sent sourdre tout au long de la lecture. Les institutions marocaines disposent de la durée, de la continuité et de l'indépendance que ne saurait avoir un président, quel qu'il soit, dont la survie politique est remise en cause tous les cinq ou sept ans, et dont l'élection n'est que le résultat d'une surenchère de promesses mensongères.

    Toutefois, l'admiration que l'on peut avoir à l'égard de ces sages institutions ne doit pas nous empêcher de faire preuve de lucidité, bien au contraire. Notre réflexion ne doit pas se départir du souci des intérêts français. Et cet intérêt bien compris nécessite une approche réaliste de celui de nos voisins ; les relations n'en ont alors que plus de solidité. Ce n'est qu'entre nations qui savent rester elles-mêmes que les accords, traités, négociations peuvent avoir le plus de force. Nos relations avec le Maroc, tissées pendant des décennies avec une finesse et une intelligence rares, notamment par le Maréchal Lyautey, sont malheureusement saccagées par nos gouvernements successifs.

    Regardez cet interview du roi Mohammed V en 1993, il y a exactement trente ans. Elle a été vue des milliers de fois, mais on ne se lasse pas d'écouter un chef d'État faire preuve d'une telle clairvoyance. Il eut été d'une sage politique d'en tirer les leçons qui s'imposaient. Nos gouvernements, pour des raisons électorales, comme toujours ont, depuis, volontairement refusé de le faire, une lâcheté qui ne saurait recevoir un autre qualificatif que celui de trahison.

    Cliquez sur l'image pour visionner

    Mohammed V.jpg

     

    Lors d’une interview en 1993 par Anne Sinclair, Hassan II affirma l’impossibilité d’intégration des ressortissants marocains en France, exprimant ainsi que la colonie marocaine y resterait marginale et s’y développerait en vase clos avec sa propre culture musulmane. Trente ans plus tard, cette colonie occupe en France 750 « zones de non-droit » et forme ses jeunes au djihad par le trafic de drogue, l’incendie des voitures, l’attaque des forces de l’ordre, les émeutes urbaines, en vue d’une guerre civile, dont les émeutes de 2005 puis de 2023 n'ont été que les répétitions générales.

  • L’Allemagne finance l’affaiblissement du nucléaire français

    Nucléaire.jpg

    Cette étude est importante pour comprendre comment l'Allemagne combat, comme toujours au cours de l'histoire, avec l'aide des États-Unis, nos intérêts essentiels. Il faut la naïveté ou l'incompétence d'un Macron - en réalité une ambition démesurée - avec ses nuées européistes et mondialistes, pour croire encore à une Europe de plus en plus fantomatique. Ce ne serait que des observations sans grande portée si cela ne se traduisait pas par une atteinte grave à notre souveraineté.

    *****

    En 2020, l’Allemagne remporte une victoire décisive : la fermeture de la centrale de Fessenheim. Alors que le parc nucléaire français est mal en point, Berlin en profite pour multiplier les actions dans le but d’affaiblir l’industrie française du nucléaire. Pour sauver sa compétitivité économique, l’Allemagne finance des fondations politiques qui mènent des opérations d’influence anti-nucléaire sur le territoire français et à l’étranger, notamment auprès des fournisseurs d’uraniums. Enquête sur cette croisade contre l’atome français. 

    Propos recueillis par Côme de Bisschop

    Étude tirée du site Revue Conflits

    Vingt et un ans après sa décision de sortir de l’atome, l’Allemagne a définitivement débranché ses trois derniers réacteurs nucléaires en activité. Comment l’opinion publique allemande est-elle devenue farouchement antinucléaire ? 

    L’opposition de l’opinion publique allemande à l’atome se développe durant la guerre froide. Si elle concerne initialement le nucléaire militaire (notamment au travers de mouvements pacifistes parfois instrumentalisés par les Soviétiques comme ce fût le cas lors de la crise des Euromissiles), elle s’étend progressivement au domaine civil, notamment après l’accident de Tchernobyl. Dès lors, l’atome inspire une telle criante qu’on trouve des livres “traumatisants” destinés à enseigner la peur du nucléaire à la jeunesse. On peut notamment citer les ouvrages de Gudrun Pausewang qui contenaient des descriptions détaillées d’enfants agonisant à la suite d’un “Tchernobyl géant” en Allemagne et qui furent mis au programme par de nombreux instituteurs de l’époque.

    Depuis, le sujet du nucléaire n’a pas disparu des débats publics. Il a notamment été utilisé par des partis politiques, à l’instar de Die Grunen, comme cheval de bataille électoral. Tous ces éléments contribuent au développement d’une psychose autour de la question nucléaire. Celle-ci fut notamment observable à l’issue de l’accident de Fukushima en mars 2011 lorsqu’une frénésie s’empara de l’opinion publique allemande. Cela poussa Angela Merkel à accélérer l’abandon de l’atome face à la menace d’un revers politique au profit de Die Grunen lors des élections suivantes.

    Les fondations politiques sont des acteurs spécifiques de la politique étrangère allemande. Ces dernières sont-elles des agents d’influence de l’État allemand ? En vue de quels objectifs agissent-elles ?

    Les fondations politiques sont une spécificité du système allemand qui ne trouve pas vraiment d’équivalent dans le reste du monde. Il s’agit de structures parapolitiques, financées majoritairement par l’État et rattachées à un parti politique allemand. On compte 7 fondations, la fondation Friedrich Ebert (SPD), la fondation Konrad Adenauer (CDU), la fondation Friedrich Naumann (FDP), la fondation Hans Seidel (CSU), la fondation Rosa Luxembourg (PDS/Die Linke), la fondation Heinrich Böll (Les Verts) et la fondation Desidarius Erasmus (AfD). Elles fonctionnent sur un modèle assimilable à celui d’un think tank avec comme objectif déclaré la promotion d’une ligne idéologique proche de celle de leur parti de rattachement. Elles agissent sur le sol allemand, mais également à l’international. Bien que revendiquant une indépendance vis-à-vis de l’État fédéral, l’examen empirique de l’action des fondations depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale met en lumière leur rôle d’agent d’influence aligné sur les intérêts allemands.

    Dès les années 50, les fondations sont massivement employées par la République Fédérale Allemande dans sa stratégie de lutte contre l’influence communiste, notamment contre celle de la RDA face à qui elle souhaite incarner “l’Allemagne légitime”. Les fondations sont notamment employées en Amérique du Sud où leur efficacité est tel qu’elles serviront de modèle à des expériences telles que la National Endowment for Democracy, une structure financée par le gouvernement américain, et impliquée dans de nombreuses opérations de déstabilisation de régimes étrangers. L’État allemand est particulièrement satisfait de l’action des fondations. Il loue dans un rapport leur capacité à “influencer le développement de pays à travers une orientation de leurs élites dans un sens sociopolitique déterminé”, mais également le fait que leur emploi permet de dissimuler l’implication du gouvernement fédéral. Par moment, l’État estime même que l’emploi des fondations politiques est plus efficace que celui de ses services secrets.

     

    À lire également

    Blitzkrieg énergétique : l’Allemagne en campagne contre le nucléaire français

    En 1996, le Président fédéral Roman Herzog déclare considérer les fondations comme “l’un des instruments les plus efficaces et éprouvés de la politique étrangère allemande, si on ne se limite pas aux seules méthodes et au savoir traditionnel de la diplomatie”. Depuis la fin de la Guerre froide, les fondations politiques ont été engagées en Europe de l’Est dans des opérations “d’européanisation” des sociétés et de rapprochement des élites politiques avec l’Allemagne ; en Afrique, afin d’appuyer la politique étrangère allemande ; dans les États des printemps arabes afin de peser sur les modalités de fonctionnement des nouvelles institutions et, plus récemment, en France afin de pousser Paris à renoncer à l’énergie nucléaire.

    La liste ci-dessus est loin d’être exhaustive, les fondations politiques allemandes mènent des actions partout dans le monde avec la bénédiction d’un État allemand particulièrement satisfait n’ayant de cesse d’augmenter leur budget.

    Vous précisez que les fondations politiques doivent la quasi-totalité de leur budget à l’État allemand. Ce dernier est-il ainsi le commanditaire du projet qu’il finance ?

    Il existe deux modes de financement des fondations politiques par l’État allemand. Le premier est un financement de droit calculé en fonction des résultats du parti politique de rattachement de la fondation sur les quatre derniers scrutins législatifs. Le second, et principal mode de financement des fondations pour leurs actions à l’étranger, est une attribution de fonds dédiée à une initiative spécifique : une fondation politique présente un projet à un ministère et celui-ci décide s’il accepte ou non de le financer.

    Dans ce cadre, l’État allemand, par l’intermédiaire de son ministère, peut être qualifié de commanditaire du projet. Bien qu’il n’en soit pas l’architecte premier, il n’en demeure pas moins le principal financeur et un acteur central sans qui l’entreprise ne pourrait se concrétiser. Il est important de souligner que le ministère sollicité contrôle le projet en amont et est entièrement libre de refuser d’accorder des fonds. Ainsi, lorsque les ministères du Développement et des Affaires étrangères financent des projets d’influence visant à entraîner des “transformations socio-écologiques”, ils le font en toute liberté et en toute connaissance de cause.

    Quels sont les objectifs de l’Allemagne dans ses exercices d’affaiblissement de la filière nucléaire française ? Est-ce pour rattraper l’avantage concurrentiel français ou pour convertir ses voisins limitrophes à cette peur de la potentielle catastrophe ?

    Si la peur du nucléaire au sein de l’opinion publique allemande peut pousser Berlin à voir d’un mauvais œil le développement de l’atome dans un pays limitrophe, la principale raison des manœuvres d’affaiblissement de la filière nucléaire française reste économique. L’abandon de l’atome par l’Allemagne en 2011 supposait une hausse durable des coûts de l’énergie. Si cette augmentation était problématique pour les ménages, elle était catastrophique pour le tissu industriel allemand qui allait voir sa compétitivité s’effondrer, notamment par rapport à l’industrie française qui, n’ayant pas abandonné le nucléaire, n’allait pas voir ses coûts de production exploser.

    À cette époque, l’obstacle se tenant entre l’Allemagne et un déclassement industriel majeur se résume au marché commun de l’énergie (adopté en 2007 sous présidence allemande) et à ses mécanismes permettant de juguler la hausse des prix, mais dont la pérennité sur le temps long n’est en rien assurée (en témoignent les débats actuels autour de l’ARENH). N’ayant pas les moyens de compenser les avantages octroyés à l’industrie française par l’utilisation du nucléaire, Berlin tente donc de pousser Paris à y renoncer. 

    Certaines de ses fondations politiques sont particulièrement actives dans la lutte contre la filière nucléaire française en utilisant des relais médiatiques et associatifs. Comment arrivent-elles à propager le paradigme antinucléaire au sein de l’opinion publique française ?

    La fondation politique la plus active sur le territoire national est la Fondation Heinrich Böll. Sa stratégie d’influence vise à propager le paradigme antinucléaire au sein de l’opinion publique française et conjugue une approche directe et une approche indirecte. L’approche directe consiste à produire et diffuser de la doctrine pseudoscientifique militante visant à diaboliser le secteur nucléaire. Ces productions, souvent alarmistes et manichéennes, ont pour objectif de jouer sur la perception du grand public afin que celui-ci ne voit plus dans l’atome qu’une énergie du passé, dangereuse, qu’il serait vital d’abandonner. L’approche indirecte se traduit par le financement de structures tierces, notamment d’associations militantes. La Fondation Heinrich Böll finance ainsi, et ce depuis plusieurs années, le Réseau Action Climat. Il s’agit d’une fédération regroupant une trentaine d’associations écologistes et enregistrées en tant que représentante d’intérêts auprès de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique.

    Cela étant, l’intérêt majeur du Réseau Action Climat et de ses associations membres réside dans leur capacité à mener des actions militantes “choc” à fort impact médiatique. Ces dernières, dont la conduite est impossible pour la Fondation Heinrich Böll du fait de ses faibles effectifs et de son positionnement, permettent de provoquer l’irruption du sujet nucléaire dans le débat public sous un angle négatif, bien plus émotionnel que rationnel. Ces actions sont doublement efficaces, car elles permettent également de “rabattre” les tiers vers la documentation d’influence élaborée par la Fondation Heinrich Böll, favorisant, par voie de conséquence, la propagation du paradigme antinucléaire au sein de la société française.

     

    À lire également

    Nucléaire : à l’origine était Superphénix, puis vint le déclin avec Jospin

    Selon la stratégie adoptée par ces fondations politiques, cette stigmatisation massive du nucléaire au sein de l’opinion publique française doit mener à un abandon de la filière par les autorités publiques. La bataille idéologique du nucléaire peut-elle être remportée en dissuadant l’opinion publique plutôt que les dirigeants politiques ?

    La conquête de l’opinion publique est une excellente stratégie d’influence, particulièrement dans un système démocratique. La population est ici un effecteur à instrumentaliser afin de faire pression sur l’ensemble du paysage politique. Il convient de rappeler qu’en 2011, c’est la peur de l’opinion publique et des conséquences électorales liées qui ont poussé Angela Merkel à accélérer la sortie du nucléaire. Mme Merkel était loin d’être une dogmatique anti-atome. En effet, 6 mois auparavant, son gouvernement avait fait passer une loi sur l’allongement du temps de fonctionnement des centrales nucléaires qu’elle avait qualifié de “révolution énergétique”.

    De plus, la Fondation Heinrich Böll est loin d’avoir délaissé le monde politique. Elle entretient d’excellentes relations avec Europe Ecologie Les Verts. En mars dernier, le Vice-Président de l’antenne parisienne de la fondation a ainsi été le premier intervenant lors d’une conférence de presse au siège d’EELV censée marquer le début de ce que Marine Tondelier a elle-même qualifié de “contre-offensive culturelle” contre le nucléaire.

    Les associations antinucléaires comme « GreenPeace France » ou « Les Amis de la Terre » sont financées par des fondations politiques allemandes, elles-mêmes financées par l’État allemand. Notre voisin d’outre-Rhin nous a-t-il déclaré une guerre idéologique en s’infiltrant au sein de la société française pour affaiblir le fleuron de notre industrie qu’est l’énergie nucléaire ?

    Les stratégies d’influence mises en place par l’Allemagne s’apparentent moins, du fait de leur effet final recherché, à des actions de guerre idéologique qu’à des manœuvres de guerre économique. Bien qu’il serait exagéré d’affirmer que Berlin nous mène une guerre économique, le bon sens nous pousse à rappeler la propension de l’Allemagne à prioriser ses intérêts, et ce, même au détriment de ses “alliés proches”.

    Il n’est pas question de faire ici de “l’anti-germanisme primaire”, il n’en demeure pas moins essentiel, à nos yeux, d’insister sur la nécessité d’une prise de conscience quant à l’asymétrie demeurant entre l’Allemagne et la France à l’importance accordée  à la notion de “couple franco-allemand”, un concept vraisemblablement tombé en désuétude outre-Rhin.

    Les fondations politiques allemandes œuvrent également à l’étranger. Comment la Fondation Rosa Luxemburg, par exemple, attaque-t-elle le problème à la source en menant des opérations d’influence auprès des fournisseurs d’uranium ?

    Contrairement à la Fondation Heinrich Böll évoquée précédemment, la Fondation Rosa Luxemburg ne mène pas d’action importante sur le territoire français. Cela étant, elle joue tout de même un rôle dans la stratégie d’affaiblissement de la filière nucléaire française. Elle œuvre notamment à dégrader les relations entre la France et ses fournisseurs de matière première nucléaire. Dernièrement, la Fondation Rosa Luxemburg a particulièrement ciblé la relation entre la France et le Niger, un pays qui, en 2020, a pourvu a plus d’un tiers des besoins français en uranium. Pour cela, la fondation élabore et diffuse de la doctrine d’influence particulièrement virulente contre la France. Elle y développe un narratif caricatural qui accuse Paris de mener une politique néocoloniale aux dépens de Niamey.

    La Fondation Rosa Luxemburg cherche ici à capitaliser sur le sentiment anti-français s’étant développé en Afrique de l’Ouest. Elle aspire à stigmatiser la France dans l’espoir de dégrader les relations entre Paris et Niamey afin de perturber la chaîne d’approvisionnement de la filière nucléaire française en uranium. Il est par ailleurs pertinent de souligner que l’élaboration et la diffusion de cette documentation d’influence sont officiellement financées par le ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement. Il n’est pas question ici d’affirmer que les modalités d’exploitation des mines nigériennes par Orano seraient au-dessus de toute critique. Il est question de déterminer s’il est acceptable ou non qu’un État finance au travers d’un organe parapolitique des manœuvres de perturbation de l’approvisionnement d’une filière stratégique d’un de ses prétendus alliés proches.

  • Politique étrangère : avec plus de 13 000 morts, Kiev et l’Occident commencent à paniquer

    Ukraine.jpg

     

    Le secrétaire du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie, Patrushev, a annoncé plus de 13 000 soldats morts dans les forces armées ukrainiennes lors de la contre-offensive. D’autres sources donnent plus de 14 000 tués et davantage de blessés.

    Il semble que les alliés occidentaux de l’Ukraine aient effectivement décidé de combattre la Russie jusqu’au dernier Ukrainien, a souligné Vladimir Poutine.

    Cela dit, le potentiel offensif de Kiev est loin d’être épuisé. Les Russes se préparent à un probable regain des assauts ukrainiens.

    Pour ceux qui n’ont pas oublié l’Histoire et qui savent qu’on ne juge pas un pays et son peuple à son seul PIB, la capacité de résistance de la Russie, attaquée par l’ensemble de l’Occident totalement soumis à la bannière étoilée, n’a rien de surprenant. Vaincre la Russie est mission impossible. Comme le répète le président de la Douma, Piotr Tolstoï : “Napoléon et Hitler ont essayé. Cela s’est terminé avec l’entrée des troupes russes à Paris et à Berlin”. Voici des chiffres que vous n’entendrez pas sur vos chaines TV.

    Pour écraser la toute puissante Allemagne nazie, la Russie a engagé 60% de son PIB et sacrifié 26 millions de citoyens dont 10 millions de soldats. Mais aujourd’hui, face à la coalition otanienne, elle n’a engagé que 3% de son PIB. Autant dire que la potentielle montée en puissance de l’armée russe est colossale.

    Pour les armes les plus sophistiquées, la capacité de production de l’industrie de l’armement a déjà été multipliée par 2,7 selon Poutine. Pour les équipements plus rudimentaires, la capacité de production a été multipliée par 10.

    Si besoin est, avec 146 millions d’habitants, Moscou peut mobiliser des millions de soldats et peut sortir des milliers de chars et d’avions de ses usines. Et que dire du peuple russe, dont le patriotisme et l’esprit de sacrifice n’ont aucun équivalent en Occident ? Ce peuple éminemment courageux a conservé la mentalité de nos Poilus de 14-18, alors que la jeunesse occidentale est totalement avachie après 80 ans de paix.

    Il ne faut donc pas s’étonner que les Russes aient su faire face aux 11 trains de sanctions économiques et à l’escalade continue des livraisons d’armes, passées en 15 mois du simple équipement de soldat au chasseur F-16, avant les armes nucléaires tactiques, si les fous furieux du Pentagone refusent d’admettre que la mentalité d’un Russe est le contre-modèle de celle d’un Américain. La Russie ne pliera jamais.

    Un Américain, biberonné à la propagande hollywoodienne, est arrogant au point de se croire invincible. Un Russe, élevé dans la tradition historique du sacrifice à la patrie, sait que quoi qu’il arrive, le peuple et ses élites ne capituleront jamais. D’ailleurs, il suffit d’observer la sérénité de Poutine pour comprendre qu’il n’y a qu’une issue possible à cette guerre : la victoire de la Russie, tôt ou tard.

    La presse a beaucoup ironisé sur les déboires de l’armée russe aux premiers jours de l’offensive. Mais si Poutine, très mal informé par ses services de renseignement, a cru rejouer avec le Donbass l’épisode de la Crimée, que dire des monumentales erreurs de l’Occident ?

    – sous-estimation des capacités de résistance de l’économie russe

    – sous-estimation de la puissance de l’armée russe et de la compétence des officiers russes

    – sous-estimation de l’écrasante avance technologique des armes russes

    – surestimation de la doctrine otanienne sur la soi-disant doctrine soviétique

    – surestimation des capacités militaires de l’Europe, à court de matériels

    – méconnaissance consternante de la mentalité russe

    – erreur sur le supposé isolement de la Russie

    – échec des pressions américaines pour que la Chine, l’Inde, l’Afrique et le Moyen-Orient lâchent Poutine

    De plus en plus de pays sont séduits par la perspective d’un monde multipolaire qui mettrait fin à la domination sans partage de Washington et à celle du dollar.

    “L’organisation BRICS, constituée du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud, représente plus de 40% de la population de la Terre et plus de ¼ de son PIB et de sa surface, a reçu en juin et en novembre 2022 les candidatures officielles à l’adhésion de la part de trois nouveaux pays, dont deux sont des géants énergétiques : l’Algérie, l’Argentine et l’Iran.”

    D’autres se mettent sur les rangs : les Émirats Arabes Unis, la Turquie, l’Indonésie, la Syrie, l’Arabie Saoudite, le Kazakhstan, le Tadjikistan, le Mexique, la Thaïlande, le Nigeria, le Cambodge, la Malaisie, le Sénégal, l’Ouzbékistan, les Fidji, l’Éthiopie et même la Grèce. L’Égypte et le Bangladesh sont les candidats officiels à l’adhésion dès 2023. Les candidats devront satisfaire aux critères d’adhésion. Car on n’adhère pas aux BRICS comme on entre dans un moulin. La Corée du Sud, valet des États-Unis, a été écartée.

    On le voit, le monde multipolaire s’est mis en marche depuis le 24 février 2022 et plus rien n’arrêtera ce mouvement, même s’il faut s’attendre à ce que les États-Unis fassent tout pour conserver leur hégémonie et leur pouvoir de nuisance. Ce sont des forces militaires et économiques immenses qui se lèvent contre Washington.

    Biden va perdre cette guerre et c’est Poutine qui sera auréolé de la victoire, pour avoir été le seul à résister aux États-Unis et à vaincre les 40 nations qui soutiennent l’Ukraine, dont 25 militairement.

    La France a la malchance d’être gouvernée par un président immature, arrogant, prétentieux et plus qu’incompétent. Il est imperméable à la géopolitique. En Afrique, au Liban, en Chine, en Algérie, il ne subit que des échecs.

    Ne comptons pas sur lui pour sortir notre pays de cet engrenage guerrier insensé. Bien au contraire, méprisé par Poutine, Macron enrage d’être mis sur la touche et pousse à l’escalade. Mais quand on veut jouer les pacificateurs tout en livrant à Kiev des canons Caesar qui tuent des soldats russes, il ne faut pas s’étonner de perdre toute crédibilité aux yeux du Kremlin. La politique du “en même temps”, summum d’hypocrisie et de débilité, ça ne marche pas avec Poutine. On ne mène pas le tsar en bateau très longtemps.

    Stoppons cette escalade. Le ministre de la Défense russe Choïgu vient de déclarer qu’il était inutile de livrer des armes à Kiev. Cela ne changera pas l’issue de cette guerre.

    Jacques Guillemain

  • "La Russie est totalement isolée sur la scène internationale" déclarait notre ambassadeur à l'ONU. Pauvre Russie !

    Notre brillant ministre des finances, qui entraîne le pays, avec l'aide d'E. Macron, lui-même aux ordres de la finance internationale, vers les trois mille milliards de dettes, prédisait il y a un an : "Nous allons provoquer l'effondrement de l'économie russe à travers les sanctions économiques occidentales". Manqué !

    La charge de la dette française, les intérêts à rembourser, était de 35 milliards d'euros en 2021. En 2022, elle dépasse les 50 milliards d'euros. Et l'institut libéral iFrap estime la charge de la dette à 100 milliards d'euros en 2027. Il y a longtemps que la plus petite ou la plus importante entreprise privée aurait déposé le bilan .

     

    Moscou.jpg

    Les 19 et 21 mars dernier la « Conférence parlementaire internationale Russie-Afrique dans un monde multipolaire », organisée par la Douma, se réunissai.t à Moscou. Dans le même temps l'Afrique nous mettait à la porte. Aujourd'hui c'est la Chine qui se moque de nous. Les sanctions sont décidément très efficaces.

    Comme dit Slobodan Despot, « on n’imagine pas la portée de cette photo ». La politique internationale est remodelée au préjudice des seuls occidentaux. Bravo à leur sens politique, notamment à celui de notre turlupin national !

    Mais qu'en pense l'américano-maniaquo-macronien clan Ménard qui considère la Russie comme notre "ennemie" ?

  • Écosse : nouveau premier ministre musulman…, c'est parti !

    Eglise mosquée.jpg

    Écosse. Une église

    transformée en mosquée

     

    En Écosse, l’église d’une petite ville  a finalement été rachetée par une organisation musulmane de Glasgow qui ambitionne désormais de transformer l’édifice en mosquée. Des églises transformées en mosquées, voilà peut-être le marqueur le plus symbolique de la menace de transformation civilisationnelle pesant actuellement sur l’Europe en raison des évolutions démographiques.

    Un marqueur qui peut dorénavant être observé dans les contrées les plus inédites, à l’instar de la petite ville écossaise d’Ardrossan, une commune d’environ 11 000 habitants située sur le littoral sud-ouest à une cinquantaine de kilomètres de Glasgow.

    Sur place, l’ancienne église Barony St John’s,  a été achetée par l’Al-Farooq Education and Community Centre (AFECC). Cette dernière, se présentant comme une organisation caritative basée à Glasgow, serait à la fois une mosquée, un centre communautaire et un lieu dédié à l’éducation religieuse selon le site Glasgow Helps.

    L’information concernant ce rachat de l’édifice religieux a été rapportée le 22 mars dernier par le Ardrossan & Saltcoats Herald, un journal hebdomadaire local qui relate cette nouvelle avec un ton particulièrement complaisant.

    Si l’église Barony St John’s avait été rachetée en 2015 par l’association caritative locale The Scottish Centre for Personal Safety en prévision de transformer le bâtiment en un lieu de musique et d’événements, elle a finalement abandonné le projet et remis l’église en vente faute de moyens financiers.

    Ardrossan.jpg

    Eglise Barony St John’s à Ardrossan, Écosse. Source : ardrossanherald.com

    Des réfugiés syriens en Écosse ?

    Entre-temps, l’édifice religieux avait été acheté au début de l’année 2021 par un entrepreneur local ayant effectué un « achat impulsif » dans l’optique de préserver le bâtiment. Toutefois, il confiait à la presse locale au mois d’avril de la même année son projet de finalement utiliser l’église pour y construire des bureaux ou une salle de spectacle. Avant de finalement remettre en vente les lieux en avril 2022.

    L’avenir de l’édifice religieux semble désormais tout tracé : le Ardrossan & Saltcoats Herald indique qu’en lieu et place de l’ancienne église paroissiale, un lieu de culte musulman sera inauguré.

    L’hebdomadaire local ajoute que cette future mosquée aurait pour ambition de devenir « un centre de référence, d’accueil et d’inspiration pour l’ensemble de la communauté, tout en éduquant et en encourageant les gens à "s’efforcer d’acquérir la douceur de la foi" par le biais de ses diverses activités et programmes, conformément au Coran et à la Sunnah. » À la lecture de telles lignes, sommes-nous encore en Écosse ?

    De son côté, l’organisation musulmane AFECC, confirmant vouloir « construire une mosquée et un centre communautaire à Ardrossan où les musulmans ne disposent actuellement d’aucune infrastructure », a lancé une collecte de fonds au mois de novembre 2022 pour soutenir ce projet avec pour objectif de réunir 100 000 livres sterling (soit environ 114 000 €) tandis que l’église nécessite des rénovations urgentes.

    Enfin, dans sa présentation de la collecte de fonds, le centre communautaire Al-Farooq précise qu’à Ardrossan, « la majorité de la population musulmane est composée de réfugiés syriens qui ont été déplacés en raison de la guerre civile »… Verra-t-on le nouveau Premier ministre écossais venir inaugurer les lieux ?

    ****

    Voila qui devrait faire réfléchir nos bourgeois inconscients qui jouent les stupides autruches, pensant pouvoir, sans réagir, protéger leur liberté et surtout leurs sous, alors que des périls identiques à ceux que va désormais connaître l'Écosse sont à la veille de se déverser sur la France. Nous les avons déjà vu à l'œuvre au cours de l'histoire : ce sont toujours les mêmes lâches !

  • Une vidéo importante : « les Américains sont probablement responsables de l’explosion des gazoducs russes »

    Baud-2.jpg

    Cliquez sur la photo pour suivre la vidéo

    Voilà ce que devrait être un examen réaliste de la situation.

    Jacques Baud est un ancien colonel de l’armée suisse, membre des Renseignements suisses, spécialiste du terrorisme et chef de la doctrine des opérations de la paix pour les Nations Unies. C’est dire qu’il sait de quoi il parle.

    Il donne ici un point de vue difficilement contestable sur les explosions des gazoducs Nordstream 1 et 2.

    Cette vidéo dure 55 mn, longue diront certains. Mais devant les affirmations unilatérales de la presse française et étrangère liée, comme on le sait, à tout ce que la finance compte d’universalistes, mondialistes et européistes déconstruits, il est indispensable d’écouter les voix dissonantes et empreintes de sagesse. Puissent les benêts russophobes engourdis et hystériques se faire une idée de l'engrenage dramatique dans lequel nous entraînent nos irresponsables politiciens.

    Nous vous recommandons tout particulièrement cet entretien.

  • Bernard Lugan : « À travers le rejet de la France, ce sont les “valeurs” de l’Occident que l’Afrique rejette »

    Lugan.jpeg

     

    Lugan B.JPG

     

     

     

     

     

     

     

     

    L'entretien de Bernard Lugan, éminent spécialiste du continent africain, avec Gabrielle Cluzel, rédactrice en chef de "Boulevard Voltaire", présente un intérêt essentiel alors que la France est de plus en plus rejetée de l'Afrique.

    ***

    Gabrielle Cluzel. Bernard Lugan, vous publiez, le 9 février prochain, une Histoire du Sahel, des origines à nos jours (Éditions du Rocher) indispensable pour comprendre les menaces du monde d'aujourd’hui. Pour vous, il est important de connaître cette Histoire. Vous pensez que l’on sous-estime ce facteur ?

    Bernard Lugan. Les décideurs français n’ont pas vu que les actuels conflits sahéliens sont d’abord des résurgences « modernisées » de ceux d’hier, qu’inscrits dans une longue chaîne d’événements, ils expliquent ceux d’aujourd’hui.

    Avant la colonisation, les sédentaires sudistes étaient pris dans la tenaille prédatrice des nomades. Une donnée commune à tout le Sahel, du Sénégal au Tchad où nous retrouvons la même problématique. À la fin du XIXe siècle, la colonisation bloqua l’expansion des entités prédatrices nomades dont l’écroulement se fit dans l’allégresse des sédentaires qu’elles exploitaient, dont elles massacraient les hommes et vendaient les femmes et les enfants aux esclavagistes du monde arabo-musulman.

    Mais, ce faisant, la colonisation renversa les rapports de force locaux en offrant une revanche aux victimes de la longue histoire africaine, tout en rassemblant razzieurs et razziés dans les limites administratives de l’AOF (Afrique-Occidentale française). Or, avec les indépendances, les délimitations administratives internes à ce vaste ensemble devinrent des frontières d’États à l’intérieur desquelles, comme ils étaient les plus nombreux, les sédentaires l’emportèrent politiquement sur les nomades, selon les lois immuables de l’ethno-mathématique électorale. Les anciens dominants n’ayant pas accepté de devenir les sujets de leurs anciens vassaux, la problématique conflictuelle sahélienne était donc posée. Les premières guerres touareg éclatèrent alors dès les années 1960 au Mali, puis au Niger et au Tchad où les Toubou se soulevèrent.

    G. C. Dans votre livre, l’on suit constamment l’interaction entre la géographie et ce que vous définissez comme l’ethno-histoire. Pourquoi les décideurs français ne l’ont-ils pas vu ?

    B. L. Là est en effet le cœur de la cascade d’erreurs faite par les décideurs politiques français alors que les militaires avaient, eux, bien compris le réel du terrain, mais ils n’ont pas été écoutés. Au Mali, nous étions en présence de deux guerres, celle des Touareg au nord, celle des Peul au sud, puis, plus tard, s’y est ajoutée celle de l’État islamique dans la région des trois frontières.

    Au nord, et comme je n’ai cessé de le dire dans mes articles de L'Afrique réelle, la clé du problème était détenue par les Touareg aujourd’hui de nouveau rassemblés autour du « leadership » de Iyad Ag Ghali, chef historique des précédentes rebellions touareg. Politiquement, il eût fallu nous entendre avec ce chef Ifora avec lequel nous avions à l’origine des contacts, des intérêts communs, et dont le combat est d’abord identitaire avant d’être islamiste. Or, par idéologie, par refus de prendre en compte les constantes ethniques séculaires, ceux qui font la politique africaine française ont considéré tout au contraire qu’il était l’homme à abattre… Le deuxième conflit, celui du sud (Macina, Liptako, nord du Burkina Faso et région des trois frontières), a, lui aussi, des racines ethno-historiques et leur élément moteur est constitué par certains ensembles peul.

    G. C. Vous écrivez que le djihadisme est « le plus souvent le paravent du narco-trafic ». Les deux maux sont donc étroitement imbriqués ? 

    B. L. Une autre erreur de Paris fut d’avoir « essentialisé » la question en qualifiant systématiquement de djihadiste tout bandit armé ou même tout porteur d’arme. Or, dans la plupart des cas, nous étions en présence de trafiquants se revendiquant du djihadisme afin de brouiller les pistes. Parce qu’il est plus valorisant de prétendre combattre pour la plus grande gloire du prophète que pour des cartouches de cigarettes, des cargaisons de cocaïne ou pour le contrôle des voies de migration vers l’Europe. D’où la jonction entre trafic et religion, le premier se faisant dans la bulle sécurisée par l’islamisme. L’erreur de la France fut d’avoir refusé de voir que nous étions face à l’engerbage de revendications ethniques, sociales, mafieuses et politiques, opportunément habillées du voile religieux, avec des degrés différents d’importance de chaque point selon les moments.

    G. C. Vous expliquez qu’une autre erreur française fut d’avoir globalisé la question alors qu’il était impératif de la régionaliser.

    B. L. Très exactement car Paris n’a pas voulu voir que l’EIGS (État islamique dans le Grand Sahara) et AQMI (Al-Qaïda pour le Maghreb islamique) ont des buts différents. L’EIGS qui est rattaché à Daech a pour objectif la création dans toute la bande sahélo-saharienne d’un vaste califat transethnique remplaçant et englobant les actuels États. De son côté, AQMI étant l’émanation locale de larges fractions des deux grands peuples à l’origine du conflit, à savoir les Touareg au nord et les Peul au sud, ses chefs locaux, le Touareg Iyad Ag Ghali et le Peul Ahmadou Koufa, ont des objectifs d’abord locaux et ils ne prônent pas la destruction des États sahéliens. Paris n’a pas vu qu’il y avait une chance à la fois politique et militaire à saisir, ce que je n’ai pourtant jamais cessé de dire et d’écrire, mais en France, on n’écoute pas les avis des « hérétiques »… Résultat : les décideurs parisiens ont donc refusé catégoriquement tout dialogue avec Iyad ag Ghali. Bien au contraire, le Président Macron déclara même qu’il avait donné comme objectif à Barkhane de le liquider… Contre ce que préconisaient les chefs militaires de Barkhane, Paris s’obstina donc dans une stratégie « à l’américaine », « tapant » indistinctement tous les GAT (groupes armés terroristes) péremptoirement qualifiés de « djihadistes », refusant ainsi toute approche « fine »… « à la française »...

    G. C. Quel est le rôle de Wagner dans la région sahélienne ? 

    B. L. Je vais être très clair : je refuse cette manie d’attribuer à d’autres les causes de nos échecs. Si Wagner a pris notre place en RCA, c’est parce que Sarkozy nous a fait évacuer Birao, verrou de toute cette partie de l’Afrique que les Russes, qui eux savent lire une carte, ont tout naturellement occupée. Ensuite parce que Hollande a fait distribuer des couches-culottes par nos armées alors qu’il fallait taper et très fort la Seleka. Nous avons ainsi perdu la confiance de nos alliés locaux et tout notre prestige. Les Russes n’ont plus eu qu’à cueillir le fruit mûr que nous avions laissé sur l’arbre… Au Mali, ce fut la même chose et je l’ai longuement expliqué au début de cet entretien.

    Mais, plus généralement, à travers le rejet de la France, ce sont les « valeurs » de l’Occident que l’Afrique rejette. Le continent qui, dans sa globalité, se reconnaît dans les valeurs naturelles familiales voit avec un haut-le-cœur le « mariage pour tous », les délires LGBT ou encore le féminisme castrateur de toute virilité proposés comme « valeurs universelles » par l’Occident. Pour les Africains, il s’agit là d’une preuve de décadence. Voilà pourquoi la Russie apparaît, au contraire, comme un contrepoids civilisationnel à la broyeuse moralo-politique occidentale.

    Quant à la démocratie « à la française », elle y est vue comme une forme de néocolonialisme. D’autant plus que proposer aux Africains comme solution à leurs problèmes l’éternel processus électoral, le mirage du développement ou la recherche de la bonne gouvernance relève du charlatanisme politique... Les événements démontrent en effet constamment qu’en Afrique, démocratie = ethno-mathématique, ce qui a pour résultat que les ethnies les plus nombreuses remportent automatiquement les élections. Voilà pourquoi, au lieu d’éteindre les foyers primaires des incendies, les scrutins les ravivent. Quant au développement, tout a déjà été tenté en la matière depuis les indépendances. En vain. D’ailleurs, comment peut-on encore oser parler de développement quand il a été démontré que la suicidaire démographie africaine en interdit toute possibilité ?

    G. C. Alors, quel avenir ?

    B.L. Plusieurs dizaines des meilleurs enfants de France sont tombés ou sont revenus mutilés pour avoir défendu un Mali dont les hommes émigrent en France plutôt que se battre pour leur pays. Mais, exigé par les actuels dirigeants maliens à la suite des multiples maladresses parisiennes, le retrait français a laissé le champ libre aux GAT, leur offrant même une base d’action pour déstabiliser le Niger, le Burkina Faso et les pays voisins. Le bilan politique d’une décennie d’implication française est donc catastrophique.

    La France est aujourd’hui face à un rejet global. Si le Niger, un pays plus que fragile et où nous venons de replier nos forces, devait à son tour connaître un coup d’État, la situation deviendrait alors problématique et le repli vers le littoral une urgence. Mais par quelles voies de retrait ? Les hommes pourront toujours être évacués par voie aérienne, mais quid des véhicules et du matériel, puisque nous ne disposons pas d’avions gros porteurs ?

    L’urgente priorité est donc de savoir ce que nous faisons dans la bande sahélo-saharienne où nous n’avons pas d’intérêts, y compris pour ce qui est de l’uranium que l’on trouve ailleurs. Il nous faut donc définir enfin, et très rapidement, nos intérêts stratégiques actuels et à long terme afin de savoir si, oui ou non, nous devons nous désengager, à quel niveau et, surtout, sans perdre la face.

    Plusieurs leçons doivent être tirées d’un colossal échec dont, il faut le redire, les décideurs politiques sont seuls responsables. À l’avenir, il nous faudra privilégier les interventions indirectes ou les actions rapides et ponctuelles menées à partir de navires, ce qui supprimerait l’inconvénient d’emprises terrestres perçues localement comme une insupportable présence néocoloniale. Une redéfinition et une montée en puissance de nos moyens maritimes et de nos forces de projection seraient alors nécessaires.

    Enfin et d’abord, nous devrons laisser l’ordre naturel africain se dérouler. Cela implique que nos intellectuels comprennent enfin que les anciens dominants n’accepteront jamais que, par le jeu de l’ethno-mathématique électorale, et uniquement parce qu’ils sont plus nombreux qu’eux, leurs anciens sujets ou tributaires soient maintenant leurs maîtres. Cela choque les conceptions éthérées de la philosophie politique occidentale, mais telle est pourtant la réalité africaine. Plus que jamais, il importe donc de méditer cette profonde réflexion que le gouverneur général de l’AOF fit en 1953 : « Moins d’élections et plus d’ethnographie, et tout le monde y trouvera son compte... » En un mot, le retour au réel, le renoncement aux « nuées », ce qui passe par la connaissance de la géographie et de l’histoire, et tel est le but de mon livre et de ses nombreuses cartes.

    Pour commander le livre cliquez ICI

  • Nord Stream, on y revient : Un ancien prix Pulitzer accuse les Etats-Unis d’avoir saboté Nord Stream

    Nord Stream.jpg

    Cliquez sur l'image pour écouter l'information relayée par TV LIBERTÉS

    Le journaliste américain Seymour Hersh, ancien prix Pulitzer, a publié sur son blog une enquête dans laquelle il affirme que le sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et 2, en septembre dernier, est le fait des Etats-Unis. La Russie s’est empressée d’appuyer ces allégations tandis que Washington a démenti avec force.

    Dans un post publié sur son propre blog, Seymour Hersh écrit que des plongeurs de l’US Navy, aidés par la Norvège, ont posé en juin des explosifs sur les gazoducs reliant la Russie à l’Allemagne sous la mer Baltique, déclenchant leur explosion trois mois plus tard.

    Les Etats-Unis ont catégoriquement rejeté l’article, qualifiant ces informations de «pure fiction». La Norvège a elle aussi nié toute implication. Le Kremlin a pour sa part saisi l’occasion de se faire l’écho de cet article: « Certaines choses (dans cette publication) sont contestables, d’autres ont besoin d’être prouvées, mais l’article est remarquable par son analyse profonde et son exposé harmonieux » des événements, a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

    « Il serait au moins injuste de ne pas y prêter d’attention, surtout pour un pays comme l’Allemagne qui a été privé de cette infrastructure énergétique cruciale à la suite de l’attentat » en septembre, a-t-il estimé. Pour Dmitri Peskov, l’article de Seymour Hersh montre « une fois de plus la nécessité d’une enquête internationale transparente sur cet attentat sans précédent ». « Il n’y a pas beaucoup de pays dans le monde qui puissent commettre de tels actes de sabotage », a-t-il ajouté.

    Les pays occidentaux avaient accusé la Russie d’être responsable de ces impressionnantes fuites de gaz précédées d’explosions sous-marines, ajoutant à la colère visant Moscou après le déclenchement de son offensive en Ukraine. La Russie accuse elle les « Anglo-Saxons » d’être derrière ce sabotage. Les enquêtes menées par les autorités suédoises, danoises et allemandes n’ont pas encore permis de déterminer de responsabilités.

    Dans son article, Seymour Hersh affirme que le président américain Joe Biden a lui-même décidé de faire exploser ces gazoducs afin de priver Moscou des revenus faramineux de ses ventes de gaz à l’Europe.

    L’enquêteur star désormais controversé

    Agé de 85 ans, le journaliste est l’un des plus célèbres reporters d’investigation américains. Il a notamment révélé le massacre commis par des militaires américains dans le village de My Lai pendant la guerre du Vietnam, ce qui lui a valu le prix Pulitzer en 1970.

  • L’Allemagne se détourne de la France : c’était à prévoir !

    France-Allemagne.jpg

    Le mythe de l’amitié franco-allemande est en train d’en prendre un coup. L’Allemagne est fatiguée de nos frasques et de nos éternelles explications pour démontrer que nous restons le stratège politique de l’Europe et elle le financier bienveillant.

    Depuis des dizaines d’années nous affirmons être d’égal à égal avec l’Allemagne. Or cela n’a jamais été le cas même si pendant les années 1990 le PIB par habitant était comparable.

    Entre-temps, l’Allemagne a récupéré sa sœur de l’est et l’a reconstruite. Bien sûr aussi avec les subventions européennes. Mais contrairement à la France qui telle la cigale chantant haut et fort en se désindustrialisant, l’Allemagne a continué de produire des machines-outils, des automobiles haut de gamme et même des chars Léopard dont elle a vendu 1500 exemplaires à la Grèce en pleine crise économique de cette dernière. La moraline française était remplacée par le pragmatisme et l’efficacité germaniques. L’Allemagne n’a pas eu besoin d’annuler des ventes de bateaux de guerre à la Russie pour raison de droits de l’Homme. Elle se contentait de faire du commerce sans vouloir redresser le monde et donner des leçons à toute la planète.

    Avec le Brexit, la France s’est soudainement retrouvée en face-à-face avec son puissant voisin.

    Avec la crise énergétique, l’Allemagne réagit enfin après s’être laissée embobiner par les Grünen destructeurs qui en réalité partageaient la vision très française d’un pays à nettoyer de toute pollution et puissance industrielles. Et elle s’en donne les moyens, ce que la France ne peut plus faire car fauchée, endettée, dirigée par des idéologues et des incompétents sans aucune vision d’avenir.

    Et voilà nos médias qui s’effarouchent de cette nouvelle arrogance allemande qui refuse de participer à la construction du SCAF avec la France, qui achète des avions américains, qui prépare un bouclier militaire en excluant la France, qui investit 100 milliards pour reconstituer son armée….

    Et hop ! la France s’affole ! Aucun doute que nos mêmes médias nous serviront bientôt le retour de l’ogre allemand…

    Or il n’y a rien à faire d’un pays qui s’applique à se ruiner lui-même…

    Cette arrogance politique doublée d’une piètre performance économique, l’Allemagne l’a docilement acceptée pendant longtemps car à la sortie de la dernière guerre mondiale on a interdit aux Allemands de penser et de se contenter de travailler pour reconstruire leur pays. Ce qu’ils ont fait…

    Ils ont donc progressivement remonté la pente tout en restant un nain politique, ce qui faisait se gonfler la grande nation.

    Aujourd’hui ce statu quo est rompu et le risque de partage de l’Europe est grand car les Hollandais, les Danois, les Polonais, les Hongrois et tous les nordiques ne croient plus non plus à la vision française de gestion du monde !

    Il est ridicule de voir notre Macron national tout excité en montant les marches des palais bruxellois et gesticulant devant un Scholtz ébahi de tant de gaieté d’un adolescent revenant d’un camp de vacances. Ou ce même Macron se féliciter par téléphone de la victoire de Lula au Brésil. On est un peu gêné d’un président si immature et si peu digne de sa fonction…

    Pour jouer au montreur d’ours encore faut-il qu’il y ait un ours et une France en déclin économique en perd tout crédit politique. Comme le disait à la droite défaite le député André Laigniel au début de la saga mitterrandienne : vous avez juridiquement tort car vous êtes politiquement minoritaires.

    C’est la position actuelle de la France face à l’Allemagne !

    Article tiré de Contrepoints

  • Élisabeth Borne et les élections italiennes : le paroxysme de l’arrogance des élites

    Borne.jpg

    Ma come ti permetti? » que l’on pourrait traduire par "Comment oses-tu ?" Ce cri d’indignation, une grande partie du peuple l’a sans doute exprimé en découvrant la réaction d’Élisabeth Borne à l’annonce des résultats des élections italiennes. En effet, notre Premier ministre, au micro d’Apolline de Malherbe, a tenté, avec une maladresse renversante, de mettre une tutelle « démocratique » sur le futur gouvernement de Giorgia Meloni :

    "En Europe, on porte un certain nombre de valeurs et bien évidemment, on sera attentif (avec) la présidente de la Commission européenne (Ursula von der Leyen), à ce que ces valeurs sur les droits de l’homme, sur le respect des uns et des autres, notamment le respect du droit à l’avortement, soient respectées par tous", a-t-elle déclaré sur la chaîne BFM TV. On saluera la grande habileté diplomatique qui consiste à crisper les relations avec notre voisin tout proche avant même la formation d’un quelconque gouvernement – qui prendra, rappelons-le, au moins un mois. L’Italie n’est pas exactement une obscure dictature d’Amérique centrale…

    Élisabeth Borne, visiblement, elle, sous la tutelle d’Ursula von der Leyen, a une fois de plus fait honte au peuple français. Nos élites sont si déconnectées, si incapables de décrypter, ou même essayer, humblement, de comprendre ce que le peuple italien a voulu dire dimanche dernier : elles ne comprennent déjà pas ce que ressent et vit le peuple français, cette dépossession d’une fierté nationale aujourd’hui perdue, oubliée, cachée ou au moins mise sous le boisseau… Confortablement installées dans les ZTL, ces zones à trafic limité de l’hypercentre des grandes métropoles, nos élites politiques dont Élisabeth Borne, malgré un parcours méritocratique, est devenu le symbole, se trouvent aujourd’hui confrontées, dans l’est de l’Europe mais aussi dans le nord, après les élections suédoises, et aujourd’hui au sud avec l’Italie, à un coup de semonce de plus en plus vigoureux.

    Et puis il y a, surtout, cette arrogance française, ce sentiment que l’élite, celle qui détient le pouvoir en France, enseigne à toutes les nations les lumières du progrès. Alimenté par des concepts fumeux – les valeurs européennes –, ce piège idéologique de l’État de droit devint la norme tout à la fois morale et juridique : chaque pays doit s’y conformer, abandonnant toute possibilité d’une véritable orientation politique des gouvernants. Au nom d’une « éthique » exclusivement progressiste à la valeur quasi religieuse, l’exercice de la souveraineté populaire doit s’effacer au profit d’une démocratie désincarnée, plastique, aux couleurs bleues et jaunes.

    "Cette déclaration est insignifiante", a rétorqué Fabio Rampelli, cofondateur du parti Fratelli d’Italia et fidèle entre les fidèles de Giorgia Meloni. Une réponse qui claque sèchement à la figure de notre Premier ministre, qui ferait peut-être bien de comprendre que le temps de la condescendance française envers nos cousins latins, ce sentiment de supériorité envers les Italiens, si partagé malheureusement dans la population française est terminé. Il est temps de traiter d’égal à égal avec ce pays fondateur de notre civilisation.

  • Macron attendu à l'ONU !

    Macron-ONU.png

    QUASIMENT VIDE !

    ***

    Aura-t-on encore longtemps la patience de supporter ces humiliations répétées ? Ce n'est pas une image que les médias aux ordres vont beaucoup diffuser : la salle de l'ONU pendant le discours d'Emmanuel Macron. Quand on vous disait que la France avait une influence inégalée ! Le monde tremble et s'incline lorsqu'elle parle

    Nous ajoutons le commentaire de Radu Portocala, qui exprime en quelques mots le désenchantement pour ne pas dire la tristesse de voir la France, autrefois "mère des arts, des armes et des lois", ainsi rabaissée.

    ***

    Je ne sais plus quel journal titrait l’autre jour : « Macron attendu à l’ONU ».

    La salle presque vide devant laquelle Je-suis-le-chef a fait son exercice oratoire en langue de bois montre que presque personne ne l’attendait.

    Macron n’intéresse presque personne, sa présence sur la scène internationale est négligeable. Qu’il soit ou qu’il ne soit pas là, qu’il parle ou qu’il ne parle pas, qu’il s’agite stérilement ou qu’il ne fasse rien – cela n’a aucune conséquence.

    Cela, en fin de compte, n’a pas grande importance. Ce qui est grave, c’est que son insignifiance, aussi vocale soit-elle, fait de la France un pays insignifiant, l’entraîne vers les tristes abîmes de la médiocrité.

    Comment a-t-il été possible que la France finisse par s’exprimer à travers une telle voix dérisoire ?   ■

  • « La souveraine qui, parce qu’elle échappait aux hasards de l’élection, était celle de tous ».

    Élisabeth.png

    Cet article est repris du site "Je suis français". Il devrait être, pour tous, un sujet de réflexion, alors que nous vivons dans un système dans lequel aucune politique pérenne ne peut être mise en œuvre, livrée au caprice de faux monarques successifs.

    ***

    TRIBUNE – Elizabeth II « sans jamais jouer les Jupiter ni, à l’inverse, s’abaisser à la posture humiliante du “monarque citoyen” », s’est imposée « comme un modèle discret de conservatisme spontané », fidèle au legs de grands esprits et d’hommes d’État éminents du Royaume-Uni, souligne Frédéric Rouvillois, professeur de droit constitutionnel et écrivain .

     

    C’est une chose singulière que de perdre une personne très chère et très âgée dont on avait toujours senti la présence bienveillante et qui avait fini par devenir une partie de nous-mêmes – au point de nous sentir perdus sans elle, et un peu orphelins.

    Quelques mois avant d’être fauché par la mitraille au tout début de la guerre de 14, c’est ainsi que Charles Péguy consacre quelques-uns de ses plus beaux vers à la mort de sainte Geneviève, patronne et protectrice de Paris :

    « Tout un peuple assemblé la regardait mourir

    Le bourgeois, le manant, le pâtre et le bouvier,

    Pleuraient et se taisaient et la voyaient partir (…)

    Et les durs villageois et les durs paysans

    La regardant vieillir l’avaient crue éternelle (…)

    L’amour de tout un peuple était tout son cortège ».

    Et au fond, c’est à ces vers dorés que fait penser la disparition de la reine, Elizabeth – leur reine, celle des Britanniques, mais qui, à force, avait fini par nous devenir si familière, qu’elle était aussi un peu la nôtre. La nôtre, parce qu’elle avait toujours été là, avec ses tailleurs pastel et ses chapeaux invraisemblables, son regard malicieux et son demi-sourire indulgent. Mais la nôtre aussi, parce que sans jamais jouer les Jupiter ni, à l’inverse, s’abaisser à la posture humiliante du « monarque citoyen », Elizabeth a toujours suivi sa voie et assumé son rôle, s’imposant ainsi comme un modèle discret mais convaincant de conservatisme spontané – ce qui, au pays de Burke, de Disraëli, de Chesterton ou de Churchill, était au fond la moindre des choses.

    Après soixante-dix ans de règne, la reine Elizabeth apparaît pourtant d’abord, dans les souvenirs de chacun, comme une mère de famille. Lorsqu’elle monte sur le trône à l’âge de 25 ans, elle a déjà deux enfants, un garçon et une fille, le choix de la reine en quelque sorte. Et c’est à cette aventure-là que s’intéressent surtout, à l’époque, les chaînes télévisées encore rudimentaires du monde entier : à la vie quotidienne d’une toute jeune reine qui est aussi une jeune maman et dont l’un des enfants sera roi lorsque le temps sera venu. Dans d’innombrables reportages en noir et blanc, on la voit donc au jardin qui s’occupe d’Ann et de Charles, comme on la verra quelques années plus tard, en couleur cette fois, être enceinte à nouveau, puis accoucher comme n’importe quelle autre mère.

    Or, la curiosité des spectateurs coïncide avec ce qui constitue le mystère et la clé du régime monarchique : car derrière la délicieuse banalité de la scène familiale, il y a le fait que ce qui caractérise d’abord une reine (ou un roi), c’est d’être, en un sens, des gens comme tout le monde. Au fond, Elizabeth aurait pu être infirmière ou agricultrice, mais le hasard ou la providence ont décidé qu’elle serait reine, ce qu’elle a assumé avec autant de bonne volonté, de sérieux et de simplicité que si elle s’était occupée de malades dans un hôpital ou de vaches dans une exploitation laitière. La reine est une personne comme tout le monde : et c’est en faisant comme tout le monde – c’est-à-dire, en donnant naissance à ses enfants et en essayant de les élever du mieux qu’elle le pouvait -, qu’elle a assumé du même coup la fonction politique capitale qui était la sienne : préparer sa propre succession au trône afin de garantir la stabilité du système et la continuité de l’État.

    Dans une monarchie, le personnel ne se dissocie pas du politique, et ces deux rôles inextricablement liés, la reine Elizabeth les a assumés de façon exemplaire : en tant que mère, puis grand-mère et arrière-grand-mère (et même, quoique la chose fut plus difficile, en tant que belle-mère), elle a su incarner charnellement la nation dont elle était symboliquement le chef : et au-delà, personnifier un système, la monarchie, où le chef, parce qu’il échappe aux hasards de l’élection, est véritablement celui de tous – de même qu’une mère, n’ayant pas été choisie par une majorité
    de ses enfants, est réellement celle de chacun d’entre eux.

    La reine de tous, sans distinctions et sans discontinuité : là encore, Elizabeth a incarné l’un des traits spécifiques de la royauté, sa projection dans la longue durée. Et ce faisant, sa capacité à représenter, pour tous ses sujets, un point de repère commun et immuable, un élément unificateur, stable et rassurant, particulièrement utile en temps de crise ou de mutations majeures.

    Sur ce plan, on l’a souvent comparée à son aïeule Victoria. Devenues reines, l’une à 18 ans, en 1838, l’autre à 25 ans en 1952, toutes deux vont connaître des périodes troublées assombries par des révolutions profondes dans tous les domaines. Toutes deux seront amenées à régner sans gouverner, ce qui est le propre d’une monarchie parlementaire, mais l’une et l’autre parviendront à accompagner le mouvement sans se laisser dépasser par sa violence, et ce faisant, contribueront avec une efficacité discrète à canaliser son potentiel explosif. De Churchill à Liz Trussdu processus de décolonisation à l’intégration européenne puis au Brexit, de la guerre civile en Irlande du Nord au référendum écossais, des Malouines à l’Afghanistan, du terrorisme de l’IRA à celui des islamistes, la reine Elizabeth II, par ce qu’elle incarnait, n’a même pas eu besoin d’intervenir pour désamorcer les conflits, ni de décider pour favoriser la résilience.

    Comme l’emblématique bobby de la police britannique, qui traditionnellement n’était armé que de son sifflet et d’un bâton blanc, la reine a su montrer que la présence est déjà une puissance. Et peut-être une puissance supérieure. La chose n’a jamais paru aussi évident qu’en ce soir du 5 avril 2020, au tout début de l’épidémie de Covid, lorsque, vêtue d’un tailleur vert gazon, elle vient prononcer à la télévision quelques mots simples appelant les Britanniques à l’union, à l’espoir et à la résistance. Des mots que seule une reine et une mère pouvait prononcer sans qu’on les soupçonne d’hypocrisie ou d’arrière-pensées électoralistes.

    Une reine et une mère qui s’est demandé chaque jour, durant sept décennies, quelle serait la meilleure solution pour ses enfants et ses sujets : ce qu’il fallait maintenir coûte que coûte, et à quoi l’on pouvait renoncer sans se perdre. Sans doute est-ce pour cela qu’elle est parvenue, malgré les risques, les obstacles et les tragédies, à maintenir, c’est-à-dire à conserver l’essentiel.

    Et sans doute est-ce pour cela qu’elle demeurera dans les cœurs à la place singulière qui restera la sienne : "l’amour de tout un peuple était tout son cortège ".  

    Délégué général de la Fondation du Pont-Neuf (think-tank) et auteur de nombreux ouvrages remarqués, Frédéric Rouvillois a notamment publié Histoire de la politesse de la Révolution à nos jours (Flammarion, 2006), Histoire du snobisme (Flammarion, 2008), L’Invention du progrès, 1680-1730. Aux origines de la pensée totalitaire (Éditions du CNRS, 2011) et Liquidation. Emmanuel Macron et le saint-simonisme. (Éditions du Cerf, 2020). Pour s’informer de ses travaux et publications, suivre le lien ci-dessous.

    Frédéric Rouvillois