G-BDQD17ZWM0

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Idées

  • Notre civilisation ne serait pas de culture chrétienne ? Ah bon !

    Au début d'une année qui s'annonce difficile, il nous a paru opportun de s'évader du médiocre spectacle quotidien de nos saltimbanques de plateaux et montrer quelques unes de nos plus belles abbayes, afin de ne pas oublier, au-delà de ces pitoyables et insignifiantes chamailleries politiciennes, l'essentiel de ce que nous avons à préserver. 

    La lutte contre l'ennemi de l'intérieur est désormais l'affaire de tous.

    1-Mont Saint-Michel.JPG

    2-Moissac.JPG

    3-Fontfroide.JPG

    4-Saint Trophime Arles.JPG

    5-Fontenay-Bourgogne.JPG 

    6-Nieul surl'Autise-Pays de Loire.JPG

    7-Tréguier-Bretagne.JPG

    8-Noirlac-Centre Val de Loire.JPG

    9-Cadouin-Nouvelle Aquitaine.JPG

    10-La Grande Chartreuse-Auvergne Rhône-Alpes.JPG

    11-Corbara-Corse.JPG

    12-Royaumont-Ile e France.JPG

    13-Valloire-Haut de France.JPG

    14-Wissenbourg-Grand Est.JPG

  • Pourquoi ne pas reprendre une équipe qui perd ?

    Autruche.jpg

     

    Il est fort probable qu’ils recommencent. Qui ? les black blocs ? les voyous des territoires de non-droit ? les racailles de tout bord ? les immigrés en mal de révolte ? Non, bien sûr que non. Eux, ils vont continuer de plus belle, sans le moindre complexe ni la plus petite opposition.

    Après l’affaire de Nanterre et les exactions qui ont suivies, le ministère de l’intérieur a donné des instructions à la police : "ne répondez pas aux provocations, n’allez pas au contact, ne prenez pas de risques, faites-vous discrets, levez le pied", ajoutant que "toute prise en charge de véhicule (suite à un refus d’obtempérer…) est proscrite jusqu’à nouvel ordre". 

    Moussa Darmanin peut compter sur l'aide du syndicat de la magistrature, considérant comme établies les "violences policières", demande l’abrogation de la loi permettant l’usage des armes en cas de refus d’obtempérer, et la création d’un service d’enquête indépendant "chargé de veiller à la déontologies des forces de l’ordre". Il aura aussi l'appui des députés de la France insoumise dénonçant les communiqués des syndicats de policiers « tendant à faire entrer une partie de la police dans une dynamique de guerre civile ». Il aura l'appui également de quelques responsables syndicaux scandalisés par un texte de policiers invitant les forces de l’ordre à combattre les émeutiers qualifiés de « nuisibles ». Dans les tractations à visées électoralistes - il faut bien conserver les places - il ne craindra pas non plus les LR et autres "Horizons". Sans parler de l’ONU — de quoi se mêle-t-elle ? — qui demande à la France de se pencher sur les problèmes de racisme parmi les forces de l’ordre ! Pendant ce temps 39 locaux de police, 16 casernes de gendarmeries, 119 bâtiments publics ont été violemment attaqués, 79 policiers et gendarmes blessés, 2560 incendies…

    On ne voit pas pourquoi toutes ces racailles se gêneraient !

    Non, ceux qui vraisemblablement recommenceront, ce sont ces naïfs, ces crédules, incorrigibles pigeons, se disant, comme dans une rengaine défraîchie à force d'être ressassée, démocrato-républicains, pusillanimes et craintifs, éternels déçus à la recherche, depuis plus de deux siècles, de l'homme providentiel, pris de panique pour leurs quatre sous, à la veille de chaque élection. D’une réflexion politique plus que limitée, formatée aux nouvelles de 20 h., spécialistes de la politique de l'autruche, ils estimeront inconvenant d’évoquer Marine Le Pen ou Éric Zemmour. Cela ne se fait pas dans les « dîners en ville » ou dans les réceptions entre gens raisonnables. Pensez donc ma bonne dame, vraisemblablement des fachos nostalgiques, des excités « d’esssstrême droooiiiite ». Non vous n’y pensez pas, avec eux ce serait le chaos assuré, la faillite économique, la mise à l’index des nations.

    Alors ils revoteront pour les mêmes, pour ceux qui ont fait preuve d'un courage et d'une science politique inégalées, les Giscard et son regroupement familial, les Chirac et son fameux "le premier problèmes est de maîtriser l'immigration !", les Sarkozy qui ne voulait recruter que "des immigrés hautement qualifiés !" et passer les autres au Karcher, les Hollande qui annonçait dans son programme "Je conduirai une lutte implacable contre l’immigration illégale !" et enfin Macron, vous savez celui qui a mis l’économie française à genoux en dilapidant au profit des États-Unis et de l’Allemagne nos plus belles entreprises, qui détruit l’éducation nationale, qui a été mis à la porte de l’Afrique, méprisé par Poutine et ridiculisé par Xi Jinping, insulté par l'Algérie, responsable de la guerre civile qui s’approche : « Nous étions à côté, nous serons en face » lui avait pourtant prédit son ancien ministre de l’intérieur. Tous ces pantins et Macron, c'est évidemment beaucoup plus sérieux ! 

    Il y a des moments où on se demande s’ils méritent d’être défendus…

    Henri Bec

  • « Les Français qui ont coupé la tête de leur roi restent au fond, d’instinct, monarchistes » Guillaume Tabard (Le Figaro)

    Poutine-Versailles.jpg

    Le 29 mai 2017, Emmanuel Macron vient de s’installer à l’Élysée

    et reçoit Vladimir Poutine à Versailles. 

     

    Cet article est paru dans le Figaro. Décidément, l'idée apparaît de plus en plus souvent dans des organes de presse d'obédiences différentes. Il est vrai que les moments difficiles que nous connaissons, et qui nous font craindre le pire pour l'avenir, portent naturellement à évoquer ce que maints journalistes ne cessent de nommer, à juste titre, "une crise de régime".

    *****

     

    Par Guillaume Tabard - Le Figaro

    Tabard.pngLe roi Charles III n'est pas venu en France. Le climat social a eu raison de ce qui devait être la première visite à l’étranger du nouveau roi d’Angleterre. Outre la menace de débordements violents, il y avait aussi la crainte de l’impact d’images trop somptueuses du dîner d’État dans la galerie des glaces du château de Versailles.

    Ce rendez-vous manqué m’a rappelé un autre accueil à Versailles : celui de Vladimir Poutine. C’était le 29 mai 2017. Emmanuel Macron venait de s’installer à l’Élysée et la venue du président russe était son premier acte de portée internationale. C’était évidemment bien avant l’invasion de l’Ukraine, mais déjà les relations de «l’Occident» étaient tendues avec le président russe. Celui-ci était même suspecté d’avoir tenté, par quelques officines, de s’immiscer dans la campagne présidentielle française.

    Macron, disons-le sans détour, en avait jeté plein la vue à Poutine. C’était l’objectif : montrer qu’un jeune président de moins de 40 ans était capable de toiser le tsar tout-puissant. Et Versailles était la vitrine de cet orgueil français retrouvé. Dans la galerie des batailles du château de Louis XIV, c’était le témoignage d’un grand pays qui s’imposait au président russe.

    Les commentaires avaient été unanimes. «Chapeau !», avait concédé toute la classe politique, des mélenchonistes aux lepénistes. Au moins, ce nouveau président avait du cran, du panache et de l’audace. Au moins ranimait-il une réelle fierté française sur la scène internationale. Ce jour-là, Versailles fut mis au crédit de Macron. Nul n’a songé à dénoncer un chef de l’État hautain, arrogant ou mégalo. Dans la lignée de sa soirée de victoire à la pyramide du Louvre, de son installation solennelle à l’Élysée, cet accueil au château le plus visité d’Europe faisait dire qu’après le quinquennat de François Hollande, Emmanuel Macron redonnait du panache à la fonction.

    Six ans plus tard, que reste-t-il de tout cela ? C’est la difficulté à garantir les conditions d’un bon accueil à Charles III qui a justifié ce report. Mais au fond, pour Macron, Versailles n’est plus possible. Ce niveau maximal de solennité avait été mis à son crédit ; il serait mis aujourd’hui à son débit. Comme un symbole de sa déconnexion d’avec le peuple. Comme une provocation à l’égard des Français dans la difficulté. Comme l’expression de sa prétention. Indépendamment des risques en matière de sécurité, l’image de la splendeur royale, la richesse de la vaisselle, la splendeur du décorum auraient été présentées comme un entre-soi méprisant, voire insultant pour le commun des mortels.

    C’eût été injuste. Et les Français qui ont coupé la tête de leur roi restent au fond d’instinct monarchistes. Ils critiquent et jalousent les riches et les puissants, mais savourent la magnificence de Versailles et des châteaux de la Loire. La posture régalienne est applaudie quand tout va bien, et vilipendée quand tout va mal. Elle suscite de la fierté quand la popularité est encore là ; elle provoque du rejet quand l’impopularité a pris le dessous. Versailles, aujourd’hui est interdit à Emmanuel Macron.

    Au fond, en leur président actuel, les Français, en 2017, s’étaient inclinés devant Louis XIV. En 2022, ils stigmatisent Louis XVI.

    Bon courage à tous en ces moments incertains.  

  • Le Figaro : « Requiem, marche aux flambeaux… Cette jeunesse de France qui vibre au souvenir de Louis XVI »

    Marche.jpg

    Nous reproduisons ici une article paru dans la Figaro le 21 janvier dernier.

    *****

     

    Maillot.jpg

    Chaque année, le 21 janvier, quelques milliers de jeunes se réunissent dans la rue et dans les églises pour commémorer la mémoire du roi guillotiné. Un engagement qui associe spiritualité et volonté politique.

    Ringard, le royalisme ? S’il n’était pas rare de croiser des monarchistes au siècle dernier, leur existence aujourd’hui est perçue comme une incongruité par une majorité de Français. Quand ils ne sont pas considérés comme une dangereuse mouvance d’extrême-droite. Pourtant, d’après un sondage BVA paru en 2016, 17% des Français verraient bien la fonction présidentielle être assurée par un roi. Un chiffre identique à celui d’un autre sondage, datant de 2007, confirmant qu’il existe bien une base royaliste établie et stable.

    Chaque 21 janvier, la France redécouvre ses royalistes, presqueMarche aux flambaux.jpg avec étonnement. À cette date, il y a tout juste 230 ans, le roi Louis XVI était guillotiné place de la Révolution (actuelle place de la Concorde) par les révolutionnaires. Tous les ans, monarchistes ou simples passionnés d’Histoire commémorent la mémoire du souverain qu’ils considèrent "martyr". Ce samedi encore, des messes de requiem auront lieu dans toute la France, et une marche aux flambeaux se rendra à la Chapelle expiatoire, où furent inhumés Louis XVI et Marie-Antoinette en 1793.

    Quelque chose de sacré

    Loin des caricatures mais légèrement anachroniques, ces événements ne rassemblent pas que des vieillards réactionnaires. «Une multitude de jeunes gens, désireux d’être en lien avec leur Histoire», se rendent par exemple chaque 21 janvier à l’église Saint Eugène-Sainte Cécile, dans le 9e arrondissement de Paris, souligne le Père Jean-François Thomas, prêtre jésuite qui y prononcera l’homélie ce samedi. Mais aussi à l’église Saint-Germain l’Auxerrois, dans le 1er arrondissement. Cette dernière réunit surtout la branche orléaniste, qui désigne la maison d’Orléans comme héritière des rois de France.

    Certains prennent l’événement très au sérieux. La journée de Madeleine, professeur d’histoire-géographie au lycée, sera "littéralement dédiée à cette commémoration". Vêtue de noir en signe de deuil, la jeune femme de 27 ans, ancienne militante de l’AF, ira déposer une gerbe le matin place de la Concorde. Comme tous les ans depuis sa majorité, elle se rendra ensuite à la messe à Saint-Germain l’Auxerrois et rejoindra en fin de journée la marche aux flambeaux organisée par le collectif du Souvenir de Louis XVI. Cette association, créée il y a quatre ans par une bande de copains, entend "raviver l’image de la monarchie en rendant hommage au roi martyr".

    Marche-2.png"C’est presque une dimension de fête religieuse, explique-t-elle. Il y a quelque chose de très sacré dans cette journée, que je vis comme une sorte de pèlerinage en solitaire". Robin, 21 ans, étudiant en histoire originaire du Nord, et actuellement en reconversion pour devenir artisan brasseur, a anticipé les grèves pour se rendre à Paris et ne pas manquer les commémorations. Lui aussi ressent cette dimension spirituelle : "Il y a quelque chose d’assez christique dans la mort de Louis XVI, un côté sacrificiel", estime-t-il. Un raisonnement que ne réfutera pas le Père Thomas : "Pour un catholique monarchiste, il est important de prier pour les morts et le salut de l’âme du défunt".

    Monarchie contre république

    Mais cette journée du 21 janvier est également éminemment politique. «Organiser des messes est très respectable, mais cette journée n’est pas seulement une commémoration», confirme Antoine, 20 ans et membre du Souvenir de Louis XVI. «L’association a été fondée pour réunir une jeunesse qui voit dans la monarchie l’avenir de la France», confie le jeune homme, lui aussi étudiant en histoire. «Le but, c’est vraiment d’attirer les curieux non-royalistes, qui s’intéressent à l’Histoire», abonde Henri, un ingénieur de 25 ans, cofondateur du collectif. Organisée depuis quatre ans, la marche aux flambeaux a réuni plus de 1000 personnes l’année dernière, selon lui. Elle sera suivie ce samedi d’une soirée sur une péniche parisienne.

    Outre la restauration de la monarchie, les royalistes de tous horizons entendent œuvrer pour la défense de l’intérêt national, en attendant le retour du roi. Le patriotisme est au cœur de leur combat, et c’est en ce sens qu’ils sont fréquemment désignés comme "nationalistes" ou d’"extrême droite".

    La marche aux flambeaux du 21 janvier a d’ailleurs pour vocation de marquer les esprits, et de faire passer des messages. "On n’y réclame pas le retour du roi, ce serait s’illusionner", sourit Madeleine. Mais "l’action de Louis XVI pourrait inspirer des gouvernances aujourd’hui, à une époque où le 49-3 et les décisions unilatérales sont devenus la norme", suggère Robin, qui se rendra aussi à la marche pour "rappeler que la République n’a pas fait la France". "Quand on voit la répression dans les manifestations de "gilets jaunes" ou contre la réforme des retraites, on ne peut que constater la perversité du régime politique actuel", ajoute Henri, rappelant que «Louis XVI n’avait pas voulu faire tirer sur la foule aux Tuileries».

    Goût de l’Histoire et volonté politique

    Ces jeunes monarchistes affirmés ont un point commun : le goût et la passion de l’Histoire. Madeleine a été bercée enfant par la Petite Histoire de France de Jacques Bainville, historien monarchiste et figure majeure de l’Action française. Née dans un environnement familial très royaliste, on lui a "toujours appris à considérer la monarchie". Robin s’est, lui, forgé tout seul, sans héritage particulier : "J’ai découvert le royalisme et la pensée politique avec mes cours de philo de terminale et je les ai trouvé très pertinents".

    Et en dehors du 21 janvier ? Certains sont engagés politiquement, à l’Action française ou "dans des mouvements politiques plus actifs aujourd’hui". D’autres pensent à s’engager car "la politique est l’affaire de tous : nous sommes des hommes dans une cité". "Aujourd’hui, plus que de militer dans la rue, le fait d’incarner des idées et de les accorder avec ses actes possède un vrai sens politique", assure Robin. "La jeunesse a soif d’avoir des racines, de retrouver un terreau dans lequel s’ancrer", résume le Père Thomas en guise de conclusion. ■ 

    Hugues Maillot

  • Le général Monk est-il d'actualité ? Oui nous dit Pierre Boutang

    pierre_boutang.jpg

    L'actualité nous donne l'occasion de publier une nouvelle fois cet entretien avec le grand philosophe Pierre Boutang qui a été titulaire de la chaire de métaphysique à la Sorbonne de 1976 à 1986. Ses écrits politiques sont innombrables et toujours empreints d'une réflexion qui surprend par sa profondeur, alors que nous subissons la médiocrité abyssale des esprits, surtout celle de nos dirigeants.

    Il reprend ici l'image de Monk, général anglais (1608-1670) qui contribua à la restauration du roi Charles II d’Angleterre mettant fin à la république de Cromwell. C'est aujourd'hui Charles III qui va régner.

    Une vidéo de huit minutes de belles vues pour le présent et surtout pour l'avenir.

    Pour visionner l'entretien, cliquez ICI

  • Une analyse plus que pertinente !

    Assemblée.jpg

    Ce blog essaie, depuis sa création, sept ans déjà, de sélectionner les meilleures analyses, afin de sortir des médiocres déclarations politico‑politiciennes qui encombrent nos écrans. En voilà une qui n'est pas passée inaperçue !

    ***

    En mettant la Constitution au-dessus du peuple, Macron affirme tranquillement que celui-ci n’est pas souverain. Évacuée, la fiction républicaine ! Et avec elle, la nécessité de se sentir obligé par la patrie charnelle.

    ***

    Par Jean-Luc Coronel de Boissezon

    Coronel.jpgLe propos est passé inaperçu de beaucoup, alors qu’il est déterminant pour comprendre ce que représente le président nouvellement réélu du point de vue politique, spécialement à la lumière des critères du droit public. C’était à la fin du morne débat télévisé d’entre-deux-tours. À partir de 2 heures, 40 minutes et dix secondes, on put entendre en effet l’échange suivant :

    – Marine Le Pen : « Mais écoutez, le souverain, c’est le peuple, c’est dans notre Constitution. Le seul souverain, c’est le peuple, c’est pas le Conseil constitutionnel, c’est pas c’qu’y a marqué ! ».

    – Emmanuel Macron : « Non, c’est la Constitution, Madame Le Pen ».

    Rarement le choc des conceptions politiques aura été plus frontal : populisme d’un côté, ne s’épargnant pas le topique d’une expression relâchée, mais parfaitement ferme sur son principe ; de l’autre, une idéologie antipopulaire qui ne s’était jamais aussi nûment trahie chez un président de la Ve République. Ce n’est rien de moins que la Constitution de cette dernière que M. Macron a foulée aux pieds à l’instant où il prétendait s’en réclamer. On sait en effet que le texte du 4 octobre 1958 dispose, en son article 3 : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. » Mme Le Pen ne faisait que rappeler l’évidence. En la niant explicitement, dans l’un de ces moments de relâchement de la duplicité politicienne qui font le rare intérêt de ce genre de débat, M. Macron a dévoilé brutalement ce que tout observateur attentif a pu constater non sans vertige : l’actuel chef de l’État est en réalité une manière de factieux, refusant de reconnaître le souverain qui seul lui a pourtant délégué l’exercice du pouvoir.

    Il ne saurait s’agir, dans la bouche d’Emmanuel Macron, d’un lapsus : à la parole, il joint le geste qui la confirme, que l’on peut revoir sur l’image télévisée. Levant sa main gauche au-dessus de sa tête, il trace de son index une barre de niveau, signifiant ainsi que la Constitution est au-dessus de celui du peuple. L’index est en l’air ; le souverain auquel fait allégeance M. Macron ne l’est pas moins. C’est une pure abstraction. Sa fonction est précisément de vider de sa substance la souveraineté, de liquider le souverain concret, d’en finir avec la corporéité du peuple historique, d’effacer la patrie charnelle.

    Censurer la volonté du peuple

    Cette opération de neutralisation vient cependant de loin et a été suffisamment cultivée par un certain courant juridique et politique pour expliquer l’aplomb avec lequel le garant supposé des institutions a pu contrevenir verbalement à la disposition fondamentale du texte constitutionnel. Il n’était que de lire les tribunes de juristes favorables au pouvoir en place dans l’entre-deux-tours. Leur obsession est d’empêcher le recours à l’art. 11 pour toute révision de la Constitution, afin que ne s’impose que l’art. 89, qui a, à leurs yeux, l’avantage de soumettre tout projet de révision au vote préalable, en termes identiques, de l’Assemblée nationale et du Sénat. En bref, d’empêcher le peuple de modifier la « loi suprême » qu’il s’est pourtant donnée, donc le texte qui précisément lui attribue la souveraineté !

    Comment un tel projet d’enfermement du peuple dans la prison d’une expression temporaire de sa volonté peut-il être justifié ? Tout une école juridique y œuvre depuis une quarantaine d’années, dans le but de voir « la politique saisie par le droit », selon l’expression de l’initiateur que fut en la matière le doyen Louis Favoreu. Ce courant confie aux juges, spécialement aux cours constitutionnelles, le pouvoir de censurer la volonté du peuple, exprimée par ses représentants dans la création de la loi. Ne pouvant se donner librement sa loi, ce qui est la définition étymologique de l’autonomie, le peuple est traité en mineur, nécessitant un ou plusieurs tuteurs. La « première marque de la souveraineté » selon Jean Bodin, à savoir le pouvoir de faire et casser la loi, est ainsi bridée par un pouvoir judiciaire, non élu quant à lui, ne représentant en rien le souverain. Sa légitimité résiderait dans son statut constitutionnel, autrement dit sa présence dans la norme suprême ; le peuple se méfiant de lui-même aurait pourvu à ses dérives prévisibles en se dotant d’un contrôle de constitutionnalité. La vérité est, en tout cas en France, tout autre : les constituants de 1958 ne prévoyaient pas du tout un contrôle extensif de la loi par le Conseil constitutionnel sur la base de vagues principes tirés de Déclarations et de Préambules ; on sait que les juges constitutionnels se sont arrogés ce pouvoir par la décision du 16 juillet 1971. Le peuple ne leur avait rien demandé ; pas davantage ne leur avait-il concédé un tel pouvoir au moment d’approuver la Constitution.

    Le référendum est contraire à la démocratie !

    L’idée d’une telle usurpation sourdait elle-même de l’imprégnation doctrinale du normativisme de l’Autrichien Hans Kelsen, introducteur dans le droit constitutionnel des fictions du kantisme, théoricien d’une « théorie pure du droit » et d’une « hiérarchie des normes » dans laquelle la validité de toute norme est… d’être conforme à une autre norme. Dans ce système qui dissout la légitimité dans la pure légalité bureaucratique, la Constitution elle-même qui est le sommet de son système pyramidal ne découle pas de la volonté du peuple – politique, donc non juridique, et par là-même « impur » – mais d’une imaginaire « Grundnorm » de nature « logico-transcendentale » : la Raison des Lumières, implicitement accessible aux seuls esprits rationalistes d’élite, la dicterait. En Allemagne, sous l’effet de la culpabilisation consécutive à la Seconde guerre mondiale, cette doctrine de suspicion de la volonté politique, tout particulièrement de la volonté populaire, a débordé le champ juridique pour envahir les sciences sociales, aboutissant à la théorie du « patriotisme constitutionnel » de Jürgen Habermas : les citoyens ne sauraient oser se réclamer d’une appartenance, d’une patrie, que si celle-ci est de papier, abstraite, universelle, ouverte à tous – et dès lors privée de toute réalité substantielle. Proche de la classe politique allemande actuelle, M. Macron n’est pas insensible aux avantages de ce discours, qui aboutit à la vulgate orwellienne répandue dans les médias qui le soutenaient unanimement ces dernières semaines, selon laquelle « le référendum est contraire à la démocratie » !

    Mme Le Pen ne pouvait inquiéter M. Macron en lui faisant remarquer que, si le recours à l’art. 11 était inconstitutionnel, l’autorité du président de la République serait privée de fondement depuis 1962. La fin de l’élection présidentielle au suffrage universel direct est précisément ce dont rêve le progressisme oligarchique – pléonasme, en réalité – pour lequel l’idéal serait que le chef de l’État fût à nouveau désigné par une élite.

    L’hostilité constante à la possibilité d’une expression directe du peuple est apparue comme la dominante de la perspective macronienne, comme la suite de l’échange entre les deux candidats de second tour l’a montré :

    — MLP : « Aimons la démocratie, aimons la volonté du peuple directement exprimée... »

    — EM : « Donc vous venez vous-même de proposer une formule qui éradique le rôle de l’Assemblée nationale. » […]

    — MLP : « M. Macron, pardon de vous dire que, encore une fois le peuple est souverain… ».

    — EM : « Et l’Assemblée le représente ».

    Par ses réponses, le président en exercice ne confirmait pas seulement son inouïe dénégation des termes de l’art. 3 ; il trahissait en outre son intime conviction que les députés, quant à eux, ne représentent pas véritablement le peuple et qu’ils sont précisément en place pour ce motif dans la perspective libérale, para-censitaire et pseudo-épistocratique – sans quoi il n’eût pas opposé leur action à celle du référendum qui manifestement l’effraie, en tant qu’expression du peuple réel. C’est que la délégation de souveraineté ne peut que cesser dès lors que le souverain paraît. Les institutions refondées par le général de Gaulle, de sensibilité monarchiste, renouaient clairement en cela avec la royauté capétienne : le référendum est l’analogue du lit de justice qui suspendait le pouvoir délégué aux cours de parlements, comme l’élection par l’onction populaire est l’analogue du rituel du sacre. Dans le sein du peuple dont est originellement sorti le roi, la royauté est retournée comme en un sommeil de la manifestation du politique. Le peuple ressortit au sacré comme le roi qui l’incorporait autrefois. La quintessence de la politique libérale qu’incarne méticuleusement M. Macron est de le circonvenir par une oligarchie bourgeoise. À cet égard, le pouvoir reconduit le 24 avril dernier réitère en toute logique l’usurpation première : celle qui, le 17 juin 1789, vit quelques cinq-cents bourgeois rompre avec les mandats impératifs qui leur avaient été confiés par leurs électeurs, pour se déclarer sans les consulter « représentants de la Nation », ce qui était la façon la plus durablement habile de prendre le pouvoir au roi sans le rendre au peuple.  

    Cet article est paru dans Politique magazine

    PM214-une.png

     

    Cliquez sur l'image pour accéder au site.

  • Le piétinement par la Russie des fondements éthiques et politiques de l’Occident moderne

    Poutine-Merkel.jpg

    C’était le bon temps où Poutine pouvait croire que l’Allemagne pacifiste et financière allait lui permettre de se raccrocher à l’Europe.

     

    De tels articles nous changent des fatigantes banalités dont la presse nous rebat quotidiennement les oreilles. Celui-ci aborde brillamment la question de fond. À lire.

     

    Par Yves Morel.

    L’Occident s’est toujours rêvé maître du monde. La Révolution française, la Deuxième Guerre mondiale et la création de l’Union européenne ont renforcé cette prétention universaliste… mais le monde multipolaire résiste ou tout simplement esquive. Le nationalisme n’est pas mort, le libéralisme n’est pas embrassé, l’autoritarisme est plébiscité,… L’Occident avait renoncé à lui-même, le reste du monde ne l’a pas suivi.

    Ce qui nous intéresse ici, dans la guerre russo-ukrainienne, est la gifle monumentale que l’Occident tout entier vient de recevoir dans les principes éthiques qui sous-tendent sa civilisation et sa politique.  Depuis 1945, – et cela avait commencé dès le lendemain de la Grande Guerre avec l’absurde reconstruction de l’Europe suivant les Quatorze points de Wilson, et, dans le cas de la France, dès la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 – l’Occident vit sous l’empire d’une éthique prétendument généreuse totalement irréaliste et, par là même redoutablement pernicieuse.

    Une gifle monumentale à l’éthique politique occidentale

    Cette éthique vient de recevoir sa plus grande rebuffade depuis 1945. On peut affirmer, sans exagérer, que jamais, depuis trois quarts de siècle, elle n’avait été à ce point bafouée et démentie, et que nul chef d’État n’avait mis au pied du mur et réduit à l’impuissance les pays et les dirigeants se réclamant d’elle comme vient de le faire Vladimir Poutine en ignorant leurs objurgations, et en envahissant l’Ukraine tout en les prévenant contre les conséquences terribles qui découleraient de leur éventuelle assistance militaire au pays agressé. Les Occidentaux sont placés par le moderne tsar dans une situation cornélienne. Qu’ils secourent militairement l’Ukraine, et le monde s’embrase. Quant à leurs sanctions économiques, si elles incitaient tout de même le maître du Kremlin à composition, ce serait au prix d’une défaite politique sans précédent pour eux. Ils ne parviendraient en effet à assouplir Poutine qu’en acceptant la finlandisation de l’Ukraine et l’installation à Kiev d’un gouvernement fantoche tout dévoué à Moscou. Poutine triompherait, et la bonne morale occidentale serait récusée. Vaincue. Et, dès lors qu’elle est vaincue par la force brutale, la morale perd sa crédibilité comme source d’inspiration et étai de l’action politique. Ce n’est pas à dire qu’elle n’y a pas sa place. Mais le principe de réalité prévaut et l’action politique piétine souvent la morale.

    L’illusion universaliste des démocraties libérales

    La morale politique occidentale est d’ailleurs entachée du péché d’orgueil. W.E. Gladstone, grand Premier Ministre britannique du XIXe siècle, se croyait choisi par Dieu pour faire régner la justice dans son pays. Il semble en aller de même des Occidentaux pour le monde moderne. Eux considèrent leur civilisation et leur système démocratique et libéral comme la norme politique de ce dernier, conforme au Droit et à la Morale universels.

    Les Occidentaux ont toujours pensé que toute l’histoire devait se terminer, en guise de but, par l’extension à la planète entière de leur type d’organisation sociale et politique.  Ainsi, lors de l’effondrement du communisme en Europe orientale et en URSS, Francis Fukuyama, haut fonctionnaire américain de l’administration Reagan, énonça doctement que cet événement marquait l’unification du monde autour du système politique de la démocratie libérale, désormais seule debout dans les pays évolués, et donc triomphante, l’alternative marxiste ayant disparu (ainsi que, beaucoup plus tôt, les nationalismes antilibéraux de type fasciste), et que nous entrions dans un monde sans Histoire, en lequel les nations ne s’affronteraient plus et ne connaîtraient d’autre évolution que celle du marché mondial. Il fit connaître ces vues dans un article intitulé The End of History, dans la revue américaine The National Interest) en 1989, dont il tira un livre, La fin de l’Histoire et le dernier homme, en 1992. Il s’inspirait largement de la théorie de la fin de l’Histoire, développée par Hegel dans ses Leçons sur la philosophie de l’Histoire et La Raison dans l’Histoire (1837).

    Simultanément, Jacques Julliard, historien et journaliste politique français, énonçait hâtivement, en divers articles, l’idée suivant laquelle l’effondrement du communisme russe et européen marquait l’union du monde autour de l’idéal libéral et démocratique étayé sur les Droits de l’Homme. Il affirmait que le XXe siècle était né à l’occasion d’une guerre, celle de 1914, et venait de prendre fin à l’automne de 1989, avec l’écroulement du communisme en Europe orientale et sa libéralisation croissante en URSS, où Gorbatchev, avec sa Perestroïka, l’expurgeait de sa réalité dictatoriale et l’amenait à se renier. Rejoignant Fukuyama, il annonçait le tout proche avènement d’un monde nouveau uni autour de l’ONU et de ses organisations satellites, pour le plus grand bonheur du genre humain.

    La morale politique occidentale démentie par le principe de réalité

    Les trente dernières années ont balayé ces fadaises comme fétus de paille, et l’on a vu l’affirmation des nationalismes en Europe orientale, en Russie, en Chine, suivant des orientations politiques en tous points opposées à celles des démocraties occidentales. La Chine, en particulier, donne aujourd’hui l’exemple d’une grande puissance (peut-être appelée à devenir la première du monde) non démocratique et non libérale, quoique capitaliste. Et nous nous souvenons de la guerre atroce des années 1990 entre les peuples de l’ancienne Yougoslavie. Et nous pourrions cumuler les exemples tendant à montrer que la démocratie libérale de type ouest-européen ou nord-américain est loin de s’être imposée partout sur le globe depuis plus de trois décennies.

    La présente invasion russe de l’Ukraine rappelle aux Occidentaux que la politique relève de la réalité, non du rêve, de l’idéal ou de l’idéologie. Les Européens, les Américains, l’ONU, toutes les organisations internationales, les grands principes libéraux et démocratiques, la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, les assises du Droit, de la Morale et de la Justice viennent de se fracasser contre ce fait terrible de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, avec ses avancées de chars, ses bombardements, ses destructions de villes, ses innombrables tués, ses foules fuyant l’ennemi pour se réfugier à l’étranger, et l’implacable détermination de Poutine à transformer le pays vaincu en protectorat, avant, peut-être, de l’annexer purement et simplement. Tous se révèlent impuissants à l’arrêter. L’ONU a beau condamner ce dernier, elle ne peut rien entreprendre contre lui en raison du droit de veto dont il dispose au sein du Conseil de sécurité. Et les Occidentaux, à commencer par les États-Unis, la super-puissance, ne peuvent se lancer dans une opération militaire contre la Russie sous peine de déclencher une nouvelle guerre mondiale, qui serait sans doute nucléaire.

    Le démenti infligé aux illusions de la dissuasion

    Et là, on voit les bornes de la dissuasion. Cette fameuse dissuasion, considérée par les Occidentaux, depuis la fin des années 1940, comme la garantie suprême du maintien de la paix et du renoncement des dictatures à leurs objectifs bellicistes, ne dissuade aujourd’hui, en fait, que les Occidentaux eux-mêmes. Poutine exerce un chantage aussi évident qu’implicite sur eux, brandissant le risque d’un conflit planétaire au cas où ils interviendraient militairement en faveur de l’Ukraine. Il a parfaitement compris que les Occidentaux reculeront toujours devant un tel risque. L’équilibre de la terreur institué à la fin des années 1940 révèle aujourd’hui son caractère illusoire. Il joue en faveur de la Russie, qui ne redoute pas le risque d’un affrontement avec l’Occident qu’elle sait par principe opposé à toute entrée en guerre, et donc condamnée à reculer devant elle.

    La vanité des alliances défensives occidentales

    L’infériorité des Occidentaux n’est ni militaire ni économique, elle est morale. Depuis le début de la crise des relations entre la Russie et les Occidentaux, ceux-ci répètent à qui mieux mieux, par la voix ou la plume de leurs dirigeants et de leurs médias, que l’OTAN est une alliance militaire purement défensive qui ne menace en rien la Russie aussi longtemps que cette dernière ne manifeste aucune intention belliqueuse à l’égard de ses membres. C’est oublier que l’esprit défensif exclusif annonce déjà une prédisposition au recul lié à la peur de devoir se résoudre à un conflit armé. Les alliances défensives ont toujours entraîné des reculs, des renoncements et n’ont jamais dissuadé des agresseurs résolus, ce qui était pourtant leur raison d’être. Il n’est que de se rappeler, dans l’entre-deux-guerres, la vanité des accords liant les pays de la Petite Entente (Tchécoslovaquie, Yougoslavie, Roumanie, 1921-1922), du Pacte de Locarno (16 octobre 1925), de la conférence de Stresa (11-15 avril 1935), et du Traité franco-russe (2 mai 1935) pour s’en convaincre. Et nous pourrions citer bien d’autres exemples plus contemporains. On noue et on empile des accords, des traités associant un maximum de partenaires, on se dote des armes les plus perfectionnées et les plus redoutables, dont l’arme nucléaire, et, avec tout cela, on espère dissuader l’adversaire. En un sens on y parvient puisque, en effet, celui-ci ne s’attaque pas à l’un des partenaires de l’alliance ; et, de fait, la Russie n’a agressé ni n’agressera les Pays baltes, membres de l’OTAN (et de l’Union européenne). Et la Biélorussie apparaît comme son fidèle vassal. Mais il n’est pas certain qu’elle ne nourrisse pas de visées annexionnistes sur les autres pays de l’ancienne URSS (Arménie, Géorgie, Azerbaïdjan, Kazakhstan, Ouzbékistan). Ces pays pourraient, à moyenne ou longue échéance connaître le sort de l’Ukraine que les Occidentaux sont incapables de secourir militairement. Ils ne sont d’ailleurs pas tenus de le faire, l’Ukraine n’étant pas membre de l’OTAN (ni de l’UE), et n’osent pas le faire de toute façon, tétanisés par la peur d’une déflagration mondiale où, de surcroît, l’arme nucléaire serait utilisée. Ainsi, s’ils ne risquent rien eux-mêmes, ils ne peuvent paralyser les agressions militaires, les annexions territoriales et les mises sous tutelle forcée entreprises par la Russie.

    La révélation du danger d’une stratégie de simulations

    La guerre est, de toute façon, au rebours de tous leurs principes. Leur stratégie de la dissuasion et leur idéalisme moral étayé sur une idéologie pseudo-humaniste et universaliste les ont amenés à concevoir la guerre et les relations entre les hommes et les peuples sous l’angle de la virtualité. En cela, ils ont une vision baudrillardienne du monde. Des années et des décennies durant, ils ont conçu leur stratégie défensive sur la base de simulations de conflits qui révèlent toute leur inutilité devant la terrible réalité de la guerre déclenchée par un chef d’État qui ne se comporte pas du tout comme ils le prévoyaient dans leurs hypothèses censément les plus sérieuses.

    Poutine savait, depuis longtemps, que ses homologues occidentaux n’envisageaient les relations géopolitiques et stratégiques qu’à l’aune de simulations, et qu’ils n’étaient donc pas prêts à affronter une crise sérieuse. Et il le savait d’autant plus qu’il percevait que cette impréparation découlait de leur éthique universaliste et pacifiste entée sur l’idéologie des Droits de l’Homme.

    Les conséquences de la démission morale de l’Occident

    Cette dernière n’a pas peu contribué à détacher les Occidentaux du réel. Ce, en les convertissant au politiquement correct, à l’individualisme hédoniste et consumériste, à la satisfaction de tous les désirs assimilée à un des droits de l’Homme, et à l’amoralisme ou au relativisme moral généralisé. À tort peut-être (mais, hélas, non sans quelque raison), Poutine perçoit les sociétés occidentales comme décadentes, avachies et incapables de s’opposer à ses projets expansionnistes.

    En définitive, c’est une leçon de réalisme que nous donne le présent conflit russo-ukrainien. Celui-ci nous rappelle que le monde est ce qu’il est et ne s’accommode pas de lubies morales et idéologiques. Ces dernières font marcher les Occidentaux sur les mains (ou sur la tête) quand les Russes, eux, marchent sur les pieds.  

    Article paru dans Politique magazine

  • Le naufrage politique, intellectuel et moral de ceux qui se prennent pour les « élites »

    Les romains de la décadence (Thomas Couture).jpg

    Les romains de la décadence (Thomas Couture)

    Nous voguons de crises en crises, comme si un réalisateur hollywoodien voulait à tout prix nous vendre un « film catastrophe » aux suspens et à l’action ininterrompus : après « Contagion » (dans lequel le monde bataille avec un méchant virus mais est heureusement sauvé par toute la clique gouvernementale travaillant pour notre bien à tous, évidemment), nous voilà dans « La somme de toutes les peurs » (où, comme d’habitude, les hommes de l’ombre vont sauver la mise à l’Humanité juste avant le feu nucléaire). Si cette succession de violents soubresauts dans l’actualité ne nous laisse guère de répit, elle autorise cependant, avec les changements trop rapides de décor, à entrevoir les coulisses de la politique actuelle. Et ce n’est pas fameux…

    La pandémie et sa gestion auront ainsi permis de révéler, au grand jour, les penchants particulièrement dictatoriaux de certains dirigeants occidentaux, tout en montrant l’ampleur de l’autocensure dans le milieu des médias. En quelques mois, la preuve fut faite que rien ne semblait plus fort que le désir de se conformer douillettement à la pensée dominante qui s’est faite étouffante (avec et sans masque) pour garantir que pas une tête ne devrait dépasser, pas un bras ne resterait sans picouse, pas un citoyen ne se dispenserait de son petit numéro de série républicain.

    L’arrivée, en fanfare, de l’actualité ukrainienne a dégagé de façon stupéfiante toute référence à une pandémie dont on sentait depuis des semaines qu’elle ne répondait plus du tout aux critères nécessaires pour captiver (ou asservir) les foules, et, de la même façon que la précédente crise avait dévoilé la noirceur de certaines âmes de plateau télé et de pupitre républicain, il n’a pas fallu attendre plus de quelques jours pour écrire un nouveau chapitre dans le naufrage politique, intellectuel et moral de nos élites.

    Un naufrage politique

    Ainsi, il est vraiment consternant de constater que nos politiciens ne semblent toujours pas capables de planifier au-delà de leur prochaine échéance électorale, et, pire que tout, à quelques semaines de leurs échéances tout au plus.

    Le domaine de l’énergie, qui devrait être le pilier des réflexions économiques d’ampleur de tout pays un tant soit peu bien dirigé, ne semble déclencher un intérêt qu’avec la crise ukrainienne et le risque que font peser les manœuvres de Poutine sur l’approvisionnement en gaz de l’Europe. Les réflexions atterrantes de certains leaders politiques (notamment écologistes mais pas seulement) découvrant la nécessité d’approvisionner en gaz leurs lubies intermittentes imbéciles donnent une excellente idée de leur niveau (ou de leur absence de niveau, disons).

    Apparemment, on découvre que l’énergie est une question sérieuse et que des faux-pas en la matière ont des conséquences graves pouvant aller jusqu’à se mettre dans des positions inextricables.

    Il en va de même sur le constat, pourtant historiquement évident, que l’accumulation des dettes et de l’inflation provoque systématiquement misère et guerres (civiles ou extérieures). La période actuelle, où l’on observe de l’inflation dans tout le monde occidental lui-même baigné de dettes colossales, devrait laisser plus que songeur sur notre avenir.

    Mais rassurez-vous, nos « élites » semblent relativement imperméables à ces éléments.

    Un naufrage intellectuel

    On ne peut que se demander comment ceux qui, pendant deux ans, ont surjoué la carte de la peur devant un virus avec un taux de létalité tournant autour de 0.1% peuvent à présent paraître crédibles lorsqu’ils se lancent dans des discours grandiloquents à base de sanctions, de muscle, de testostérone lourdement armée saupoudrée d’envois de troupes et de « vous allez voir ce que vous allez voir ». C’est grotesque.

    On ne peut pas passer deux ans à imposer aux uns et aux autres de rester chez soi, de se laver les mains et de mettre un masque en tissus à peu près complètement inutile pour ensuite espérer être crédible lorsqu’il s’agira d’aller défendre la veuve et l’orphelin dans un pays étranger. Au mieux, on passe pour un clown qui brasse du vent, au pire pour un faible. C’est exactement ce qui s’est passé, du reste : l’Europe, déjà naturellement éparpillée et rarement capable de parler d’une voix forte et claire, a cette fois encore agité ses petits bras en l’air sans jamais frôler la moindre crédibilité. Et au niveau de ses États membres, le décalage entre les discours, les postures et la gravité de la situation n’a été que cruel.

    Du reste, la tendance n’est pas nouvelle et le naufrage intellectuel pas neuf : le dévoiement des mots, le relativisme érigé en seul mode de pensée autorisé, le rejet de la culture traditionnelle, des traditions et coutumes séculaires jugées vieillottes voire barbares, la tendance maintenant affirmée de conspuer le beau, le classique pour lui préférer le subversif, l’anormal voire le laid, tout ceci participe de ce naufrage intellectuel de moins en moins lent qui caractérise maintenant et bien malheureusement les « élites » de l’Occident (ou, plus exactement, celles qui nous sont systématiquement proposées comme des références modernes).

    Un naufrage moral

    Et ces naufrages politiques et intellectuels s’accompagnent d’un naufrage moral qui s’est instillé dans toute notre société. Il ne se passe plus une semaine sans qu’on apprenne le dévoiement, la corruption de nos « élites » dans des affaires sordides qui s’accumulent sans, d’ailleurs, que cela semble freiner les dirigeants dans leur lancée.

    Ceux qui nous dirigent, ceux qui nous disent quoi et comment penser, ceux même qui nous jugent sont régulièrement pincés, sans que s’émeuve vraiment la presse dont on comprend qu’elle est elle-même descendue aussi bas que ceux-là.

    L’évidence de la vacance

    Il faut se rendre à l’évidence : s’il existe encore, heureusement, des élites intellectuelles ou morales, elles se sont retirées du monde bruyant dans lequel nous vivons. Elles ont laissé la place à des dirigeants qui ne sont plus des cadors ou des intellectuels aguerris et mûrement affinés, mais des saltimbanques approximatifs, des acteurs pusillanimes et impressionnables, des branleurs ou des psychopathes qui seraient comiques si tant de monde ne devaient pas subir les conséquences de leurs actions hystériques.

    Il n’y a plus de vraies élites mais que des clans de parasites sans valeurs et sans intelligence.

    Ce pays est foutu.

    Tiré du site HASHTABLE

  • Les entretiens de politique magazine

    Le mensuel Politique magazine fête cette année ses vingt ans d'existence.

    Il n'a cessé d'alerter les français

    sur les problèmes institutionnels de la France.

    Hilaire de Crémiers, son créateur, revient sur cet aspect essentiel.

     

    Cliquez sur la photo

    Hilaire-2.jpg

    Le N° 207 vient de paraitre

    PM204-une.png

  • Charles Maurras : le retour ? Un excellent article de Philippe Bilger

    Maurras-Bilger.jpg

     

    Bilger.jpgDans cette période du confinement, une étrange alternative existe sur le plan médiatique.

    Une hypertrophie de la dérision, un culte des fous rires ou une focalisation sur les larmes.

    Ou le droit, comme nous vivons au quotidien une expérience hors norme, de nous intéresser à des sujets inédits ou à des personnalités en général exilées, ostracisées, méconnues.

    Il faut remercier la nouvelle Revue Universelle qui publie un passionnant numéro sur "Le nouvel âge du maurrassisme" avec des contributions notamment d'Alain Finkielkraut ou d'Éric Zemmour.

    Pourquoi ?

    Parce qu'il convient de saluer tout ce qui cherche à réduire l'inculture générale, historique, littéraire et politique.

    Parce qu'il est utile, dans un temps d'intolérance et de sectarisme - on déteste en ayant mal lu ou, encore mieux ou pire, sans avoir lu - d'introduire de force dans un monde étriqué les ferments de la curiosité, de la liberté et de l'ouverture, de quelque côté qu'ils se tournent.

    Parce qu'il est navrant que certaines superbes intelligences et incontestables talents littéraires ne soient connus que pour leurs déboires, leurs fautes et leur condamnation.

    Charles Maurras né en 1868 et mort en 1952, relève de ces influentes, transgressives et capitales destinées.

    Loin d'être un bloc, cet homme a été contraste, littérature et engagement, pertinence prophétique, contradiction, haine, violence verbale mais aussi lucidité, repentance et regret.

    Anglophobe certes mais encore plus germanophobe, n'ayant soutenu le maréchal Pétain et le régime de Vichy qu'à cause de cette "divine surprise" de voir le sursaut national.

    Puisque l'Action française, dont il a été le principal animateur, est le vecteur du monarchisme, du nationalisme intégral et se revendique contre-révolutionnaire et antidémocratique. Partisan d'un antisémitisme d'État - contre la double nationalité des Juifs qu'il qualifie pourtant de "glorieuse" pour celle qui ne serait pas française -, il comprend plus tard, emprisonné, ses erreurs sur ce plan, affirmant avoir ignoré en 1944 le sort tragique réservé aux juifs arrêtés par l'Allemagne nazie et il récuse l'extrémisme scandaleux d'un Maurice Bardèche.

    C'est ce même homme qui reproche à Robert Brasillach d'avoir envisagé de faire reparaître "Je suis partout" à Paris en 1941 "parce qu'il ne reverra jamais les gens qui admettent de faire des tractations avec les Allemands".

    Entre 1886 et 1952, il est si prolifique qu'il publie la bagatelle de 10 000 articles dont certains sont féroces à l'égard des ultras de la collaboration.

    Arrêté lors d'une conférence de presse, son procès durera du 24 au 28 janvier 1945. Il sera condamné, pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi (alors que toute son existence intellectuelle et politique il l'a haï), à la réclusion criminelle à perpétuité avec dégradation nationale. Les jurés avaient été choisis sur une liste établie par les ennemis de Maurras.

    Son incarcération sera l'occasion pour lui d'une réflexion lui permettant d'approfondir ou d'amender certaines de ses convictions.

    Il serait trop long - des historiens objectifs l'ont fait - de décrire l'itinéraire intellectuel et politique de Maurras qui serait incompatible avec le caractère simpliste et manichéen de l'ignorance contemporaine. Il me suffit de mentionner quelques-uns de ceux qui ont été marqués et influencés par lui. Ainsi Jacques Bainville, Georges Bernanos, Jacques Maritain, la famille littéraire des Hussards, notamment Michel Déon qui a été un temps son secrétaire et bien sûr de Gaulle dont le terreau a été maurrassien.

    Pour dire la vérité, si j'ai eu envie d'écrire ce billet, ce n'est pas parce que j'ai été saisi par une illumination mais à cause de cette pensée très profonde de Charles Maurras qui m'a poussé à faire partager mon assentiment. Il se pose cette question : "Y a-t-il un progrès ?... Il y en aurait à coup sûr si chaque âge ne s'oubliait à perdre d'un côté ce qu'il gagne de l'autre ; si, la plupart du temps, l'homme ne négligeait de mettre bout à bout ses plus admirables profits".

    C'est totalement juste et remarquablement écrit.

    C'est aussi Charles Maurras.

    Président de l'Institut de la parole

    https://www.philippebilger.com/blog/2020/04/charles-maurras-le-retour-.html

     

    À commander 1, bd de Courcelles, 75008 Paris - 18 € port compris

    NRU-58-Couverture-Une.jpg

    Et le dernier vient de paraître

     

    1.JPG

    Abonnement-2.jpg

  • Michel Maffesoli : Une société en pleine décadence

    Maffesoli.jpg

    Michel Maffesoli est bien connu de nos lecteurs. Il est actuellement le plus lucide de nos sociologues. Appliquant avec bonheur la méthode de « l’empirisme organisateur », dégagé de tout esprit de système, il analyse ici les instruments de domination à l’usage de « l’oligarchie médiatico-politique ». Un des passages importants nous semble être celui consacré à la « stratégie de la peur pour se maintenir au pouvoir », dont nous voyons aujourd’hui la mise en œuvre la plus odieuse.

    Constatons en effet que tous ceux qui sont titulaires, ou croient l’être, d’un semblant de pouvoir, peut-être menacés par de futures élections (il n’y a pas que la présidentielle mais aussi les législatives) prônent avec insistance le vaccin et le pass-sanitaire obligatoires. Cela n’a rien à voir avec une nécessité médicale scientifiquement établie (nous en sommes loin) à laquelle ils ne comprennent d’ailleurs rien, mais avec le seul souci de maintenir la population sous un couvercle de peur et d’anxiété, et ainsi renouveler le scénario des municipales et des régionales, provoquer une participation minimale et voir jouer le réflexe conservateur d’une opinion manipulée. 

    Il serait cependant opportun qu’ils descendent de leurs sièges bancals et prennent garde à  la pression qui monte dans la cocotte et risque un jour ou l’autre d’exploser.

    Henri Bec

    Table des matières

    1 Par Michel Maffesoli Professeur émérite à la Sorbonne

    2 La stratégie de la peur pour se maintenir au pouvoir

    3 La morale comme instrument de domination

    4 Pour une philosophie progressive

    5 Cet étrange culte de la science

    6 Démocrates, peut-être, mais démophiles, certainement pas

    7 Face à l’inquisition de l’infosphère

    8 Une vraie psycho-pandémie

    9 De la raison sensible

    10 La faillite des élites est déjà là

     

    Par Michel Maffesoli Professeur émérite à la Sorbonne

    S’accorder au cycle même du monde, voilà ce qui est la profonde sagesse des sociétés équilibrées. Tout comme, d’ailleurs, de tout un chacun. C’est cela même qui fonde le sens de la mesure. Le « bon sens » qui, selon Descartes, est la chose du monde la mieux partagée. Bon sens qui semble perdu de nos jours. Tout simplement parce que l’opinion publiée est totalement déconnectée de l’opinion publique.

    Mais pour un temps, sera-t-il long ? cette déconnexion est quelque peu masquée. C’est la conséquence d’une structure anthropologique fort ancienne : la stratégie de la peur.

    La stratégie de la peur pour se maintenir au pouvoir

    D’antique mémoire, c’est en menaçant des supplices éternels de l’enfer que le pouvoir clérical s’est imposé tout au long du Moyen-Âge. Le protestantisme a, par après, fait reposer « l’esprit du capitalisme » (Max Weber) sur la théologie de la « prédestination ». Vérifier le choix de dieu : être élu ou damné aboutit à consacrer la « valeur travail ». L’économie du salut aboutit ainsi à l’économie stricto sensu !

    Dans la décadence en cours des valeurs modernes, dont celle du travail et d’une conception simplement quantitativiste de la vie, c’est en surjouant la peur de la maladie que l’oligarchie médiatico-politique entend se maintenir au pouvoir. La peur de la pandémie aboutissant à une psycho-pandémie d’inquiétante allure.

    Comme ceux étant censés gérer l’Enfer ou le Salut, la mise en place d’un « Haut commissariat au Bonheur » n’a, de fait, pour seul but que l’asservissement du peuple. C’est cela la « violence totalitaire » du pouvoir : la protection demande la soumission ; la santé de l’âme ou du corps n’étant dès lors qu’un simple prétexte.

    Le spectre eugéniste, l’asepsie de la société, le risque zéro sont des bons moyens pour empêcher de risquer sa vie. C’est-à-dire tout simplement de vivre ! Mais vivre, n’est-ce pas accepter la finitude ? Voilà bien ce que ne veulent pas admettre ceux qui sont atteints par le « virus du bien ». Pour utiliser une judicieuse métaphore de Nietzsche, leur « moraline » est dès lors on ne peut plus dangereuse pour la vie sociale, pour la vie tout court !

    La morale comme instrument de domination

    Étant entendu, mais cela on le savait de longue date, que la morale est de pure forme. C’est un instrument de domination. Quelques faits divers contemporains, animant le Landerneau germanopratin montrent, à loisir que tout comme le disait le vieux Marx, à propos de la bourgeoisie, l’oligarchie « n’a pas de morale, elle se sert de la morale ».

    Le moralisme fonctionne toujours selon une logique du « devoir-être », ce que doivent être le monde, la société, l’individu et non selon ce que ces entités sont en réalité, dans leur vie quotidienne. C’est cela même qui fait que dans les « nuées » qui sont les leurs, les élites déphasées ne savent pas, ne veulent pas voir l’aspect archétypal de la finitude humaine. Finitude que les sociétés équilibrées ont su gérer.

    C’est cela le « cycle du monde ». Mors et vita ! Le cycle même de la nature : si le grain ne meurt… Qu’est-ce à dire, sinon que la beauté du monde naît, justement, de l’humus ; du fumier sur lequel poussent les plus belles fleurs. Règle universelle faisant de la souffrance et de la mort des gages d’avenir.

    En bref, les pensées et les actions de la vie vivante sont celles sachant intégrer la finitude consubstantielle à l’humaine nature. À la nature tout court, mais cela nous oblige à admettre qu’à l’opposé d’une histoire « progressiste » dépassant, dialectiquement, le mal, la dysfonction et pourquoi pas la mort, il faut s’accommoder d’un destin autrement tragique, où l’aléa, l’aventure le risque occupent une place de choix.

    Pour une philosophie progressive

    Et au-delà du rationalisme progressiste, c’est bien de cette philosophie progressive dont est pétrie la sagesse populaire. Sagesse que la stratégie de la peur du microcosme ne cesse de s’employer à dénier. Et ce en mettant en œuvre ce que Bergson nommait « l’intelligence corrompue », c’est-à-dire purement et simplement rationaliste.

    Ainsi le funambulisme du microcosme s’emploie-t-il pour perdurer à créer une masse infinie de zombies. Des morts-vivants, perdant, peu à peu, le goût doux et âcre à la fois de l’existence . Par la mascarade généralisée, le fait de se percevoir comme un fantôme devient réel. Dès lors, c’est le réel qui, à son tour, devient fantomatique.

    Monde fantomatique que l’on va s’employer à analyser d’une manière non moins fantomatique. Ainsi, à défaut de savoir « déchiffrer » le sens profond d’une époque, la modernité, qui s’achève, et à défaut de comprendre la postmodernité en gestation, l’on compose des discours on ne peut plus frivoles. Frivolités farcies de chiffres anodins  et abstraits

    Il est, à cet égard, frappant de voir fleurir une quantophrénie ayant l’indubitabilité de la Vérité ! Carl Schmidt ou Karl Löwith ont, chacun à leur manière, rappelé que les concepts dont se servent les analyses politiques ne sont que des concepts théologiques sécularisés.

    La dogmatique théologique propre à la gestion de l’Enfer ou la dogmatique progressiste théorisant la « valeur travail » s’inversent en « scientisme » prétendant dire ce qu’est la vérité d’une crise civilisationnelle réduite en crise sanitaire. « Scientisme » car le culte de la science est omniprésent dans les divers discours propres à la bien-pensance.

    Cet étrange culte de la science

    Il est frappant d’observer que les mots ou expressions, science, scientifique, comité scientifique, faire confiance à la Science et autres de la même eau sont comme autant de sésames ouvrant au savoir universel. La Science est la formule magique par laquelle les pouvoirs bureaucratiques et médiatiques sont garants de l’organisation positive de l’ordre social. Il n’est jusqu’aux réseaux sociaux, Facebook, Tweeter, LinkedIn, qui censurent les internautes qui « ne respectent pas les règles scientifiques », c’est-à-dire qui ont une interprétation différente de la réalité. Doute et originalité qui sont les racines de tout « progrès » scientifique !

    Oubliant, comme l’avait bien montré Gaston Bachelard que les paradoxes d’aujourd’hui deviennent les paradigmes de demain, ce qui est le propre d’une science authentique alliant l’intuition et l’argumentation, le sensible et la raison, le microcosme se contente d’un « décor » scientiste propre à l’affairement désordonné qui est le sien.

    Démocrates, peut-être, mais démophiles, certainement pas

    Politiques, journalistes, experts pérorant jusqu’à plus soif sont en effet, à leur « affaire » : instruire et diriger le peuple, fût-ce contre le peuple lui-même. Tant il est vrai que les démocrates auto-proclamés sont très peu démophiles. Au nom de ce qu’ils nomment la Science, ils vont taxer de populistes, rassuristes voire de complotistes tous ceux qui n’adhèrent pas à leurs lieux communs.

    On peut d’ailleurs leur retourner le compliment. Il suffit d’entendre, pour ceux qui en ont encore le courage, leur lancinante logorrhée, pour se demander si ce ne sont pas eux, les chasseurs de fake news, qui sont les protagonistes essentiels d’une authentique « complosphère »[1]. Très précisément parce qu’ils se contentent de mettre le monde en spectacle.

    Pour reprendre le mot de Platon, décrivant la dégénérescence de la démocratie, la « Théâtrocratie » est leur lot commun. Politique spectacle des divers politiciens, simulacre intellectuel des experts de pacotille et innombrables banalités des journalistes servant la soupe aux premiers, tels sont les éléments majeurs constituant le tintamarre propre à ce que l’on peut nommer la médiocrité de la médiacratie.

    Face à l’inquisition de l’infosphère

    J’ai qualifié ce tintamarre « d’infosphère ». Nouvelle inquisition, celle d’une élite déphasée regardant « de travers » tout à la fois le peuple malséant et tous ceux n’adhérant pas au catéchisme de la bienpensance. « Regarder de travers », c’est considérer ceux et ce que l’on regarde en coin comme étant particulièrement dangereux. Et, en effet, le peuple est dangereux. Ils ne sont pas moins dangereux tous ceux n’arrivant pas à prendre au sérieux la farce sanitaire mise en scène par les théâtrocrates au pouvoir.

    Il faudrait la plume d’un Molière pour décrire, avec finesse, leurs arrogantes tartufferies. Leur pharisianisme visant à conforter la peur, peut aller jusqu’à susciter la délation, la dénonciation de ceux ne respectant pas la mise à distance de l’autre, ou de ceux refusant de participer au bal masqué dominant. Leur jésuitisme peut également favoriser la conspiration du silence vis-à-vis du mécréant. (celui qui met en doute La Science). Et parfois même aller jusqu’à leur éviction pure et simple des réseaux sociaux.

    Dans tous ces cas, il s’agit bien de la reviviscence inquisitoriale. La mise à l’Index : Index librorum prohibitorum. Délation et interdiction selon l’habituelle manière de l’inquisition : au moyen de procédures secrètes. L’entre-soi est l’élément déterminant de la tartufferie médiatico-politique. L’omerta mafieuse : loi du silence, faux témoignages, informations tronquées, demi-vérités, sournoiseries etc. Voilà bien le modus operandi de la fourberie en cours. Et tout un chacun peut compléter la liste de ces parades théâtrales.

    Voilà les caractéristiques essentielles de « l’infosphère », véritable complosphère dominante. Mafia, selon la définition que j’ai proposée des élites, rassemblant « ceux qui ont le pouvoir de dire et de faire ». Puis-je ici rappeler,  à nouveau,  une rude expression de Joseph de Maistre pour décrire ceux qui sont abstraits de la vie réelle : « la canaille mondaine ».

    Peut-être faudrait-il même dire « demi-mondaine ». Ce qui désigne, selon Alexandre Dumas, une « cocotte » richement entretenue et se manifestant bruyamment dans la sphère médiatique, le théâtre et la vie publique ou politique. Demi-monde on ne peut plus nébuleux dont les principales actions sont de déformer la réalité afin de la faire rentrer en congruence avec leur propre discours. Demi-mondaines entretenues par l’État ou les puissances financières de la démocratie afin de faire perdurer un état de choses désuet et rétrograde.

    Mais cette déformation de la réalité a, peu à peu, contaminé l’espace public.

    C’est cela le cœur battant du complotisme de « l’infosphère » : entretenir « mondainement » la peur de l’enfer contemporain. Anxiété, restriction des libertés acceptée, couardise, angoisse diffuse et tout à l’avenant au nom du « tout sanitaire ». Forme contemporaine du « tout à l’égout » !

    Une vraie psycho-pandémie

    Sans nier la réalité et l’importance du virus stricto sensu, sans négliger le fait qu’il ait pu provoquer un nombre non négligeable de décès, ce qui n’est pas de ma compétence, il faut noter que le « virus » s’est introduit de manière essentielle dans nos têtes. Ce qui devrait nous conduite à parler d’une « psycho-pandémie » suscitée et entretenue par l’oligarchie médiatico-politique.

    Psycho-pandémie comme étant la conséquence logique de ce que Heidegger nomme la « pensée calculante » qui, obnubilée par le chiffre et le quantitatif et fascinée par une  logique abstraite du « devoir être », oublie la longue rumination de la « pensée méditante » qui, elle, sait s’accorder, tant bien que mal à la nécessité de la finitude.

    Voilà ce qui, pour l’immédiat suscite une sorte d’auto-anéantissement ou d’auto-aliénation conduisant à ce que ce bel esprit qu’était La Boétie nommait la « servitude volontaire ». Ce qui est, sur la longue durée des histoires humaines, un phénomène récurrent. Cause et effet de la stratégie de la peur qui est l’instrument privilégié de tout pouvoir, quel qu’il soit.

    Stratégie de la peur qui, au-delà ou en-deçà de l’idéal communautaire sur lequel se fonde tout être ensemble, aboutit, immanquablement à une grégaire solitude aux conséquences on ne peut plus dramatique : violence perverse, décadence des valeurs culturelles, perte du sens commun et diverses dépressions collectives et individuelles. L’actualité n’est pas avare d’exemples illustrant une telle auto-aliénation !

    Il est deux expressions qui devraient nourrir la pensée méditante, ce que Durkheim nomme le « conformisme  logique », ou ce que Gabriel Tarde analyse dans « les lois de l’imitation ». Des insanités déversées d’une manière lancinante, dans la presse écrite, radiophonique ou télévisuelle par l’oligarchie, au spectacle du bal masqué que nous offre la réalité quotidienne, on voit comment la stratégie de la peur induite par l’inquisition contemporaine aboutit à un état d’esprit tout à fait délétère, et on ne peut plus dangereux pour toute vie sociale équilibrée.

    Cette grégaire solitude est particulièrement angoissante pour les jeunes générations auxquelles est déniée tout apprentissage vital. Et c’est pour protéger des générations en fin de vie que l’on sacrifie une jeunesse qui est, ne l’oublions pas, la garante de la société à venir.

    De diverses manières de bons esprits ont rappelé qu’une société prête à sacrifier la liberté, la joie de vivre, l’élan vital en échange de sécurité et de tranquillité ne mérite ni les uns, ni les autres. Et, in fine, elle perd le tout. N’est-ce point cela qui menace, actuellement, la vie sociale en son ensemble ?

    De la raison sensible

    Mais une fois le diagnostic fait, il est nécessaire de formuler un pronostic pertinent. Ainsi, en accord avec le réalisme que l’on doit à Aristote ou à Saint Thomas d’Aquin, il faut savoir mettre en œuvre un chemin de pensée alliant les sens et l’esprit. Ce que j’ai nommé la « raison sensible ».

    Voilà qui peut mettre à bas les châteaux de cartes du rationalisme étroit dans lequel les concepts abstraits servent de pseudo-arguments. Le bon sens et la droite raison réunis peuvent permettre de mettre un terme au brouhaha des mots creux. C’est bien d’ailleurs ce qui est en train de se passer sur les réseaux sociaux dans lesquels grâce aux tweets, forums de discussion, échanges sur Facebook, sites et blogs de résistance divers et presse en ligne est en train de s’élaborer une manière de penser et d’agir différente. Il faut être attentif à la société officieuse en gestation, totalement étrangère à la société officielle propre à l’oligarchie médiatico-politique.

    Il est une heureuse expression que l’on doit à l’universitaire et homme politique Pierre-Paul Royer-Collard (1763 – 1845) qu’il est utile de rappeler de nos jours. C’est ainsi qu’il oppose « le pays légal au pays réel ». Par après cette opposition a été reprise, diversement, par Auguste Comte ou Charles Maurras. Mais elle a l’heur de nous rappeler que parfois, il existe un divorce flagrant qui oppose la puissance populaire, puissance instituante, au pouvoir officiel et institué. C’est ce qui permet de saisir la lumière intérieure du bon sens populaire. C’est ce qui permet de comprendre qu’au-delà de la décomposition d’une société peut exister une renaissance. C’est cette métamorphose qui est en cours. Et au-delà de la soumission induite par la protection, c’est dans le « pays réel » que se préparent les soulèvements fondateurs d’une autre manière d ‘être ensemble.

    Ainsi de la révolte des « gilets jaunes » à la résistance, multiforme, à la mascarade, à la distanciation, voire aux vaccins, c’est une métamorphose sociétale qui se prépare. Le « monde d’après » est déjà là. Métamorphose qui bien évidemment à ce que Vilfredo Pareto nommait, avec pertinence, la « circulation des élites ». 

    La faillite des élites est déjà là

    Une telle circulation est inéluctable. La faillite des élites est, maintenant, chose acquise. La forte abstention aux diverses élections, la désaffection vis-à-vis des organes de presse, émissions de télévision ou radio en portent témoignage. Ce que l’on peut appeler « des bulletins paroissiaux » n’intéresse que des affidés, des petites sectes médiatico-politiques se partageant le pouvoir.

    Or le propre des « sectaires » est, en général, d’être totalement aveugles vis-à-vis de ce qui échappe à leur dogmatique. C’est ainsi que tout en considérant cela comme dangereux, ils sont incapables de repérer et de comprendre ces indices hautement significatifs que sont les rassemblements festifs se multipliant un peu partout. Il en est de même des multiples transgressions aux divers « confinements » et autres « couvre-feu » promulgués par l’appareil technico-bureaucratique. Et l’on pourrait multiplier à loisir des exemples en ce sens.

    Lorsque dans les années 70, je soulignais que la vraie violence, la « violence totalitaire » était celle d’une « bureaucratie céleste » voulant aseptiser la vie sociale et ce en promulguant la nécessité du risque zéro, je rappelais qu’à côté d’une soumission apparente existaient une multiplicité de pratiques rusées. Expression d’une duplicité structurelle : être tout à la fois double et duple.

    Il s’agit là d’un quant à soi populaire assurant, sur la longue durée, la survie de l’espèce et le maintien de tout être ensemble. C’est bien un tel « quant à soi » auquel l’on rend attentif tout au long de ces pages. Il témoigne d’une insurrection larvée dont la tradition donne de nombreux exemples et qui ponctue régulièrement l’histoire humaine.

    Duplicité anthropologique de ce bon sens dont Descartes a bien montré l’importance. Duplicité qui à l’image de ce qu’il disait : « larvatus prodeo », l’on s’avance masqué dans le théâtre du monde. Mais il s’agit là d’un masque provisoire qui sera, plus ou moins brutalement, ôté lorsque le temps s’y prêtera. Et ce en fonction du vitalisme populaire qui sait, de savoir incorporé, quand il convient de se soulever. Et ce avant que le bal masqué ne s’achève en danse macabre !

    [1] Je renvoie ici à la lucide et sereine analyse de Raphaël Josset, Complosphère. L’esprit conspirationniste à l’ère des réseaux, Lemieux éditeurs, 2015

  • La République sur tous les tons et à toutes les sauces

    La fraternité.jpg

    Très intéressante analyse d'Éric Zemmour, parue dans le Figaro. Il est, à l'évidence, irrité par la République, par le mot et par la chose même.

    Et de stigmatiser la classe politique qui, voulant se débarrasser de la France, a fait de la République "un tigre de papier". Il ne croit pas (et nous l'approuvons totalement) que la réponse aux attentas islamistes soit la République et sa sacro-sainte laïcité.

    Ce n'est pas la première fois que Zemmour nous entretient de ce thème. Mais il serait utile pour ses lecteurs qu'il soit désormais plus concret. Une répons précise à ses critiques et à ses doutes serait opportune.

     

    Zemmour.jpgIls n’ont que ce mot à la bouche. À gauche comme à droite, et au centre, à la France insoumise mais aussi au Rassemblement national. C’est le point de consensus entre Macron, Le Pen, Mélenchon et les autres.

    La République sur tous les tons et à toutes les sauces. La République comme réponse à tout. Un extraterrestre qui débarquerait en France pourrait croire que la France est sous la menace d’un putsch monarchiste, et que tous les Républicains doivent s’unir. Il n’en est rien : la République n’est pas menacée et c’est peut-être pour ça qu’elle est si défendue. La République, ses valeurs et sa sacro-sainte laïcité. La réponse du président aux attentats islamistes, c’est la République. Et son arme est la laïcité.

    Qui y croit sérieusement ? Qui croit qu’un homme prêt à décapiter un professeur parce que celui-ci a insulté Allah sera arrêté par les règles de la laïcité ? On n’est pas dans le même registre. D’un côté, des règles juridico-politiques ; de l’autre, une foi fanatisée qui veut imposer un système juridico-politique de remplacement : la charia. Ce n’est pas la République qui est visée, mais la France. Une France à la fois chrétienne et irrévérencieuse, la France des croisés et de L’Assiette au beurre.

    Dans la bouche de nombre de politiques, la République est, depuis des années, le moyen commode de ne plus prononcer le mot France. Cette France qui doit se fondre dans l’Europe. La France qui sous-entend un enracinement, une histoire, une géographie, un peuple, une culture, des mœurs. Bref, une civilisation. Une France à laquelle on doit s’assimiler. À Rome, faire comme les Romains. Et à Paris, faire comme les Parisiennes. La République, c’est plus commode, cela signifie seulement une légalité superficielle qui fait consensus. Au-delà commencent les ennuis.  Les territoires perdus de la République sont les territoires perdus de la France. Des enclaves qui, parce qu’étrangères, sont devenues le terreau d’une contre-société fondée sur les règles islamiques. Un contre-pays : l’oumma. Une contre-civilisation qui produit terroristes islamistes et délinquants bas de gamme. Le djihad pour tous. Malraux l’avait dit : « Une civilisation, c’est ce qui s’agrège à une religion. »

    C’est parce que la classe politique a voulu se débarrasser de la France qu’elle a fait de la République un tigre de papier. Une République réduite à des valeurs abstraites et à une laïcité limitée à la liberté de croire ou de ne pas croire, et à la neutralité de l’État, en oubliant son troisième pilier, à savoir un « devoir de discrétion » des religions dans l’espace public qui, en évacuant Dieu du débat, permet seule un affrontement rationnel au sein de l’espace des idées et des convictions. La République peut être unitaire ou fédérale, italienne ou américaine, libérale ou populaire, laïque ou islamique. Seule la France est française. Et comme disait Péguy, dans sa célèbre formule : « La République, notre royaume de France. »

  • JEU DE MASSACRE MÉMORIEL : ILS EN VEULENT TOUJOURS PLUS, EH BIEN, ON VA LEUR EN DONNER !

    jeu-de-massacre.jpg

    Les fanatiques racistes de « l’antiracisme » islamo-gauchiste, avec la masse de manœuvre des masochistes de l’aspiration à la dhimmitude et des blancs de la névrose de « la haine de soi » orchestrent frénétiquement, avec tous les relais d’une énorme complaisance médiatique, une opération de déconstruction historique.

    Ils ne manquent pas, il est vrai, de prétendre la légitimer en s’appuyant sur les monstrueuses déclarations d’Emmanuel Macron sur la « colonisation, crime contre l’humanité » !

    Pourtant, ce mouvement n’est pas à vrai dire totalement inintéressant. Car sa logique va être massacreuse pour les grands hommes de la pensée révolutionnaire. Aujourd’hui, contentons-nous ici de fournir aux gauchos des radios et de l’éducation dite nationale quelques incitations à la découverte.

    • Sur Voltaire, car celui-ci ne fut pas seulement un matérialiste, anticatholique et violemment antisémite, mais un parfait profiteur de la traite négrière.
    • Sur Marx :

    Lettre à Engels, 30 juillet 1862 : « Ce négro-juif de Lafargue, qui part heureusement à la fin de cette semaine, s’est encore débrouillé pour perdre 5000 thalers dans une spéculation malencontreuse(…). Je suis maintenant sûr, comme d’ailleurs sa forme de tête et de cheveux le prouvent, qu’il descend des nègres, de ceux qui ont suivi Moïse lors de sa fuite hors d’Égypte (à moins que sa mère ou sa grand-mère maternelle n’ait forniqué avec un nègre). Ma foi, ce mélange de type juif et germanique et de fond négroïde ne peut donner que quelque chose de bizarre. Il y a du négro aussi dans cette manière qu’il a de s’imposer aux autres ».

    Lafargue, socialiste allemand, mulâtre, avait épousé en 1868 la deuxième fille de Karl Marx, Laura. Marx en éprouva une grande rage.

    • Sur Engels, même acharnement raciste contre Lassale que son compère Marx. Message à ce dernier : « Mes félicitations à Paul, le candidat du Jardin des Plantes et des animaux. En tant que nègre, d’un degré plus proche du règne animal que nous tous, il est sans doute le représentant le plus qualifié de ce quartier ».
    • Sur Ferry, ce grand tripoteur d’affaires en Afrique du nord et au Tonkin. « Les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures ».

    Mais, bien au-delà de ces quelques extraits, ce sont des pages entières, significatives de leur racisme, que l’on peut parcourir chez les grands hommes de la gauche communiste, socialiste ou radicale.

    On voit mal comment désormais on pourra tolérer que leurs noms soient plus longtemps portés par des places ou des rues, des établissements scolaires et autres.

    Venons-en maintenant à l’esclavagisme arabo-musulman dont ne semble jamais se soucier les camarades Houria Bouteldja et Assa Traoré.

    Sans doute sur la question ne veulent-elles pas trop se pencher sur ce qu’il en a été pourtant dans leurs respectives ascendances.

    Que ne le font-elles ? Car le trafic d’esclaves, dans toute l’Afrique, n’a pas été seulement le triste fait des « négriers » européens et américains. Ces derniers ont acheté les esclaves vendus par leurs chefs de tribu. Mais cette traite-là, dite « traite occidentale », certes numériquement considérable et certes moralement abominable, n’a pas été la seule.

    La traite dite « orientale » pratiquée par les négriers arabo-musulmans à destination du monde islamique a été d’un chiffre largement supérieur (11 millions – 17 millions) et sa durée plus longue : du 7° siècle au 20° siècle.

    Elle a été aussi plus atrocement encore antihumaine et mémoricide. La castration des hommes en a été la règle. Il n’y a donc eu aucune transmission familiale et culturelle de l’africanité dans l’orient musulman.

    Enfin, il y a eu la traite « inter-africaine » telle qu’au début du 20° siècle on a pu estimer qu’il y avait encore environ 7 millions d’esclaves en Afrique occidentale française, plus de 14 millions pour l’ensemble de l’Afrique noire

    Parmi les peuples africains les plus esclavagistes, la grande tribu sahélienne des Soninkés, celle de la famille Traoré…

    On attend donc avec un grand intérêt la création de journées de mémoire de l’esclavage inter-africain en Afrique. Pour l’heure, il ne semble pas qu’il y en ait eu de programmées.

    Et la Turquie ?

    Enfin, quid de la Turquie, plus que jamais voulue continuatrice de l’empire ottoman par M. Erdogan ?

    Or, s’il y a bien un ensemble politique qui ait fonctionné sur l’esclavage, c’est celui-là.

    Istambul et les autres ports de la péninsule anatolienne n’étaient-ils pas les réceptacles de deux systèmes esclavagistes :

    • Le barbaresque, consistant principalement, jusqu’en 1830, dans la capture séculaire d’européens et notamment des femmes et jeunes filles à destination des harems de l’islam.
    • L’arabo-musulman déjà évoqué.

    Et on pourrait encore évoquer le système du devshirmé consistant à prendre un enfant sur cinq des familles des peuples chrétiens asservis. Pour en faire des janissaires.

    On attend avec intérêt de savoir si la Turquie de M. Erdogan va faire mémoire non seulement des Arméniens et autres chrétiens rescapés du génocide au prix de l’esclavage mais aussi de tout son passé d’un esclavagisme millénaire ?

    L'AGRIF

  • Michel Maffesoli : la fracture entre le peuple et les élites est de plus en plus visible

    Maffesoli.jpg

    Le sociologue Michel Maffesoli a accordé un entretien très pédagogique au site Atlantico. Il insiste avec raison sur les cafouillages et les incohérences de la politique gouvernementale. Les propos délirants entendus actuellement sur les médias imposent de se recentrer sur des analyses saines et empiriques. Cet entretien nous en donne l'occasion.

    Avec des expressions de simple bon sens : " Très clairement la société française explose plus que d’autres encore parce qu’elle a, dès la Révolution française, voulu ignorer les solidarités de proximité, les communautés locales, territoriales, les regroupements divers, qualifiés de communautaristse ou corporatistes".

    ________________________________________

     

    Après de nombreuses péripéties, la garde des Sceaux Nicole Belloubet ne recevra finalement pas la famille Traoré au sein du ministère de la Justice, suite au refus de cette dernière au nom de la séparation des pouvoirs. Comment un tel cafouillage a-t-il pu se produire ? Est-il symptomatique de la déliquescence de notre État de droit ?

    Michel Maffesoli : On pourrait en préliminaire constater que le confinement ordonné par le gouvernement a peut-être été la manière dont il a, pour un moment, « calmé » la rue, et cru reprendre le pouvoir.

    Ce confinement succédait en effet aux manifestations des gilets jaunes suivies de celles contestant la réforme des retraites. Ces deux « crises » ont été gérées de façon pour le moins chaotique : on a vu en même temps le maintien répressif de lordre, les manifestations de force militaire, l’exacerbation des violences, la surdité du pouvoir face aux réactions des populations à des mesures technocratiques qui les blessaient directement dans leur quotidien, puis la mise en scène grandiloquente du débat « avec la base » suivie dune avalanche de cadeaux fiscaux et sociaux.

    S’agissant de la réforme des retraites, réforme à prétention simplificatrice et universaliste, les contestations traduisaient essentiellement le fossé existant entre cette prétention technocratique aussi lisse et sans âme qu’un devoir de Sciences-Po et la réalité concrète et symbolique que représente la retraite dans une société très fractionnée. La difficulté qui ne tient pas au gouvernement actuel mais qui est un témoignage du passage de l’idéal universaliste démocratique à ce que j’ai nommé l’idéal communautaire se lisait dans cette tentative désespérée de réaliser enfin le projet d’une protection sociale généralisée, universelle, obligatoire.

    Ceci dit, peu importe le fond, le prétexte, l’heure est aux soulèvements. Ainsi que je l’ai écrit dans de nombreux ouvrages, la fracture entre le peuple et les élites est de plus en plus visible. Elle n’est absolument pas une « lutte des classes », une sorte de révolution visant à remplacer les têtes par d’autres, telle la Révolution française et ses nombreux remake marxistes sanglants et totalitaires. Il n’y a pas dans les soulèvements actuels de projet, de programme, pas même de leaders.

    Il y a tout juste la manifestation de cette secessio plebis qui montre que le peuple ne se sent plus représenté par ses élites, une volonté de dégagisme sans véritable solution de remplacement.

    D’une certaine manière l’épidémie a saisi tout le monde.  Ce virus inconnu, cette maladie aux formes bizarres, alliant labsence totale de symptômes à des « orages immunitaires », les formes bénignes aux formes létales a permis au chef de lEtat de mettre en place tous les attributs dun chef de guerre : état durgence, confinement, programmes spéciaux dans les médias, répétant en boucle et sur un ton on ne peut plus macabre des instructions destinées à enfin vider les rues !

    Le déconfinement nous remet dans le bain on ne peut plus violemment ! Et de manière on ne peut plus chaotique.

    Le cafouillage qui devient presque habituel entre les décisions de l’Élysée, celles des ministres, Intérieur et Justice, les jeux de déclarations à la presse est bien un signe de la déliquescence de notre Etat de droit. Décadence même qui dépasse bien sûr la seule actualité politique.

    Je dirais d’abord que le maintien de l’ordre et les nombreux débordements auxquels donnent lieu toutes les manifestations actuelles témoignent bien du fait qu’il n’y a plus d’autorité d’Etat. L’autorité n’est pas la répression, elle n’est pas le modelage des corps et des âmes, mais la capacité d’un Etat à permettre à tous de se réaliser dans un destin individuel et collectif. C’était le sens du contrat social. La loi ne devait restreindre les libertés de chacun que dans la mesure où leur expression portait atteinte aux libertés d’autrui.

    Mais nous ne sommes plus dans une société individualiste, dans laquelle s’opposaient de manière régulée les libertés individuelles et l’ordre collectif. Les manifestations des gilets jaunes comme celles qui prennent pour prétexte des violences racistes sont des expressions communautaires, c’est à dire la volonté de divers groupes réunis par des liens émotionnels, affectifs, d’être ensemble et de mettre en scène cet être ensemble. De telles manifestations peuvent être festives, violentes, pacifiques, bon enfant ou profondément manipulatrices et manipulées.

    Les manifestations des gilets jaunes ont été plutôt spontanées et festives, même si certains groupements étaient plus violents. La répression surdimensionnée et violente des forces de l’ordre a exacerbé leur côté violent et désespéré.

    Les manifestations actuelles qui prennent à la fois le prétexte des évènements états-uniens et celui de l’affaire « Traoré » sont plus politiques, largement orchestrées par diverses personnalités gauchistes, mais tout aussi incohérentes du point de vue politique, mêlant les réactions des petits gangs de banlieue aux mises en scènes « révolutionnaires » de quelques intellectuels en mal de frissons.

    Ce qui est curieux, c’est que la réaction du pouvoir est mimétiquement aussi incohérente.

    Incohérence dès le départ dans le traitement de cette bavure policière. Qui est plus qu’une bavure puisqu’il y a mort d’homme. Plus de dix expertises contradictoires démontrent bien qu’on ne peut plus rendre justice au nom de la science. Le fait que des forces de l’ordre dans les interpellations ne sachent pas doser la force pour contraindre sans tuer témoigne d’un véritable affaiblissement de l’autorité. On sait bien que l’autorité dégénère en autoritarisme voire en violence quand ceux qui l’exercent ne se sentent plus soutenus et sûrs de leur droit à l’exercer. Quand le pouvoir n’est plus légitimé par la puissance populaire.

    Ce qu’on ne dit pas assez c’est qu’il y a une profonde proximité entre les policiers de base et la plupart des manifestants et que dès lors ne se sentant pas légitimes à empêcher la manifestation ou à la contenir, les forces de l’ordre usent d’une violence qui les dépasse eux-mêmes.

    La déliquescence de notre Etat de droit est donc tout simplement le fait qu’il ne correspond plus aux mœurs, que les règles qui fondent notre vivre ensemble ne sont plus ressenties comme légitimes par le peuple qu’il s’agisse de l’ensemble de la population ou des personnes chargées d’appliquer la politique gouvernementale : les policiers mais aussi les soignants, les postiers…

    Nous changeons d’époque et les valeurs qui fondaient l’être ensemble ne fonctionnent plus, ne rassemblent plus. Elles sont coquille vide, pure incantation. Notamment le triptyque liberté, égalité, fraternité. C’étaient des valeurs qui rassemblaient, un idéal commun ; cest devenu un objet de revendication, un sujet de contestation.

    Pourtant, dans ces manifestations, en tout cas celles des gilets jaunes et d’une certaine manière celles qui contestaient la réforme des retraites, il y avait en germe des élans de solidarité, une volonté de construire un être ensemble plus respectueux, un mode collaboratif, une expression des émotions collectives ritualisée qui témoignent de valeurs émergentes largement partagées.

    On les retrouve moins dans les manifestations Traoré qui donnent plutôt à voir une espèce de mise en scène partagée entre le pouvoir et ses contestataires. Curieusement ce type de manifestation appartient plus que les mouvements de l’année précédente au passé : elle vise quasiment une prise de pouvoir politique plus qu’elle ne manifeste un être ensemble concret et impliqué.

    En ce sens le pouvoir est pris à son propre jeu et les réactions émotionnelles sont d’autant plus dangereuses qu’elles sont en quelque sorte artificielles, surjouées. Par les deux parties, le gouvernement et les manifestants, la famille Traoré dans le rôle de la famille « maffieuse » s’appuyant sur divers militants en mal de cause à défendre.

    Nos institutions portent-elles une responsabilité dans la gestion chaotique des problématiques sociales actuelles ?

    Michel Maffesoli : « Le droit suit les mœurs », nous disait déjà Emile Durkheim. Nos institutions, cest-à-dire vite, la démocratie représentative, la République Une et Indivisible, la centralisation et l’universalisme sont issues de l’imaginaire de la modernité. Elles ont été adaptées à cette époque où les valeurs prédominantes étaient l’individualisme, une organisation sociale fondée sur les stratifications liées au statut socio-économique et où l’égalité de droits tenait lieu de ciment social.

    Très clairement la société française explose plus que d’autres encore parce qu’elle a, dès la Révolution française, voulu ignorer les solidarités de proximité, les communautés locales, territoriales, les regroupements divers, qualifiés de communautaristse ou corporatistes.

    Or, et je l’ai écrit dès 1988 (Le temps des tribus, le déclin de l’individualisme dans les sociétés de masse), cet idéal démocratique est saturé. Le peuple ne se sent plus représenté par ses élites. Qui s’accrochent à leur pouvoir et à leurs privilèges. Le mouvement des gilets jaunes a été symptomatique de cette évolution. Et plus encore la profonde adhésion qu’il a rencontrée dans toute la population.

    Il s’agit de trouver collectivement de nouvelles manières de faire vivre ensemble les différentes composantes de la société : non plus une république une et indivisible, mais une « res publica » en mosaïque.

    Ce qui me frappe dans l’affaire Traoré c’est qu’elle se déroule je dirais sur le mode ancien, politiste, contestataire. En témoigne la réponse « juridique » de la famille Traoré faisant la leçon au gouvernement sur la séparation des pouvoirs.

    Le gouvernement cherche-t-il à diviser pour régner, à faire s’affronter les différentes « tribus », Traoré, gilets jaunes, etc. pour mieux les discréditer ? Les réactions sur les réseaux sociaux confortent cette hypothèse : tribu contre tribu. Pourquoi laisse-t-on manifester les Noirs et a-t-on tant réprimé les Gilets jaunes ?

    Ce serait une tactique très dangereuse, aussi risquée que l’usage démesurée des armes par les forces de l’ordre pour maintenir la tranquillité dans l’espace public.

    Car nous sommes entrés dans une époque où les réactions émotionnelles, les communions collectives prennent le pas sur les comportements rationnels. Si l’on ne sait pas intégrer la composante émotionnelle dans les échanges, si l’on se contente de balancer entre parfois un technocratisme rationaliste et d’autres fois une émotionnalité mièvre, les digues vont céder. C’est cela la déliquescence de l’état de droit.

    Permettre le vivre ensemble de tous, de toutes les communautés ne passe pas par le déni du « tribalisme postmoderne », mais par son acceptation. Le monde moderne, dans lequel le seul affrontement était entre ceux qui croyaient en Dieu et ceux qui n’y croyaient pas n’est plus. Il nous faut gérer le polythéisme des valeurs. Pour le meilleur et pour le pire.

    Le pire c’est l’affirmation tribale criminelle et délinquante face à une autorité qui masque ses défaillances par une violence non maitrisée.

    Le meilleur ce sont les mouvements quotidiens, plus ou moins médiatisés, de solidarité, d’entraide et de respect mutuel.

    Diviser pour régner est face à l’époque dans laquelle nous entrons la stratégie la pire.

    Michel Maffesoli vient de publier "La Nostalgie du sacré", aux éditions du Cerf