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  • Jean Sévillia: «Emmanuel Macron a une lecture anachronique de la colonisation»

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    FIGAROVOX.- En souhaitant «bâtir une nouvelle page» avec les pays africains, Emmanuel Macron a estimé dans une conférence de presse à Abidjan que le colonialisme est «une faute de la République». L’histoire de la colonisation française est-elle si simple?

    Sevillia2.jpgJean SÉVILLIA.- Cette expression est d’abord très maladroite sur le plan historique, car affirmer que la République a commis une faute en colonisant l’Afrique est une vision anhistorique, qui consiste à découper l’histoire de France en tranches, selon les régimes. Mais alors, où Emmanuel Macron place-t-il le curseur? Est-ce en 1880, alors que la République hérite déjà à cette époque d’un empire colonial constitué des vieilles colonies de l’Ancien Régime (les Antilles, les comptoirs des Indes, la Réunion, la Guyane...), ainsi que de l’Algérie acquise sous la Restauration et la monarchie de Juillet? Napoléon III avait de son côté colonisé la Nouvelle-Calédonie ; le Second Empire met aussi le pied au Sénégal, au Gabon, à Madagascar, en Cochinchine, au Cambodge... Vient enfin, c’est vrai, la IIIe République: Jules Ferry, dans les années 1870-1880, lance une grande politique coloniale, met la Tunisie sous protectorat, ainsi que le Tonkin et l’Annam en Indochine, puis s’aventure en Afrique, à partir du Sénégal et du Congo... Mais la colonisation n’est pas seulement l’œuvre de la République.

    Surtout, le contexte de la colonisation est alors international: la France n’est pas la seule puissance coloniale au XIXe siècle, puisqu’elle est en concurrence avec les Britanniques, les Allemands, les Belges... À la Conférence de Berlin en 1885, les Européens se partagent le continent africain. L’entreprise coloniale est un phénomène de mondialisation: l’Europe est alors en pleine expansion économique, et se donne le droit, avec bonne conscience, d’exercer un droit de puissance sur des civilisations moins développées. Cette bonne conscience est partagée par toutes les puissances européennes. Ce n’est pas le fait de la seule République française.

    Adopter un jugement moral comme le fait Emmanuel Macron est donc anachronique. Au XIXe siècle, on a considéré la colonisation comme un phénomène normal, de même que l’emploi de la force dans les relations internationales était tout à fait banal. C’est un projet républicain, d’ailleurs à l’époque la droite, qui a les yeux rivés sur la ligne bleue des Vosges, est plutôt réticente. Mais la vision républicaine de Jules Ferry est une vision géopolitique et économique. Il y a des marchés à conquérir! Et enfin, il y a bien sûr une dimension idéologique, humanitaire: la gauche républicaine pense qu’il faut exporter les droits de l’homme et l’éducation sur d’autres continents.

    Il faut dire aussi ce que la colonisation a apporté au continent africain.

    Dire que c’est une «erreur» est un point de vue manichéen : l’histoire ne peut souffrir de jugements binaires, car le monde ne se divise jamais parfaitement entre le bien et le mal. La colonisation est évidemment un rapport de force, qui a eu sa part de violences et d’injustices. Mais il faut dire aussi ce qu’elle a apporté au continent africain, sur le plan économique, mais aussi en matière de santé ou d’éducation. Il ne faut pas oublier non plus que l’un des grands motifs de la colonisation au XIXe siècle était d’abolir définitivement l’esclavage, qui déchirait le continent africain depuis des siècles, bien avant l’arrivée des Blancs!

    La construction d’une ligne de chemin de fer au Congo a coûté la vie à 17 000 ouvriers noirs employés dans des conditions sanitaires effroyables ; mais cette construction a permis le développement de régions qui autrefois étaient inaccessibles. Le seul pays d’Afrique qui n’ait jamais été vraiment colonisé est l’Éthiopie (mis à part, très brièvement, par Mussolini plus tard : c’est aujourd’hui le pays qui souffre du plus important retard de développement sur tout le continent africain...

    Emmanuel Macron parle de «colonialisme», faisant référence à une mentalité ou une idéologie. Justement, aujourd’hui dans les facultés de sciences humaines, les tenants des études «post-coloniales» considèrent que cette mentalité est encore présente et que la France n’a jamais vraiment «guéri» de son passé colonial...

    La colonisation, qui continue d’être un grand projet républicain de gauche jusque dans les années 30 et même pendant la guerre et l’immédiat après-guerre, prend fin à partir de 1946 et de la création de l’Union française qui amorce le processus de décolonisation. Mais jusque dans les années 1950, la colonisation n’est toujours pas regardée d’un point de vue moral. Puis, sous la Ve République, la colonisation est un non-sujet, hormis chez quelques nostalgiques, notamment de l’Algérie française.

    L’extrême-gauche cherche un substitut à la classe ouvrière qui lui a échappé, et elle le trouve dans les populations issues de la diversité.

    Ensuite, en effet, la question coloniale revient sous la vision indigéniste et tiers-mondiste: l’extrême-gauche cherche un substitut à la classe ouvrière qui lui a échappé, et elle le trouve dans les populations issues de la diversité, fussent-elles de nationalité française. Ces gens sont ramenés à leurs origines «ethniques», c’est une vision communautaire de la société française, qui revient à créer une nouvelle dialectique. La «lutte des races» succède à la lutte des classes. Cette vision est gravissime, car elle met à mal la notion de communauté nationale. Les divisions sont même ethnico-religieuses, puisque l’on traite l’islam presque comme une «race», en interdisant toute forme de critique à son endroit. Ce phénomène se nourrit de tout le discours habituel de l’anti-colonialisme: c’est le «sanglot de l’homme blanc», comme l’écrit très justement Pascal Bruckner dès 1983.

    Reste que cette vision post-coloniale est tout à fait fantasmatique, car la société française d’aujourd’hui n’est absolument pas organisée selon une stratification sociale post-coloniale. Ces militants anti-racistes prennent la couleur de peau ou l’origine «ethnique» comme un critère de discrimination, et ce faisant raisonnent eux-mêmes de manière raciste, c’est là tout leur paradoxe.

    L’histoire de la colonisation française pourra-t-elle à nouveau un jour être abordée de manière apaisée? N’est-ce pas le rôle des historiens de nous y aider?

    L’histoire est une œuvre de très longue haleine... L’ennui est qu’il existe dans le monde universitaire un véritable terrorisme intellectuel. Les historiens qui travaillent sur l’histoire coloniale sans être dans une logique d’accusation permanente de la France sont une petite poignée, car le système est fait pour éliminer ceux qui pensent à côté. Ainsi, les chercheurs préfèrent parfois se diriger vers d’autres périodes, car il est très difficile aujourd’hui d’être historien de la colonisation. Daniel Lefeuvre était excellent, mais il est malheureusement décédé il y a quelques années. Il faisait partie des rares universitaires à réaliser un véritable travail de recherche, non pas pour exalter la colonisation, mais pour raconter cette histoire, entremêlée de faces positives et d’autres plus négatives. C’est une histoire complexe, et le combat pour la vérité est extrêmement difficile.

    Ce d’autant plus que le débat d’idées est aujourd’hui judiciarisé: on se demande parfois si l’on ne va pas aller devant les tribunaux, pour avoir osé dire qu’il y a des choses positives dans la colonisation française!

    Journaliste, écrivain et historien, Jean Sévillia est chroniqueur au Figaro Magazine et membre du conseil scientifique du Figaro Histoire. Il a récemment dirigé l’ouvrage collectif  L’Église en procès. La réponse des historiens(Tallandier/Le Figaro, 2019).

  • Notre sélection : "Châteaux anciens - Tours et métairies nobles"

    Il n'y a tout de même pas que de mauvaises nouvelles ! Nous avons le plaisir d'apporter notre contribution à la dernière souscription proposée par les éditions du Chameau Malin. Tous les amoureux de leur pays devront conserver précieusement ce premier tome Châteaux anciens - Tours et métairies nobles".

     

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  • Ramadan 2020, ou l’an I de la charia en France

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    Cela fait des années que nous voyons venir la chose, des années que nous l’annonçons, mettons en garde les populations. Et voilà que les prophéties des oiseaux de malheur et des vilains racistes et islamophobes que nous sommes deviennent réalité. La France est en passe de devenir, sous nos yeux, un califat islamique, le ramadan de cette année si particulière le révèle au grand jour. La preuve ? À Marseille, le préfet vient de concéder officiellement aux musulmans des assouplissements aux règles du confinement pendant le ramadan. Dans le Calvados, des policiers ont révélé une note confidentielle de la préfecture leur intimant de n’intervenir dans les quartiers islamisés qu’en cas d’atteintes graves aux personnes ou aux biens. Et les mêmes policiers de supputer que le Calvados pourrait ne pas être le seul département concerné par ce type de directive. Qu’est-ce que tout cela signifie concrètement ? Si demain des personnes attrapent le Coronavirus à Marseille, la cause pourrait en être les dérogations accordées à l’islam. Merci, Monsieur le préfet, merci Messieurs Macron et Castaner.

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    Dans le Calvados, les braves gens qui supportent déjà le confinement, les amendes pour oubli d’attestation, ou pour des paniers de courses pas assez remplis, devront également endurer les tapages nocturnes des fidèles, l’agitation au bas de leur immeuble, les actes de vandalisme jugés mineurs sur leur véhicule ou leur logement, ou toutes autres nuisances. Si vous êtes dans ce cas, inutile d’appeler le 17, ni le 22 à Asnières, personne ne viendra : on vous dira de mettre des boules Quies, et de prendre votre mal en patience, c’est monsieur le préfet qui l’ordonne. Les forces de l’ordre sont mobilisées pour cerner la mémé qui promène son chien, ou encore les plagistes ou les randonneurs de haute montagne poursuivis par des hélicos : aux grands maux les grands remèdes… Ou mieux encore, les quinze fidèles qui assistaient à une messe en l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnay, qui ont suscité l’ire du gouvernement et des médias. Mais pas les musulmans qui fêtent ramadan dans le bruit et ne respectent pas le voisinage.

    Après l’affaire Mila, cette jeune lesbienne menacée de mort sur les réseaux sociaux pour avoir blasphémé, puis ensuite vertement tancée par mesdames Belloubet et Royal en personne, abandonnée à son sort par la gauche et les associations LGBT, le ramadan 2020 marque donc l’an I de la soumission officielle de la République à l’islam.

    L’islam a acquis un statut spécial dans notre république soi-disant laïque, neutre, mais qui en réalité se couche devant plus fort qu’elle : les lois de la République, qui exigent de respecter le confinement, la tranquillité du voisinage, l’intégrité des biens et des personnes, doivent s’incliner devant la tradition du ramadan. C’est la première fois que c’est exprimé officiellement par des représentants de l’État. Et avec effusion en plus : Castaner a exprimé ses vœux sincères de bon ramadan à tous nos compatriotes musulmans, après avoir ignoré superbement les fêtes de Pâques. La soumission dans la joie et la bonne humeur, en quelques sorte…

    Olivier Piacentini

    Riposte laïque

  • Les nuages s'accumulent et le ciel gronde, l'horizon s'assombrit

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    Une fois passée la période quelque peu agitée de la campagne électorale des municipales, nous pensions reprendre, avec toute la sérénité qu’impose l’analyse des faits sociaux, la publication de notre Lettre. Le déclenchement de la pandémie a surpris notre élan. D’autant que les innombrables déclarations contradictoires des uns et des autres sur les origines ou le traitement du virus, compliquées par les hésitations gouvernementales sur lesquelles il faudra bien revenir, ainsi que les craintes d’une grave crise économique n’ont pas favorisé  une réflexion sereine. Mais pour nous aussi c'est la reprise.

    Nous constatons par ailleurs que l’ensemble des médias, écrites ou audio-visuelles sont peu bavardes sur le reste de l’actualité. Le menu politique préparé dans l’arrière cuisine, ne sera vraisemblablement pas du gout de tout le monde et pourrait provoquer une dyspepsie douloureuse.

    Ce blog reprend donc du service, décidé à poursuivre l’analyse des événements et en tirer les leçons à l’aune de l’expérience, de la raison et de l’histoire. Tout au moins nous nous y efforcerons comme nous l'avons toujours fait. À cet égard nous pouvons d’ores et déjà relever que de manière constante, les crises économiques sont le terreau des crises sociales, elles-mêmes matrices des crises politiques. Le souci actuel est là. Les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets.  Comment notre régime politique partisan, prisonnier d’une opinion formatée par une presse aux ordres d’une finance apatride, sans possibilité de vision à long terme pourra-t-il ne s’intéresser qu’à notre bien commun sans arrière-pensée électorale ? 

    Quand on constate comment a été préparée cette crise par le gouvernement actuel et les précédents, la logorrhée stérile du président, les mensonges maladroits des ministres soutenus par quelques "scientifiques" aux ordres, l'avenir s'annonce difficile. L'horizon s'assombrit.

    Henri Bec

  • La tombe - Guy de Maupassant est à Béziers

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    Et pourquoi ne pas s'intéresser à notre histoire locale. Le texte ci-dessous a été publié dans le journal quotidien Gil Blas du 29 juillet 1884 sous la signature de Maufrigneuse, pseudonyme de Maupassant. Celui-ci est plus connu pour ses romans, Pierre et Jean, Bel ami et surtout ses nouvelles, Boule de suif, les contes de la Bécasse. Ce "reportage" appartient à la série des nouvelles. Son activité de journaliste l'a amené à s'intéresser à ce fait divers bien curieux... ou imaginé.

    Le dix-sept juillet mil huit cent quatre-vingt-trois, à deux heures et demie du matin, le gardien du cimetière de Béziers, qui habitait un petit pavillon au bout du champ des morts, fut réveillé par les jappements de son chien enfermé dans la cuisine. Il descendit aussitôt et vit que l’animal flairait sous la porte en aboyant avec fureur, comme si quelque vagabond eût rôdé autour de la maison. Le gardien Vincent prit alors son fusil et sortit avec précaution. Son chien partit en courant dans la direction de l’allée du général Bonnet et s’arrêta net auprès du monument de Mme Tomoiseau. Le gardien, avançant alors avec précaution, aperçut bientôt une petite lumière du côté de l’allée Malenvers. Il se glissa entre les tombes et fut témoin d’un acte horrible de profanation. Un homme avait déterré le cadavre d’une jeune femme ensevelie la veille, et il le tirait hors de la tombe. Une petite lanterne sourde, posée sur un tas de terre, éclairait cette scène hideuse. Le gardien Vincent, s’étant élancé sur ce misérable, le terrassa, lui lia les mains et le conduisit au poste de police. C’était un jeune avocat de la ville, riche, bien vu, du nom de Courbataille. Il fut jugé. Le ministère public rappela les actes monstrueux du sergent Bertrand et souleva l’auditoire. Des frissons d’indignation passaient dans la foule. Quand le magistrat s’assit, des cris éclatèrent : « À mort ! À mort ! » Le président eut grand-peine à faire rétablir le silence. Puis il prononça d’un ton grave : — Prévenu, qu’avez-vous à dire pour votre défense ? Courbataille, qui n’avait point voulu d’avocat, se leva. C’était un beau garçon, grand, brun, avec un visage ouvert, des traits énergiques, un œil hardi. Des sifflets jaillirent du public. Il ne se troubla pas, et se mit à parler d’une voix un peu voilée, un peu basse d’abord, mais qui s’affermit peu à peu.

    "Monsieur le président, Messieurs les jurés, J’ai très peu de choses à dire. La femme dont j’ai violé la tombe avait été ma maîtresse. Je l’aimais. Je l’aimais, non point d’un amour sensuel, non point d’une simple tendresse d’âme et de cœur, mais d’un amour absolu, complet, d’une passion éperdue. Écoutez-moi. Quand je l’ai rencontrée pour la première fois, j’ai ressenti, en la voyant, une étrange sensation. Ce ne fut point de l’étonnement, ni de l’admiration, ce ne fut point ce qu’on appelle le coup de foudre, mais un sentiment de bien-être délicieux, comme si on m’eût plongé dans un bain tiède. Ses gestes me séduisaient, sa voix me ravissait, toute sa personne me faisait un plaisir infini à regarder. Il me semblait aussi que je la connaissais depuis longtemps, que je l’avais vue déjà. Elle portait en elle quelque chose de moi, en son esprit quelque chose de mon esprit. Elle m’apparaissait comme une réponse à un appel jeté par mon âme, à cet appel vague et continu que nous poussons vers l’Espérance durant tout le cours de notre vie. Quand je la connus un peu plus, la seule pensée de la revoir m’agitait d’un trouble exquis et profond ; le contact de sa main dans ma main était pour moi un tel délice que je n’en avais point imaginé de semblable auparavant, son sourire me versait dans les yeux une allégresse folle, me donnait envie de courir, de danser, de me rouler par terre. Elle devint donc ma maîtresse. Elle fut plus que cela, elle fut ma vie même. Je n’attendais plus rien sur la terre, je ne désirais rien, plus rien. Je n’enviais plus rien. Or, un soir, comme nous étions allés nous promener un peu loin le long de la rivière, la pluie nous surprit. Elle eut froid. Le lendemain une fluxion de poitrine se déclara. Huit jours plus tard elle expirait. Pendant les heures d’agonie, l’étonnement, l’effarement m’empêchèrent de bien comprendre, de bien réfléchir. Quand elle fut morte, le désespoir brutal m’étourdit tellement que je n’avais plus de pensée. Je pleurais. Pendant toutes les horribles phases de l’ensevelissement ma douleur aiguë, furieuse, était encore une douleur de fou, une sorte de douleur sensuelle, physique. Puis quand elle fut partie, quand elle fut en terre, mon esprit redevint net tout d’un coup et je passai par toute une suite de souffrances morales si épouvantables que l’amour même qu’elle m’avait donné était cher à ce prix-là. Alors entra en moi cette idée fixe : « Je ne la reverrai plus. » Quand on réfléchit à cela pendant un jour tout entier, une démence vous emporte ! Songez ! Un être est là, que vous adorez, un être unique, car dans toute l’étendue de la terre il n’en existe pas un second qui lui ressemble. Cet être s’est donné à vous, il crée avec vous cette union mystérieuse qu’on nomme l’Amour. Son œil vous semble plus vaste que l’espace, plus charmant que le monde, son œil clair où sourit la tendresse. Cet être vous aime. Quand il vous parle, sa voix vous verse un flot de bonheur. Et tout d’un coup il disparaît ! Songez ! Il disparaît non pas seulement pour vous, mais pour toujours. Il est mort. Comprenez-vous ce mot ? Jamais, jamais, jamais, nulle ne part, cet être n’existera plus. Jamais cet œil ne regardera plus rien ; jamais cette voix, jamais une voix pareille, parmi toutes les voix humaines, ne prononcera de la même façon un des mots que prononçait la sienne. Jamais aucun visage ne renaîtra semblable au sien. Jamais, jamais ! On garde les moules des statues ; on conserve des empreintes qui refont des objets avec les mêmes contours et les mêmes couleurs. Mais ce corps et ce visage, jamais ils ne reparaîtront sur la terre. Et pourtant il en naîtra des milliers de créatures, des millions, des milliards, et bien plus encore, et parmi toutes les femmes futures, jamais celle-là ne se retrouvera. Est-ce possible ? On devient fou en y songeant ! Elle a existé vingt ans, pas plus, et elle a disparu pour toujours, pour toujours, pour toujours ! Elle pensait, elle souriait, elle m’aimait. Plus rien. Les mouches qui meurent à l’automne sont autant que nous dans la création. Plus rien ! Et je pensais que son corps, son corps frais, chaud, si doux, si blanc, si beau, s’en allait en pourriture dans le fond d’une boîte sous la terre. Et son âme, sa pensée, son amour, où ? Ne plus la revoir ! Ne plus la revoir ! L’idée me hantait de ce corps décomposé, que je pourrais peut-être reconnaître pourtant. Et je voulus le regarder encore une fois ! Je partis avec une bêche, une lanterne, un marteau. Je sautai par-dessus le mur du cimetière. Je retrouvai le trou de sa tombe ; on ne l’avait pas encore tout à fait rebouché. Je mis le cercueil à nu. Et je soulevai une planche. Une odeur abominable, le souffle infâme des putréfactions me monta dans la figure. Oh ! Son lit, parfumé d’iris ! J’ouvris la bière cependant, et je plongeai dedans ma lanterne allumée, et je la vis. Sa figure était bleue, bouffie, épouvantable ! Un liquide noir avait coulé de sa bouche. Elle ! C’était elle ! Une horreur me saisit. Mais j’allongeai le bras et je pris ses cheveux pour attirer à moi cette face monstrueuse ! C’est alors qu’on m’arrêta. Toute la nuit j’ai gardé, comme on garde le parfum d’une femme après une étreinte d’amour, l’odeur immonde de cette pourriture, l’odeur de ma bien-aimée ! Faites de moi ce que vous voudrez."

    Un étrange silence paraissait peser sur la salle. On semblait attendre quelque chose encore. Les jurés se retirèrent pour délibérer. Quand ils rentrèrent au bout de quelques minutes, l’accusé semblait sans craintes, et même sans pensée. Le président, avec les formules d’usage, lui annonça que ses juges le déclaraient innocent. Il ne fit pas un geste, et le public applaudit.

    29 juillet 1884

  • « Je ne crois pas aux déclarations du genre « rien ne sera plus jamais comme avant » – Michel Houellebecq

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    Il faut bien dire un mot sur ce qui nous arrive, pandémie, confinement, crise financière, matérielle, morale, spirituelle. Nous aurons l'occasion de les évoquer.

    Pour l'instant, et sans nous y soustraire, restons dans la littérature.

    Michel Houellebeq est égal à lui-même et heureusement ! Pessimiste mais réaliste et talentueux. C'est la première fois qu'il s'exprime sur le sujet. Parions sur notre optimisme pour espérer un avenir plus radieux tout en estimant intérieurement qu'il n'a peut-être pas tort. La politique de l'autruche est confortable mais redoutablement pernicieuse et à court terme mortifère..

     

    Réponse à quelques amis

    Il faut bien l’avouer : la plupart des mails échangés ces dernières semaines avaient pour premier objectif de vérifier que l’interlo­cuteur n’était pas mort, ni en passe de l’être. Mais, cette vérification faite, on essayait quand même de dire des choses intéressantes, ce qui n’était pas facile, parce que cette épidémie réussissait la prouesse d’être à la fois angoissante et ennuyeuse. Un virus banal, apparenté de manière peu prestigieuse à d’obscurs virus grippaux, aux conditions de survie mal connues, aux caractéristiques floues, tantôt bénin tantôt mortel, même pas sexuellement transmis­sible : en somme, un virus sans qualités. Cette épidémie avait beau faire quelques milliers de morts tous les jours dans le monde, elle n’en produisait pas moins la curieuse impression d’être un non-événement. D’ailleurs, mes estimables confrères (certains, quand même, sont estima­bles) n’en parlaient pas tellement, ils préféraient aborder la question du confinement ; et j’aimerais ici ajouter ma contribution à certaines de leurs observations.

    Frédéric Beigbeder (de Guéthary, Pyrénées-Atlantiques). Un écrivain de toute façon ça ne voit pas grand monde, ça vit en ermite avec ses livres, le confinement ne change pas grand-chose. Tout à fait d’accord, Frédéric, question vie sociale ça ne change à peu près rien. Seulement, il y a un point que tu oublies de considérer (sans doute parce que, vivant à la campagne, tu es moins victime de l’interdit) : un écrivain, ça a besoin de marcher.

    Ce confinement me paraît l’occasion idéale de trancher une vieille querelle Flaubert-Nietzsche. Quelque part (j’ai oublié où), Flaubert affirme qu’on ne pense et n’écrit bien qu’assis. Protesta­tions et moqueries de Nietzsche (j’ai également oublié où), qui va jusqu’à le traiter de nihiliste (ça se passe donc à l’époque où il avait déjà commencé à employer le mot à tort et à travers) : lui-même a conçu tous ses ouvrages en marchant, tout ce qui n’est pas conçu dans la marche est nul, d’ailleurs il a toujours été un danseur dionysiaque, etc. Peu suspect de sympathie exagérée pour Nietzsche, je dois cependant reconnaître qu’en l’occurrence, c’est plutôt lui qui a raison. Essayer d’écrire si l’on n’a pas la possibilité, dans la journée, de se livrer à plusieurs heures de marche à un rythme soutenu, est fortement à déconseiller : la tension nerveuse accumulée ne parvient pas à se dissoudre, les pensées et les images continuent de tourner douloureusement dans la pauvre tête de l’auteur, qui devient rapidement irritable, voire fou.

    La seule chose qui compte vraiment est le rythme mécanique, machinal de la marche, qui n’a pas pour première raison d’être de faire apparaître des idées neuves (encore que cela puisse, dans un second temps, se produire), mais de calmer les conflits induits par le choc des idées nées à la table de travail (et c’est là que Flaubert n’a pas absolument tort) ; quand il nous parle de ses conceptions élaborées sur les pentes rocheuses de l’arrière-pays niçois, dans les prairies de l’Engadine etc., Nietzsche divague un peu : sauf lorsqu’on écrit un guide touristique, les paysages traversés ont moins d’importance que le paysage intérieur.

    Catherine Millet (normalement plutôt parisienne, mais se trouvant par chance à Estagel, Pyrénées-Orientales, au moment où l’ordre d’immobilisation est tombé). La situation présen­te lui fait fâcheusement penser à la partie « anticipation » d’un de mes livres, La possibilité d’une île.

    Alors là je me suis dit que c’était bien, quand même, d’avoir des lecteurs. Parce que je n’avais pas pensé à faire le rapprochement, alors que c’est tout à fait limpide. D’ailleurs, si j’y repense, c’est exactement ce que j’avais en tête à l’époque, concernant l’extinction de l’humanité. Rien d’un film à grand spectacle. Quelque chose d’assez morne. Des individus vivant isolés dans leurs cellules, sans contact physique avec leurs semblables, juste quelques échanges par ordina­teur, allant décroissant.

    Emmanuel Carrère (Paris-Royan ; il semble avoir trouvé un motif valable pour se déplacer). Des livres intéressants naîtront-ils, inspirés par cette période ? Il se le demande.

    Je me le demande aussi. Je me suis vraiment posé la question, mais au fond je ne crois pas. Sur la peste on a eu beaucoup de choses, au fil des siècles, la peste a beaucoup intéressé les écrivains. Là, j’ai des doutes. Déjà, je ne crois pas une demi-seconde aux déclarations du genre « rien ne sera plus jamais comme avant ». Au contraire, tout restera exactement pareil. Le déroulement de cette épidémie est même remarquablement normal. L’Occident n’est pas pour l’éternité, de droit divin, la zone la plus riche et la plus développée du monde ; c’est fini, tout ça, depuis quelque temps déjà, ça n’a rien d’un scoop. Si on examine, même, dans le détail, la France s’en sort un peu mieux que l’Espagne et que l’Italie, mais moins bien que l’Allemagne ; là non plus, ça n’a rien d’une grosse surprise.

    Le coronavirus, au contraire, devrait avoir pour principal résultat d’accélérer certaines mutations en cours. Depuis pas mal d’années, l’ensemble des évolutions technologiques, qu’elles soient mineures (la vidéo à la demande, le paiement sans contact) ou majeures (le télétravail, les achats par Internet, les réseaux sociaux) ont eu pour principale conséquence (pour principal objectif ?) de diminuer les contacts matériels, et surtout humains. L’épidémie de coronavirus offre une magnifique raison d’être à cette tendance lourde : une certaine obsolescence qui semble frapper les relations humaines. Ce qui me fait penser à une comparaison lumineuse que j’ai relevée dans un texte anti-PMA rédigé par un groupe d’activistes appelés « Les chimpanzés du futur » (j’ai découvert ces gens sur Internet ; je n’ai jamais dit qu’Internet n’avait que des inconvénients). Donc, je les cite : « D’ici peu, faire des enfants soi-même, gratuitement et au hasard, semblera aussi incongru que de faire de l’auto-stop sans plateforme web. » Le covoiturage, la colocation, on a les utopies qu’on mérite, enfin passons.

    Il serait tout aussi faux d’affirmer que nous avons redécouvert le tragique, la mort, la finitude, etc. La tendance depuis plus d’un demi-siècle maintenant, bien décrite par Philippe Ariès, aura été de dissimuler la mort, autant que possible ; eh bien, jamais la mort n’aura été aussi discrète qu’en ces dernières semaines. Les gens meurent seuls dans leurs chambres d’hôpital ou d’EHPAD, on les enterre aussitôt (ou on les incinère ? l’incinéra­tion est davantage dans l’esprit du temps), sans convier personne, en secret. Morts sans qu’on en ait le moindre témoignage, les victimes se résument à une unité dans la statistique des morts quotidiennes, et l’angoisse qui se répand dans la population à mesure que le total augmente a quelque chose d’étrangement abstrait.

    Un autre chiffre aura pris beaucoup d’importance en ces semaines, celui de l’âge des malades. Jusqu’à quand convient-il de les réanimer et de les soigner ? 70, 75, 80 ans ? Cela dépend, apparemment, de la région du monde où l’on vit ; mais jamais en tout cas on n’avait exprimé avec une aussi tranquille impudeur le fait que la vie de tous n’a pas la même valeur ; qu’à partir d’un certain âge (70, 75, 80 ans ?), c’est un peu comme si l’on était déjà mort.

    Toutes ces tendances, je l’ai dit, existaient déjà avant le coronavirus ; elles n’ont fait que se manifester avec une évidence nouvelle. Nous ne nous réveillerons pas, après le confinement, dans un nouveau monde ; ce sera le même, en un peu pire.

    Michel HOUELLEBECQ

  • Crise électorale et crise sanitaire : ce gouvernement est-il digne de gouverner la France ?

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    Il serait réconfortant de se dire que la crise du coronavirus impose de faire bloc autour du chef de l’État et du gouvernement, mais la majorité des Français a bien du mal à leur faire confiance ! Il faut dire que chaque jour qui passe montre que, par imprévoyance, impéritie ou calcul machiavélique, ils semblent se complaire dans une improvisation permanente. Y compris pour les élections municipales, dont le premier tour vient de s’achever, avec une abstention record, pourtant prévisible.

    Force est de constater que les représentants de la majorité, ministres ou parlementaires, manient les mêmes éléments de langage : tous se retranchent derrière l’avis des experts, un « conseil scientifique » de onze chercheurs, qui orientent, disent-ils, leurs décisions. Il ne s’agit pas de contester les compétences de ces spécialistes mais de rappeler qu’il appartient à l’exécutif de décider, après avoir consulté, d’anticiper l’avenir et d’assumer ses décisions. Se référer continuellement aux experts, sans même qu’on sache précisément ce qu’ils ont dit, c’est faire preuve à la fois d’arrogance, de veulerie et d’irresponsabilité.

    Épargnons à nos gouvernants, qui n’ont pas besoin de cela pour être discrédités, la liste de leurs contradictions. Alors qu’ils avaient l’exemple de la Chine, de la Corée du Sud et, maintenant, de l’Italie, ils ont mis du temps à saisir l’ampleur de la crise sanitaire. Le 21 janvier, Agnès Buzyn, encore ministre de la Santé, déclarait que le risque d’une introduction en France était « faible », même s’il « ne peut être exclu ». Sibeth Ndiaye soulignait que la France n’était pas dans une situation « épidémique ». Aujourd’hui, on répète à satiété qu'une deuxième vague n'est pas exclue et que les mesures de confinement généralisé pourraient revoir le jour.

    Un gouvernement ne saurait conserver la confiance des Français quand il tergiverse autant : ce n’est pas la dramatisation brutale de la situation qui peut la restaurer. Il faut espérer que, face à l’épreuve, les politiciens prendront les mesures qui s’imposent. Leur échec serait aussi celui de chacun des Français : il faut se serrer les coudes et être disciplinés pour pallier les défaillances du pouvoir. Mais, lorsque la crise sanitaire sera vaincue et qu’il faudra affronter, sans doute, une crise économique, on ne pourra se contenter de passer l’éponge sur les fautes de nos gouvernants. Il faudra leur demander des comptes et les renouveler.

    Boulevard Voltaire

  • T G V SUD INFOS EXPRESS

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    N° SPECIAL  Mai 2020

    EDITO:

    Le gouvernement l'a  annoncé, le déconfinement sera effectif à partir du 11 mai .Les conditions de sécurité sanitaires exigées sont extrêmement contraignantes pour les transporteurs et pour les autorités organisatrices régionales chargés de leurs mises en œuvre. Pour les usagers ce ne sera pas simple non plus et il est important de ne pas les faire fuir vers un covoiturage massif qui serait catastrophique tant pour l'environnement que pour la sécurité  sanitaire et physique des personnes

    La FNAUT régionale a été invitée à participer régulièrement à des réunions téléphoniques afin d'être d'une part informée des dispositions prises et d'autre part  d'exprimer notre vision et nos attentes sur certains points

    Nous tenons, par les compte rendus des réunions qui ont eu lieu les 5 et 6 mai, à vous  tenir informés de la situation telle que certains d'entre vous la rencontreront à partir de lundi prochain s'ils sont amenés à se déplacer dans le cadre de leurs activités quotidiennes

    Objet : Conditions de reprise du trafic à compter du 11 mai

    Réunion SNCF le 5 mai (Directeur Production Mobilité)

    Inconnu : Combien de gens se déplacent? Combien en train? A quelle heure ?

    • Un questionnaire en ligne est adressé à 180000 clients afin d'évaluer les besoins.
    • Plan de transport  élaboré pour les 3 semaines à venir
    • Un ASCT sera présent dans tous les trains et assurera un comptage des gens présents pour ajuster au plus près de la situation rencontrée

    Mesure de sécurité sanitaire mises en place

    • Obligation de porter un masque dès l'accès à la gare
    • Distanciation Physique à respecter:

                -Grande gare :  Hall et quai

                -Moyenne gare : Uniquement hall

                -Petite gare : marquage devant distributeur et quai

     Tout ne sera pas opérationnel le 11 mai sauf dans les grandes gares

     Distributeur automatique de gel dans les grandes gare et gares moyennes (gratuit)

    Toilettes ouvertes  alimentées en eau et savon

    Mesures spécifiques nettoyage

    équipes mobiles entre 6h00 et 10h00 et entre 16h00 et 20h00 soit à bord soit sur les quais de gare

    Accès TER réservation pendant la durée distanciation obligatoire imposée par le gouvernement et qui met en cause la responsabilité pénale de l'entreprise

    Mise en place d'un coupon digital imprimable à partir du site TER  et qui devrait également être disponible aux guichets. J'ai insisté sur la position de la FNAUT sur l'accessibilité aux personnes non équipées de moyens numériques. Réponse de la Direction Régionale SNCF

    « Concernant les mesures sanitaires, afin de respecter la distanciation dans les gares, nous invitons donc les voyageurs à privilégier l’impression du coupon Accès Train Serein depuis son domicile ou le téléchargement sur son téléphone portable depuis l’application SNCF. Conscient de cette contrainte digitale, les voyageurs en difficulté pourront obtenir un Accès Train Serein via le centre de relation client liO TER Occitanie au 0800 31 31 31 ou au guichet des gares ouvertes à compter du lundi 11 mai .  Je vous confirme, que les clients ne seront pas obligés de posséder un ordinateur, ou une imprimante pour pouvoir accéder à ces coupons, ils pourront utiliser les mêmes outils et applications sur lesquels ils avaient l’habitude d’aller auparavant. »

    Le coupon ne peut pas être obtenu auprès des distributeurs.

     Lorsque le quota de billets prévus pour l'occupation du train est atteint la vente est suspendue. L'usager peur se reporter sur un autre train circulant  (sans surcoût)

    Mesures commerciales

    Remboursement depuis hier des abonnements hebdomadaires et mensuels à compter du 16 mars

    Remboursement global par SNCF pour les titres combinés

    Plan transport annoncé sur l'ensemble de la Région

    47% du nominal soit 224 trains  et 57% pour train + cars)

    93 rames seront en circulation

    Toulouse Narbonne  Service minimum niveau

    Carcassonne Limoux service Normal

    Perpignan Ille surTêt (en principe à partir du 21 mai)

    Lignes Littoral

    Avignon Cerbère  Service minimum

    Nîmes Alès Service minimum (proche de la normale)

    Nîmes Le Grau du Roi Service minimum (proche de la normale)

    Béziers Bédarieux reprise le 11 mai ou le 18 mai (si travaux)

    Réunion Région (Vice- Président Transport)

    Trafic à partir semaine prochaine environ 40% du nominal avec près de 50% en période de pointe